
3 nouveaux jeux de société vraiment pas terribles
Découvrez Holi, Sumatra et Sonora, 3 nouveaux jeux de société vraiment pas top top et plutôt décevants.
Soyons honnêtes. Dans le milieu du jeu de société, sur le net, on a souvent tendance à tomber sur les mêmes articles : des réactions qui vantent tel ou tel jeu, qui ne font que dire du bien et qui se pâment devant toute sortie. Sauf que. Il arrive que des jeux sont mal construits. Certains ne sont tout simplement pas amusants ou passionnants. Le cas aujourd’hui avec 3 nouveautés, Holi, Sumatra et Sonora, trois jeux vraiment pas terribles.
Mais au fond, qu’est-ce qu’un bon (ou un mauvais) jeu ?
Difficile de proposer une réponse, une recette uniques. S’il y a des éléments intrinsèques et créatifs, nous en parlons ici plus bas, ce qui fait le succès d’un jeu repose également sur des aspects extrinsèques peu maîtrisables en soi : le nom et la crédibilité de son auteur ou autrice, le buzz et la comm qu’il y a autour du jeu, son prix aussi, les différents biais psychologiques liés à son achat : validation sociale, rareté, etc.
Tout jeu repose toutefois sur des piliers de production plus ou moins respectés et présents. En voici quelques-uns :
Défi continu
Un bon (ou un mauvais) jeu permet à ses joueurs et joueuses de s’embarquer dans des parties constituées de défis continus, dont chacun mène à un autre défi, pour garder les participantes et participants impliqués dans le jeu : je fais ceci maintenant, pour placer ou construire cela pour plus tard. Chaque défi doit répondre à une sorte d’objectif dans le jeu au terme plus ou moins court ou long.
Histoire intéressante
La très grande majorité des jeux de société sont construits autour d’un thème : une découverte, une ville, un récit, une adaptation d’un univers littéraire ou cinématographique.
Ce n’est pas essentiel, ce n’est pas le thème et son importance qui définit l’intérêt ou la qualité du jeu. La très grande majorité des jeux dits à l’allemande intègrent des thèmes tenus et tarabiscotés, avec des mécaniques de jeu souvent détachées du thème.
Cependant, un bon thème, riche, ample, cohérent avec les mécaniques, peut animer et immerger encore plus.
Souplesse et variété
Un bon jeu devrait permettre aux joueuses et joueurs de marquer des points et d’atteindre les objectifs du jeu de différentes manières possibles.
Moins le jeu est linéaire, plus il offre différentes voies et plus il oblige les gens à devoir prendre des décisions, à tâtonner, à tenter différentes stratégies. Plus le jeu est souple, et plus le jeu est stimulant. Plus on se l’approprie à vouloir tenter des trucs, des bidules. Pas toujours le cas de tous les jeux.
Récompenses
Au lieu de simplement gagner des points, plus le jeu intégre des récompenses et plus on se sent impliqué dans le jeu. Plus on a envie de continuer, car on suit alors sa progression : j’ai débloqué cet élément-ci, j’ai créé ce combo-là. C’est tout l’intérêt de l’engine-building.
Effectuer telle ou telle action peut être récompensé non pas seulement par de simples points, mais par de nouvelles compétences, des avantages, de nouveaux objectifs débloqués. Ces récompenses immédiates, claires et utiles suscitent une certaine motivation, puissante. Car au fond, on ne le dit peut-être jamais assez, on ne joue pas pour gagner mais pour jouer.
Visuels et matériel
Comme on dit dans le milieu, un jeu moche est un jeu mort. Plus les illustrations sont recherchées et raffinées, et plus elles permettent de s’immerger dans le jeu et trouver du plaisir à le pratiquer. Cela est également vrai pour tout ce qui est ergonomie du jeu et pictogrammes, les symboles utilisés dans le jeu pour signifier ceci ou cela. Plus le jeu est clair et plus il gagne en fluidité.
Le matériel joue lui aussi une certaine part dans le succès d’un jeu. D’où les figurines dans les jeux de société, qui permettent bien souvent de cristalliser, de s’immerger encore plus dans le thème.
Règles
Non, il n’est pas facile d’écrire de bonnes règles de jeu, c’est tout un art. Elles ne doivent être ni trop longues, pour ne pas noyer ou décourager, ni trop courtes, au risque d’être trop denses et de perdre en didactique.
