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Skymines. Un jeu qui a bonne mine

Avec Skymines, plongez au cœur de la conquête minière de l’espace. Un jeu de planification SF. La refonte moderne de Mombasa.


Skymines

Skymines, le pitch :

« Cela fait maintenant 50 ans que l’humanité a commencé à faire des forages sur la Lune et les astéroïdes. Jusqu’alors, le Gouvernement Mondial contrôlait l’exclusivité de ces missions, avant qu’une période de troubles sans précédent ne le force à laisser les puits de mine à l’abandon.

Aujourd’hui, des compagnies minières ambitieuses et des investisseurs privés se lancent dans l’exploitation de ces gisements et comptent bien en tirer profit. Votre mission d’investisseur est de gagner le plus de crypcoins possible en sept manches. Pour ce faire, vous allez investir des ressources minières dans les compagnies et installer leurs succursales sur la Lune et les astéroïdes. Vous pourrez également augmenter vos revenus en faisant des recherches scientifiques et en collectant le précieux Hélium-3« 

Avec Skymines, l’auteur autrichien Alexander Pfister, a rethématisé son « ancien » jeu Mombasa sorti il y a huit ans en 2015. Mombasa parlait d’expédition africaine, et de colonisation et d’exploitation des ressources. Des sujets peut-être épineux, litigieux aujourd’hui… Skymines ne se déroule plus dans la colonisation, historique, de l’Afrique, mais dans l’espace en mode science-fiction. Dorénavant, on y exploite des ressources que l’on peut trouver sur la lune et les astéroïdes. Tout cela dans le but d’acquérir de la monnaie… spatiale.

Pfister, qui est surtout connu pour avoir conçu le best-seller Great Western Trail, a fait équipe avec Viktor Kobilke pour reprendre le gameplay de base de Mombasa et le rendre plus captivant pour les joueureuses à la recherche d’un thème… rafraîchi et « lissé » (certains diraient… woké ?).

Skymines, comment on joue ?

Dans Skymines, les joueureuses s’affrontent pour investir et développer les quatre entreprises qui contrôlent l’exploitation minière dans leurs régions respectives. Ils accumulent également de l’argent, appelé crypcoins (sic !), et développent leurs recherches minières et leurs réserves d’hélium. Le jeu se découpe en sept tours, au cours desquels les joueureuses choisissent les cartes à utiliser, puis effectuent des actions avec ces cartes avant de se préparer pour le tour suivant.

La quantité d’hélium dont vous disposez peut être considérablement augmentée par la contribution des scientifiques de terrain.
Votre réserve d’hélium peut être considérablement améliorée par la contribution des scientifiques de terrain.

Les quatre entreprises sont représentées sur le plateau principal, qui contient également les pistes d’investissement, attribuées de manière aléatoire lors de la mise en place. Il affiche une carte de la Lune (ou une ceinture d’astéroïdes au verso), indiquant les zones où les entreprises peuvent développer leurs sphères d’influence. Il y a également un affichage du plan de recherche, des espaces pour les actions bonus et majoritaires, et un marché de cartes qui est réapprovisionné après chaque tour.

Il existe deux voies différents pour le plateau de chaque joueur : l’un mène à une augmentation de l’hélium, l’autre à une augmentation de la recherche. En plus de ces deux voies, il y a un total de cinq emplacements d’action où les cartes peuvent être placées pendant la phase de programmation. Cependant, seuls trois de ces emplacements peuvent être utilisés au début d’une partie. Alors que le haut du plateau est réservé au repos, c’est en bas du plateau que se déroule toute l’action.

Décrocher la lune

La plupart des actions dans Skymines se déroulent pendant la phase d’actions. En suivant l’ordre de leurs tours, les joueureuses décident quelles cartes ou quels jetons de bonus utiliser pour effectuer une de leurs actions. Les cartes peuvent être utilisées pour améliorer la position d’une entreprise sur le plateau, acheter de nouvelles cartes sur le marché, investir dans d’autres entreprises, développer les pistes d’hélium ou de recherche, et augmenter la représentation de l’entreprise sur le plateau.

Les joueureuses peuvent déclencher la plupart de leurs avantages normaux en utilisant des jetons bonus, dont le nombre est limité. Ils peuvent également être utilisés sur certaines pistes d’investissement, à condition qu’un emplacement bonus ait été débloqué pour cette piste en investissant une somme d’argent significative dans une entreprise.