Plus les règles sont claires et limpides et plus le plaisir est décuplé. Si pour jouer au jeu il faut passer des heures sur le net à parcourir faq et forum, on perd bien vite le plaisir du jeu.
Associez tous ces éléments, et vous obtenez un bon jeu. Enlevez-en un, deux ou trois, et le risque existe que votre jeu déçoive et ne parvienne pas à convaincre ou passionner. Le cas ici aujourd’hui avec trois nouveautés, Holi, Sumatra et Sonora.
Holi
Ce qui détonne en ouvrant le jeu, c’est son matériel hors normes : il va falloir commencer par construire un plateau de jeu en 3D, de trois étages. Tout le jeu se joue et se déploie en effet sur trois niveaux.
En commençant au rez, son pion va pouvoir peu à peu s’élever dans les étages pour disséminer des jetons qui constituent le moyen principal de marquer des points. Et évidemment, plus on gravit les étages et plus ces jetons placés rapportent.
Holi, c’est la fête traditionnelle en Inde. La Holi (होली (holī)), parfois appelée fête des couleurs, ou Phalguna, est une fête hindoue originaire de l’Inde célébrée vers l’équinoxe de printemps. Elle trouve son origine dans la Vasantotsava, à la fois un sacre du printemps et célébration de la fertilité. Elle est fêtée notamment dans certaines régions de l’Inde du Nord durant deux jours au cours de la pleine lune du mois de Phalguna qui se situe en février ou mars. La Holi est donc appelée la fête des couleurs car la tradition est de se recouvrir et de lancer des pigments de différentes couleurs, qui portent tous une signification bien précise : le vert pour l’harmonie, l’orange pour l’optimisme, le bleu pour la vitalité et le rouge pour la joie et l’amour.
Holi, le jeu de plateau, le jeu des plateaux, puisqu’on joue sur trois plateaux, trois niveaux différents, nous plonge plus ou moins dans cette fête sacrée traditionnelle insolite.
Le but : jouer une carte de sa main avec des indications de cases pour placer son pion et quelques-uns de ses jetons de couleurs qui représentent les pigments de la fête.
Et si on touche un pion adverse avec l’un de ses jetons, on marque un point. Le but est donc de s’élever, car c’est ainsi que ses pions rapportent plus de points. Avec la subtilité de devoir prendre en compte tous les étages, supérieurs et inférieurs. En effet, selon les jetons présents en-dessus et en-dessous, il va se passer des choses : les jetons en-dessus tombent sur son pion, et les jetons tombent également s’il n’y en a pas à l’étage inférieur.
Si le thème est plus moins intégré, plus ou moins, pourquoi grimper ?, le jeu devient bien vite ingérable, injouable : où se déplacer, sur quelle case, sur quel jeton, on peut prendre ces jetons, les sucreries, mais pas ceux-là, les pigments, sur quelle case « lancer » ses jetons, monter, pas monter ?
Et surtout, au bout d’un moment le plateau, les plateaux deviennent bien vite illisibles à force d’avoir, de voir des jetons de tous les côtés, à tous les étages.
Si le jeu en jette, c’est le cas de le dire, Holi finit par devenir un véritable casse-tête insipide. Rajoutez encore des objectifs communs, qui viennent encore plus tétaniser la partie à coup d’optimisation de placement. Pourquoi joue-t-on ? Pas pour ça.
Holi, verdict
Bof bof
Un jeu au matériel hors normes aux trois plateaux qui demande un effort de visualisation. Indigeste.
Holi, créé par Julio E. Nazario et édité par Floodgate Games, pour 2 à 4 (tourne mieux à 2, sinon ça devient encore pire et ingérable), dès 13 ans (peut être joué avant, dès 10-12 ans), pour des parties de 45′. Le jeu n’existe pour l’instant qu’en anglais. Et ne mériterait pas de VF. Prix constaté : 32 euros.
Sumatra
Reiner Knizia. Tout est dit.
Dans ce jeu, et malgré un titre qui invite au voyage et à l’exploration, on passe sa partie à collectionner des tuiles qui vont finir par marquer des points par-ci, par-là. On oublie bien vite le thème, comme dans la plupart des centaines de jeux créés depuis plus de trente ans par l’auteur germanique. On a bel et bien affaire ici à un jeu dit à l’allemande, avec un thème abstrait aux mécaniques prioritaires.