Les recherches et le domaine de spécialisation d’un scientifique sont représentés par des catégories distinctes sur son jeu de cartes. Ces deux catégories correspondent à leurs pistes respectives sur le plateau de jeu. Plus vite ces pistes progressent, plus vite vous débloquerez de nouveaux emplacements d’action pour programmer d’autres cartes, et plus vite vous recevrez de nouveaux prix grâce aux points de victoire toujours plus nombreux que vous gagnez. Vous avez peut-être la mécanique d’engine-building.

Faire grise mine

Une fois que tout le monde a passé, soit en utilisant toutes ses cartes ou ses marqueurs, les cartes restantes dans la main de chaque personne sont mélangées et une carte de chaque colonne est remise en main. On déplace ensuite ses cartes jouées de la zone d’action vers la zone de repos située juste au-dessus.

Chaque personne peut choisir la colonne dans laquelle elle place ses cartes d’action, mais elle ne peut placer qu’une seule carte à la fois dans chaque colonne.

Le score final a été mentionné au début, mais il est important de souligner que les joueureuses ont la possibilité d’accumuler le plus de points dans l’une des trois catégories suivantes : investissement fixe, hélium ou recherche.

La valeur des actions dans une entreprise particulière est multipliée par le nombre de pièces affichées sur sa station pour déterminer son score pour cette entreprise. Les investissements réalisés par les autres dans la société sont également pris en compte.

T’as bonne mine

Skymines maintient les normes élevées établies par son prédécesseur, Mombasa, en termes de qualité de jeu.
Le système de base de programmation des cartes conserve le même sentiment de nouveauté que lors de sa première mouture en 2015. L’intérêt est conservé par une combinaison de la programmation du jeu et d’un système de bonus de majorité qui récompense celles et ceux qui ont le plus de ressources d’un type particulier.

Mais attention à vous abstenir d’utiliser votre énergie jusqu’à ce que l’un ou l’une de vos voisines ait utilisé la sienne en premier, tout en la réservant pour le bonus majoritaire d’énergie, qui vous donne une chance d’investir davantage dans une entreprise.

En plus de la programmation originale, le système de cartes introduit un casse-tête pour décider où placer les cartes dans l’aire de repos à la fin de chaque tour.

Comme vous ne pouvez reprendre qu’une colonne à la fois, cette phase, cet aspect se transforme en moment crucial, cruel, et stratégique, qui peut déterminer une grande partie de ce qui se passe dans les tours suivants, notamment les ressources disponibles pour le plus grand nombre de possibilités de recherche.

Comme il n’y a que sept tours dans le jeu, et comme il n’y a qu’un temps limité pour débloquer et utiliser de nouveaux espaces de cartes, le positionnement des aires de repos peut être tout aussi important que la programmation effectuée au début de chaque tour.

Dans Skymines, les cartes sont essentielles. Elles vous permettent d’être à l’affût des majorités, vous offrent une certaine flexibilité en matière d’investissements dans les entreprises et vous proposent même des méthodes pour améliorer votre jeu pour les tours de jeu suivants.

Mais, attention ! Comme le marché ne se réapprovisionne qu’à la fin d’un tour, vous devez faire preuve de prudence dans vos dépenses de ressources afin d’acquérir de nouvelles cartes.

Skymines, à combien y jouer ?

J’ai joué avec mon mari. J’y ai joué avec mes copines. Selon moi, la configuration idéale pour jouer à Skymines est de trois ou quatre. À deux on introduit une « IA » toute… moisie. Comme Gus mon rédac-chef, qui le soulève souvent dans ses chroniques, je déteste également les « automa » ou « bots » ou « joueur neutre ».

Toutes ces mécaniques sont… artificielles et superflues, elles n’apportent rien au jeu. Donc pour moi, Skymines à 1-2, c’est neuneu et c’est no-no.

Miner la lune, est-ce réalisable ? Envisageable ? Désirable ? Viable ?

Illustration non tirée du jeu

Pour faire courte, non, l’exploitation minière de l’espace ne sauvera pas la Terre.

Depuis l’invasion de l’Ukraine il y a tout bientôt une année et les soucis d’approvisionnement en énergie, mais pas seulement, nous savons désormais que le monde doit passer à des sources d’énergie plus propres pour éviter les pires conséquences de la catastrophe climatique. Oui, mais. La technologie nécessaire à cette transition est très gourmande en minéraux. D’où la question, sous-jacente, que soulève Skymines. D’où viendront toutes ces ressources ?

Dans l’industrie spatiale, nombreux sont ceux qui regardent au-delà de la Terre. Les astéroïdes et la Lune devraient être riches en éléments du groupe du platine et autres ressources clés nécessaires à la transition énergétique. Cela a suscité un intérêt pour l’exploitation commerciale de l’espace.

La société californienne AstroForge est la dernière en date à se lancer dans l’exploitation minière de l’espace. Il y a quelques jours, la société a annoncé qu’elle prévoyait de lancer deux missions cette année : l’une pour purifier le platine d’un échantillon semblable à un astéroïde, l’autre pour localiser et exploiter un astéroïde proche de la Terre.

Comme dans Skymines, les partisans de l’exploitation minière de l’espace soulignent souvent les avantages potentiels pour la Terre et ses habitants. Mais dans quelle mesure ces avantages sont-ils certains ?

Un pari à haut risque

Les partisans de l’exploitation minière de l’espace affirment souvent qu’il existe une abondance de minéraux spatiaux qui pourraient être exploités pour des milliards de dollars.

Cependant, la connaissance des ressources spatiales est limitée, variable et… peu pertinentes.

Ces affirmations reposent en grande partie sur les technologies de télédétection et la modélisation, qui impliquent des interprétations, des estimations, des hypothèses et des probabilités. La viabilité économique des gisements minéraux découverts au-delà de la Terre n’a pas encore été déterminée. Ce n’est pas parce que Skymines le dit que c’est forcément juste.

Cette question fait l’objet de recherches. Par exemple, la mission spatiale OSIRIS-REx a prélevé un minuscule échantillon de l’astéroïde géocroiseur Bennu, qui sera ramené sur Terre pour analyse dans le courant de l’année.

Toutefois, investir dans l’exploitation des ressources spatiales est désormais plus risqué que l’exploitation minière sur Terre.

Les météorites et autres roches spatiales contiennent des minéraux métalliques. Toutefois, les recherches montrent qu’à l’exception des éléments du groupe du platine, la plupart des concentrations de métaux dans les matériaux spatiaux peuvent être plus faibles que sur Terre.

L’exploitation minière sur Terre nécessite souvent l’utilisation de machines lourdes pour extraire, manipuler et traiter d’énormes quantités de roches. Une fois que l’élément d’intérêt, comme le cuivre, a été extrait, la plupart des roches sont jetées comme déchets.

Dans l’espace, l’élimination des déchets sera beaucoup plus difficile. Toutes les implications en matière d’environnement et de sécurité ne sont pas encore connues. Cependant, nous savons déjà que des débris spatiaux tombent régulièrement sur la Terre. Et ça, c’est pas glop !

L’année dernière, par exemple, il s’est avéré que des débris spatiaux trouvés dans les Snowy Mountains de Nouvelle-Galles du Sud en Australie provenaient de la société SpaceX d’Elon Musk. Bravo Elon…

L’exploitation minière sur Terre a souvent un impact négatif sur l’environnement naturel, affectant la terre, l’eau, la qualité de l’air et les écosystèmes.

Les questions de sécurité environnementale et humaine doivent être abordées dans les zones où l’exploitation minière est strictement contrôlée. Cependant, il existe plusieurs exemples de réglementation minière faible dans le monde.

Il n’existe actuellement aucune réglementation ni aucune mesure de gestion des déchets appropriée pour l’exploitation minière hors de la Terre. L’exploitation minière dans l’espace pourrait apprendre beaucoup des meilleures pratiques et des erreurs de l’exploitation minière sur Terre.

Une solution ?

L’espace fournira-t-il vraiment tous les minéraux dont la Terre aura besoin dans les siècles à venir ?

L’engouement actuel pour l’exploitation minière extraterrestre concerne les métaux du groupe du platine, notamment le palladium, le rhodium et le platine lui-même. Les astéroïdes métalliques contiennent ces éléments.

Le platine est utilisé dans les convertisseurs catalytiques qui réduisent les polluants dans les gaz d’échappement des voitures, ainsi que dans les équipements médicaux et les appareils technologiques.

Mais la transition vers une économie à faible émission de carbone nécessitera un éventail beaucoup plus large de matières premières. Les batteries et les aimants, par exemple, nécessitent d’énormes quantités de lithium, de cobalt et de métaux des terres rares.

Des chercheurs affirment avoir découvert deux astéroïdes géocroiseurs riches en métaux, qui pourraient être riches en fer, nickel et cobalt. Youpie ! On y va ? On va se faire une partie de Skymines grandeur nature ?

Moyen. La technologie permettant d’extraire ces minéraux est encore loin d’être au point (si elle l’est un jour). Mais la transition vers les énergies renouvelables doit se faire rapidement – et pour l’instant, les minéraux seront extraits sur Terre.