Sauf que. Le jeu ne parvient pas à convaincre. On ne fait que collectionner des tuiles pour les placer sur son plateau personnel et tenter de marquer le plus de points en fin de partie, avec des lignes et des tuiles qui fonctionnent et interagissent toutes de manière diverse et variée : celle-ci ainsi, celle-là comme ça. Parce que.
Sumatra ne parvient pas à créer de tension, d’enjeux, au final, d’intérêt. Le jeu laisse une impression de froid, de désintérêt total. Rien ne passionne, rien ne transcende. On joue, sans passion.
Sumatra, verdict
Bof Bof
Un jeu de collection de tuiles insipide qui peine à passionner
Sumatra, créé par Reiner Knizia et édité par Ludonova, pour 2 à 5 (tourne « bien » à toutes les configurations »), dès 8 ans (bonne estimation), pour des parties de 45′. Le jeu n’existe pour l’instant pas en français, uniquement en anglais et espagnol. Prix constaté : 28 euros.
Sonora
Le désert de Sonora est la plus grande zone désertique de l’Amérique du Nord. Il occupe une superficie de 320’000 km2 dans le sud-ouest des États-Unis dans l’Arizona et la Californie et dans le nord du Mexique. Il est réputé pour ses cactus saguaro à la forme allongée, dont certains atteignent les 15 mètres de hauteur. Ses paysages de villes fantômes et de vastes étendues ne sont pas sans évoquer le Far West et l’univers de Lucky Luke.
Et si vous avez vu les séries Breaking Bad et son excellent prologue Better Call Saul et sa saison finale en 2021, vous connaissez bien le désert et son paysage-type.
C’est donc dans ce désert, dans ce lieu, dans ce paysage que se déroule Sonora, le tout premier jeu de pichenette en mode Flick & Write.
En 2021, le marché est bourré à craquer de Roll & Write. On lance les dés, on coche un truc. Parfois, comme dans Welcome to ou Demeter, on a affaire à un Flip & Write, on retourne une carte, on coche un truc. Dans Sonora, en mode Carrom ou Carambole, on fait une pichenette des bords pour faire tomber ses jetons sur le plateau et ses quatre régions du désert, pour tenter de les placer aux endroits sélectionnés. Selon la valeur du jeton « pichenetté », selon l’emplacement atteint, on coche alors des trucs, des bidules sur son plateau personnel et effaçable.
Ok, why not. Sonora propose une réinvention détonante et un mélange pimenté entre jeu de pichenette et Roll & Write. Sur le papier, pourquoi pas. Avec un marché du jeu de société saturé, toute innovation est bonne à prendre, j’imagine.
Sauf que. Déjà à la lecture des règles, puis encore pire en y jouant, on se rend bien vite compte qu’on se retrouve en vrai dans le fameux épisode de Kaamelott à jouer au cul-de-chouette. Ce jeton ici comme ça pour cocher ce truc ici, ainsi, comme ceci, pour cela. Cette ligne, mais pas cette colonne, pour entourer cet élément ci, mais pas celui-là. C’est vite vu, on passe sa partie à vouloir crier « Kamoulox« .
Tous les jetons lancés finissent bien par nous permettre de cocher des éléments, n’importe où, n’importe comment, sans possibilité de maîtrise ou de contrôle. On lance, on coche, et voilà. C’est tout. C’est peu. Pour un « petit » jeu de pichenette et d’éléments à cocher, on finit vite par vouloir lancer le jeu comme ses jetons, loin. Un jeu qui se subit plus qu’il ne s’apprécie.
Sonora, verdict
Bof bof
Sonora mélange pichenette et roll & write aux règles et exceptions pénibles et indigestes.
Sonora, créé par Rob Newton et édité par Pandasaurus Games, de 2 à 4 (tourne « bien » à toutes les configurations), dès 10 ans (plutôt 14, au vu de la complexité et des multiples exceptions des éléments à cocher), pour de parties (bien trop pénibles) de 45′. Pour l’instant, le jeu n’existe qu’en anglais. Prix constaté : 26 euros.
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