La course à l’espace actuelle est le reflet d’une attitude… coloniale dans laquelle les puissants se précipitent pour revendiquer un nouveau territoire, la richesse revenant à celui qui y arrive le premier.

Il s’agit d’un récit « techno-futuriste » dans lequel le progrès est défini par la production d’argent, qui dépend de la croissance technologique. Un récit techno-futuriste est un type de fiction qui se concentre sur l’utilisation de la technologie et des sciences pour imaginer un futur différent. Les histoires techno-futuristes peuvent inclure des aspects tels que la robotique, l’intelligence artificielle, la réalité virtuelle, la vie extraterrestre, l’exploration spatiale ou la colonisation de l’espace. La colonisation de l’espace, pour en extraire des minerais. Coucou Skymines.

Si cette manne en mode ruée vers l’or devient réaliste, seul un infime pourcentage de la population en profitera. L’écart de richesse entre les riches et le reste de la société ne ferait que se creuser.

Don’t look up. Look down !*

*Regardez vers le bas, pas vers le haut. En référence au film Don’t Look Up de 2021

On est encore loin d’une industrie minière spatiale viable et responsable. Cependant, la catastrophe climatique est un problème important qui requiert une attention immédiate.

Malgré ses nombreux inconvénients, l’exploitation minière sur Terre est essentielle à la transition vers un système énergétique à faible émission de carbone.

Plutôt que d’exploiter des mines dans l’espace, l’exploitation minière terrestre devrait être réalisée de la manière la plus durable possible, avec de meilleurs résultats environnementaux et sociaux sur Terre.

Dans le film Don’t Look Up la Terre va être frappée par un astéroïde géant, mais on préfère en extraire les minéraux… On se souvient de cette scène :

Extraire de la poussière lunaire pour lutter contre la catastrophe climatique

Oui, vous avez bien lu.

Des chercheurs viennent tout juste de proposer hier mardi 8 février un projet, faisable selon eux, pour lutter contre la catastrophe climatique. L’idée (loufoque, qu’on dirait sortie d’un James Bond) ? Lancer des panaches de poussière lunaire dans l’espace à l’aide d’un canon afin de détourner les rayons du soleil de la Terre.

Cette idée apparemment absurde, présentée dans l’étude, consisterait à extraire, miner, de la Lune, oui, comme dans Skymines, des millions de tonnes de poussière, puis à les « éjecter par balistique » vers un point de l’espace situé à environ 1 million de kilomètres de la Terre, où les grains flottants obscurciraient partiellement la lumière solaire entrante.

C’est ce qu’on appelle la géo-ingénierie. La géo-ingénierie est une forme de technologie qui part du principe qu’on peut procéder à des manipulation de l’environnement pour influencer le climat et les écosystèmes. La géo-ingénierie implique des projets à grande échelle pour modifier le climat et contrer la catastrophe climatique. Les principales méthodes de géo-ingénierie sont la géo-capture, la géo-ingénierie algale et la modification des nuages. Ou, comme ici, la modification de l’espace grâce à un plan foireux de l’extraction minière de la Lune.

Trois méthodes potentielles de géo-ingénierie solaire

A : Injection d’aérosols stratosphériques. Les avions libèrent de minuscules particules d’aérosol qui renvoient la lumière dans l’espace.

B : Amincissement des cirrus. La méthode la moins bien comprise, l’ensemencement de cirrus fins dans la haute troposphère avec des noyaux de glace pourrait réduire leur durée de vie et augmenter le refroidissement.

C : Éclaircissement des nuages marins. Les bateaux libèrent des particules aérosols qui augmentent la réflectivité des nuages bas.

Depuis hier, il faudrait désormais rajouter un petit D, un nouveau projet, l’extraction minière de la Lune pour balancer de la poussière autour de la Terre…


« Un élément particulièrement intéressant de notre analyse a été la prise de conscience que les grains de poussière lunaire naturelle ont exactement la bonne taille et la bonne composition pour disperser efficacement la lumière du soleil loin de la Terre », a déclaré Ben Bromley, auteur principal de l’étude et astrophysicien théorique à l’université de l’Utah.

« Comme le lancement de ces grains depuis la surface lunaire nécessite beaucoup moins d’énergie que depuis la Terre, l’idée du « moonshot »(=lancer depuis la Lune) nous a immédiatement séduits. »

Bromley et ses collègues ont examiné un certain nombre de matériaux, tels que le charbon et le sel marin, qui pourraient obscurcir le soleil jusqu’à 2% s’ils étaient lancés dans l’espace. L’équipe a finalement opté pour la poussière lunaire, malgré le fait qu’il faudrait en extraire des… millions de tonnes, rien que ça, les filtrer, les incorporer dans une arme balistique telle qu’un canon électromagnétique et les lancer dans l’espace chaque année pour maintenir ce bouclier solaire. Rien que ça.

Amener cet équipement d’extraction et de projectile sur la Lune serait un « projet important », a admis le chercheur, et pourrait également nécessiter le positionnement d’une nouvelle station spatiale dans une zone appelée point de Lagrange L1, située entre la Terre et le Soleil, afin de « rediriger les paquets de poussière vers des orbites pouvant fournir de l’ombre aussi longtemps que possible ».

Une telle méthode agirait comme un « variateur d’intensité finement réglé qui laisserait notre planète intacte », selon le chercheur, ce qui serait préférable aux précédents concepts de géo-ingénierie solaire qui ont suscité des inquiétudes quant à l’impact environnemental de la pulvérisation de particules réfléchissantes dans l’atmosphère terrestre. Parce que, selon lui, ce projet ne va soulever aucune, aucune inquiétude.

Toutefois, pour atténuer la catastrophe climatique de la planète, la poussière lunaire devrait être projetée en permanence dans l’espace, sous peine de subir un « choc de terminaison », au cours duquel le refroidissement temporaire est soudainement interrompu et la planète se réchauffe rapidement, comme dans le livre de Neal Stephenson paru en 2021. Mais dans son étude, le chercheur fait tout de même preuve de… bon sens, et insiste sur le fait que le concept de science-fiction de la recherche ne doit pas se substituer à la tâche essentielle qui consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

« Rien ne doit nous détourner de la réduction des émissions de gaz à effet de serre sur Terre », a-t-il déclaré. « Notre méthode est peut-être une chimère, mais nous devrions explorer toutes les options au cas où nous aurions besoin de temps supplémentaire pour faire le travail ici, chez nous. »

Une réponse controversée et quelque peu marginale à la catastrophe climatique consiste à… bricoler le climat de la planète, notamment en déployant des efforts pour réfléchir la lumière du soleil. Mais malgré les avertissements répétés selon lesquels les gouvernements ne réduisent pas les émissions assez rapidement pour éviter la catastrophe, cette solution a gagné en popularité, le gouvernement américain ayant lancé une initiative de recherche sur cette idée l’année dernière.

Soyons lucides deux secondes. Miner la Lune pour nous protéger contre la catastrophe climatique est une conjecture amusante qui a peu de chances d’être mise en œuvre, notamment en raison de son coût élevé et du manque total de contrôle. Tout ça semble être une distraction inutile et peut-être nuisible à la nécessité urgente d’éliminer progressivement l’utilisation des combustibles fossiles. On va investir beaucoup, beaucoup de milliards de dollars, tout ça pour continuer à polluer et à modifier notre climat.

Comme dans Skymines, l’exploitation minière de la Lune ou des astéroïdes proches de la Terre pour cacher délibérément certaines parties de la lumière du soleil n’est pas une solution au problème climatique actuel et croissant !

Skymines VS Mombasa, fight !

Même si Skymines est une réédition, une amélioration par rapport à son prédécesseur, le jeu ne parvient toujours pas à offrir le niveau d’excitation que l’on pourrait attendre d’un remake. Le système de cartes mérite tellement plus qu’une exploitation supplémentaire des ressources dans une thématique simplement placée sur un fond spatial.

Je dois reconnaître qu’un certain soin a été apporté à la rethématisation, plus… lisse, de la colonisation (et le saccage et pillage) de l’Afrique pour un l’espace. Mais finalement, le thème fait beaucoup plus copié-collé et distant que l’original jugé problématique.

Skymines, un jeu woke ?

Skymines a donc décidé de reprendre Mombasa pour le rendre plus… acceptable. Plus… « woke  » ?

« Woke » est un terme qui a récemment été utilisé de différentes manières par différentes personnes. Le terme a été utilisé comme… insulte contre les valeurs progressistes par certains conservateurs, mais il a été initialement inventé pour décrire une sensibilité accrue à la justice sociale et politique. Le terme « woke » comme un terme très intéressant en ce moment, mais difficile à définir.

En général, « woke » est un terme controversé et sa signification peut varier selon le contexte et l’utilisateur.

Qu’on soit partisan ou détracteur, le wokisme est une nouvelle forme de pensée qui, il faut le dire, a le vent en poupe ces derniers temps. Il s’agit d’un mouvement qui vise à encourager les gens à prendre des mesures pour améliorer leurs conditions de vie et celles des autres. Le wokisme est une philosophie qui repose sur l’idée que nous sommes tous responsables de l’état de notre monde et que nous devons tous nous engager à le rendre meilleur.

Le wokisme a été popularisé par le mouvement Black Lives Matter, qui a mis l’accent sur le racisme systémique et a mené à d’importantes manifestations dans le monde entier. Les personnes qui s’identifient au wokisme s’engagent à travailler pour la justice sociale, la diversité et l’inclusion, et à promouvoir les droits de l’homme.

Les partisans du wokisme soutiennent les groupes marginalisés et font pression pour des changements politiques et économiques. La philosophie du wokisme est fondée sur l’idée que nous devons faire preuve d’une plus grande compassion et d’une plus grande volonté de changer le monde.

Le wokisme est un mouvement qui s’est répandu dans le monde entier. Il est de plus en plus populaire chez les jeunes et les jeunes adultes qui cherchent à faire une différence dans le monde. Le wokisme est une forme de pensée qui peut servir de source d’inspiration et d’espoir pour ceux qui cherchent à créer un monde meilleur et plus juste.

Mais le « wokisme », mouvement progressiste, n’a pas que de fervents supporters. Il est souvent critiqué pour plusieurs raisons, notamment :

  1. Manque de tolérance : certains considèrent que le « wokisme » impose une pensée unique et ne tolère pas les opinions différentes.
  2. Division sociale : d’autres affirment que le « wokisme » peut diviser la société en groupes antagonistes, basés sur les origines ethniques, le genre et l’orientation politique.
  3. Cancel culture : le « wokisme » est souvent associé à la « cancel culture », la culture de l’annulation, où les personnes, les œuvres ou les événements historiques sont critiquées et ostracisées pour des opinions ou des comportements considérés comme politiquement incorrects.
  4. Forme de discrimination : enfin, certains considèrent que le « wokisme » peut être une forme de discrimination envers les personnes considérées comme peu politiquement correctes.

Cependant, il est important de noter que ces critiques ne s’appliquent pas nécessairement à toutes les personnes qui s’identifient comme étant « woke ». Comme pour tout mouvement social, il existe une grande diversité de perspectives et d’opinions au sein du « wokisme ».

Tout ça pour dire qu’on soit partisan ou détracteur de la cause, du mouvement « woke », Skymines a préféré faire fi de son thème pour ces, pour ses aspects historiques en lien avec l’histoire de la colonisation.

Le mouvement « woke » considère généralement la colonisation comme une injustice historique et un système oppressif qui a eu des conséquences durables sur les peuples colonisés et leur culture. Les partisans du « wokisme » soulignent souvent les effets négatifs de la colonisation sur les droits de l’homme, la perte de territoire et de culture, et le développement économique des pays colonisés. Ils soutiennent également que les impacts de la colonisation sont encore ressentis aujourd’hui dans les relations entre les pays colonisateurs et les pays colonisés.

Le « wokisme » appelle à une reconnaissance de l’histoire et des conséquences de la colonisation, ainsi qu’à des efforts pour réparer les injustices passées et présentes. Cela peut inclure des initiatives pour restaurer les terres et les ressources aux peuples autochtones, soutenir les initiatives économiques des communautés marginalisées et renforcer les droits de l’homme.

Et pendant ce temps, à Genève

Comme exemple, pas plus tard qu’il y a quelques jours, le nom d’un bâtiment universitaire chez nous à Genève a changé de nom. Le bâtiment portait celui de Carl Vogt, de la rue idoine.

Carl Vogt, naturaliste du XIXe siècle, a mené parallèlement à ses activités scientifiques, une carrière politique durant laquelle il a soutenu des positions progressistes. Il a notamment joué un rôle déterminant pour l’Université de Genève, dans la transformation de l’ancienne Académie de Genève en une université moderne.

Sa volonté de classer les êtres vivants l’a toutefois conduit à soutenir des thèses détestables sur la hiérarchie des « races » (mais peut-on encore employer ce terme aujourd’hui ? Le terme « race » est encore utilisé aujourd’hui, mais il est souvent critiqué en raison de son utilisation historique pour justifier la discrimination et la hiérarchisation des groupes sociaux. Les scientifiques ont démontré que la notion de « race » en tant que catégorie biologique distincte est fausse, car il n’existe pas de fondement génétique soutenant l’existence de races distinctes) et l’infériorité du sexe féminin, qui sont à l’évidence incompatibles avec les valeurs de l’université.

Je vous joins ici le lien vers l’article de la Tribune de Genève. Le microscopique article a généré plus de 180 commentaires ! Une preuve, comme s’il en fallait une, que le sujet est explosif.

Jeux de société et colonialisme

Soyons lucides. Mombasa n’est de loin pas le seul jeu qui touche au thème du colonialisme. Le colonialisme est un thème maintes fois abordé dans les jeux de société.

Le jeu de société Puerto Rico d’origine, et non pas sa version récente plus politiquement correcte, commence lorsque chaque joueureuse reçoit un plateau représentant l’intérieur luxuriant de l’île éponyme du jeu. Les joueureuses sont représentés comme des magnats européens qui ont traversé l’Atlantique à l’époque des découvertes. « Christophe Colomb a découvert l’île la plus orientale des Grandes Antilles en 1493 », peut-on lire au dos de la boîte de jeu. « Environ 50 ans plus tard, Porto Rico a vraiment commencé à prospérer. » Pour gagner, il faut « atteindre la plus grande prospérité et la plus haute estime ».

En réalité, cela signifie que la mécanique de Porto Rico tourne autour de l’agriculture, de l’exploitation et du… pillage. Un peu comme Mombasa, à l’origine de Skymines. À chaque tour, une personne endosse un rôle différent – « colon », « bâtisseur », « marchand », « artisan », « capitaine », etc. – et tente de transformer progressivement son esnclave tropicale en une ville impériale du XVIe siècle bien organisée. On peut supprimer la nature sauvage et la remplacer par des champs de tabac ou de maïs, ou construire des quais de pêche et des ports sur les côtes accidentées afin de pouvoir expédier les produits à travers l’océan. Tout cela n’est possible qu’avec l’aide d’une ressource appelée… « colons » – représentée par de petits disques… bruns dans la version originale du jeu, qui arrivent par bateau et sont affectés aux plantations des joueureuses.

L’Empire espagnol a commencé à réduire en esclavage le peuple indigène Taïno à Porto Rico, l’endroit réel, immédiatement après que Christophe Colomb ait débarqué sur l’île lors de sa deuxième expédition en 1493. Les premiers esclaves africains sont arrivés en 1517. En 1560, il y avait environ 15 000 captifs, et les propriétaires de plantations ont commencé à marquer le front des esclaves au fer chaud pour identifier les éventuelles fuites. L’idée maîtresse du jeu, si tant est qu’il en ait une, est que cette île était désolée et sans vie jusqu’à ce que l’Occident arrive, apportant avec lui un âge d’or.

Néanmoins, Puerto Rico est considéré comme l’un des meilleurs jeux de société. Le jeu de Rio Grande a été classé numéro 1 par BGG pendant plus de cinq ans après sa sortie initiale en 2002, les critiques louant ses mécaniques ingénieuses et la profondeur de sa stratégie. Je viens de vérifier, il est aujourd’hui classé 39e. Une belle perf, 21 ans après sa sortie !

Puerto Rico fait partie d’une nouvelle gamme de jeux de société qui ont été salués par la critique tout en invitant les joueureuses à rejouer certains des événements les plus… épineux de l’histoire de l’humanité. Macao, sorti en 2009, se déroule dans la Macao portugaise, où les colons empiètent lentement sur les pâtés de maisons ; Vasco da Gama, sorti la même année, blanchit les nombreux crimes meurtriers de l’explorateur ; et Mombasa, donc, sorti en 2015, place les joueureuses à la tête d’un mandataire de la British East Africa Company. Dans Goa, on incarne des commerçants portugais à l’apogée du commerce des épices en Inde. Archipelago, sorti en 2012, met les joueurs et les joueuses au défi de conquérir un hameau indigène inconnu aussi vite que possible ; les joueureuses « doivent faire attention aux habitants » (indigènes), « Si vous les rendez trop misérables, ou si trop d’entre eux sont vides, ils pourraient se rebeller et déclarer leur indépendance. Alors tout le monde perd ! »

C’est la Cata(n)

Les jeux de société existent depuis longtemps, mais au milieu des années 2000, lorsque Catan – anciennement connu sous le nom de « Colons de Catan », vous apprécierez le changement (pas très subtil) de titre, et utilisant également un mécanisme de colonisation, cette fois dans un cadre fictif – a commencé à infuser et s’immiscer dans la « culture ludique ».

Depuis quelques années, et ce Skymines en est l’épiphénomène, les joueurs et les joueuses ont commencé à poser des questions plus pointues sur leur loisir. Des questions qui vont au-delà de la beauté des illustrations, de la subtilité des mécaniques ou de la qualité des composants. Elles s’intéressent à présent à la nature des jeux en tant qu’objets politiques, et à la question de savoir s’ils doivent être soumis aux mêmes normes que nos autres formes de divertissement (ciné, séries, livres, bédé).

Mais pourquoi sortir autant de jeux qui placent la colonisation au cœur de leur thème ? Il faut reconnaître que ce qui plaît, dans un jeu (et dans la vie aussi), c’est de pouvoir progresser, se développer. Personne n’aime faire du surplace dans un jeu (ou dans la vie). La colonisation rime, malheureusement, avec expansion. D’autant que l’imagerie des colons est souvent associé à des gens (des hommes, surtout) persévérants et téméraires. Et aujourd’hui, plusieurs siècles après les Grandes colonisations, on a la fâcheuse tendance à romancer cette période et à en oublier les aspects terribles et atroces.

Or, il faut le relever, « l’éloge » du colonialisme dans ces jeux semble superficiel, né de la commodité d’un thème à plaquer et de l’ignorance plutôt que d’une idéologie sincère. Mombasa et d’autres n’ont pas fait l’apologie de la colonisation. Faut-il alors rejoindre l’idéologie woke et changer tous les thèmes du jeu ? Comme ce Skymines, ou la toute nouvelle version plus lisse de Puerto Rico, qui se déroule dans la période post-indépendance et ne comporte aucun aspect colonial.

Skymines, verdict

Vous possédez déjà et appréciez Mombasa ? Je vous conseille de le ranger / revendre et de passer à Skymines à la place.
Il n’est pas sans écueils, mais il offre de nombreuses incitations et améliorations qui en font une expérience bien plus riche que son « petit frère ». Skymines offre un système solide et agréable, surtout à trois et quatre.

Mais. Skymines n’est pas un jeu que je recommanderais. Le jeu tourne bien, certes, mais ce n’est pas, selon moi, le meilleur titre du talentueux auteur autrichien. Maracaibo, également chez Super Meeple, ou CloudAge (dont ma collègue Andariel vous parlait à propos des jeux en mode Cli-Fi), sont bien plus passionnants.


J’ai apprécié Mombasa à sa sortie il y a huit ans. J’y ai joué plusieurs fois. Mais aujourd’hui, ni lui ni Skymines me seraient des jeux que je recommanderais. Les deux titres sont certes fluides et stratégiques. On y joue, avec plaisir. Mais d’autres jeux sur le marché sont aujourd’hui bien meilleurs.

Bien que plus lisse, passe-partout et bienveillant, le thème de cette mouture est trop ténu et abscons, et certaines mécaniques (comme celle de la recherche) ne m’ont pas convaincue. Rajoutez à cela une règle de jeu bien trop longue et touffue, et vous obtenez un jeu sympathique, mais, à mon goût, pas indispensable. Il faut tout simplement arrêter de proclamer que tous les jeux qui sortent sont incroyables. Certains sont décevants. D’autres sont bien, sans plus. Le cas de Skymines.

Sympathique.

Note : 3 sur 5.

  • Création : Viktor Kobilke, Alexander Pfister
  • Illustrations : Javier González Cava
  • Édition : Super Meeple
  • Nombre de joueurs et joueuses : 1 à 4 (tourne mieux à 3-4)
  • Âge conseillé : dès 14 ans (bonne estimation)
  • Durée : 90 à 120 minutes
  • Thème : Science-fiction
  • Mécaniques principales : Gestion, programmation, engine-building. Pour en savoir plus sur les différentes mécaniques de jeux, c’est ici.

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Article écrit par Amélie. Passionnée de jeux de société. A commencé à jouer à des jeux de société à l’âge de 1 année, environ, et n’a jamais cessé depuis. Kiffe les jeux de plateau, coopératifs, narratifs et d’autres qui finissent aussi en « tif ». Adore partager sa passion et aider les autres à découvrir les top et éviter les flop.

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One Comment

  • Patrik Carpentier

    Honnêtement, quand je joue, je ne me pose pas de questions métaphysiques, car je place une frontière claire et nette entre réel et ludisme. Incarner une poule qui mange des brochettes de vers dans Pickomino ne me gène pas, et n’appelle pas en moi le remord d’une honteuse exploitation de nos amis sans bras ni jambes 😉
    Merci pour vos divers articles qui décrivent bien les jeux et qui nous aident dans nos choix d’achat.

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