Critiques de jeux,  Jeux de plateau

Hamlet. Construire ou ne pas construire un village

Hamlet est un jeu de construction de village dans lequel il est question de transformer collectivement son hameau en une petite ville animée.


Hamlet

Mettre l’église au milieu du village, pour le transformer en ville. Tel est le pitch de Hamlet, hameau, en anglais, jeu de placement d’ouvriers et de tuiles, qui vont fournir les ressources nécessaires à l’agrandissement du village et à la construction de ladite église.

Dans Hamlet, chaque joueur ou joueuse va recevoir un ouvrier et un âne, placés sur le plateau, qui est, au début du jeu, constitué de la tuile église, des tuiles carrière, bûcheron et ferme, qui vont fournir les ressources basiques, d’une tuile marché et d’une tuile mairie.

À son tour, le joueur ou la joueuse va pouvoir :

  • Déplacer son ou ses ânes d’une tuile
  • Placer son ou ses ouvriers sur des tuiles
  • Effectuer autant d’actions qu’il ou elle a d’ouvriers, en fonction de leur emplacement :
    • Sur une tuile ressource basique, remplir la réserve à partir de la pioche et toucher deux pièces
    • Sur la tuile marché, vendre des ressources pour toucher de l’argent et des points de victoire
    • Sur la tuile mairie, acheter un âne ou un ouvrier supplémentaire, ou acheter une des 4 tuiles disponibles
    • Sur n’importe quelle tuile, construire une autre tuile (achetée lors d’une action précédente), à la condition de pouvoir amener les ressources nécessaires sur la tuile où est l’ouvrier
    • Construire un pont entre deux tuiles non reliées par un chemin, aux mêmes conditions que la construction d’une tuile
    • Sur une tuile ressource avancée, créé une ressource avancée, aux mêmes conditions que la construction d’une tuile
    • Sur la tuile église, construire un bout de l’église, aux mêmes conditions que la construction d’une tuile

Pour pouvoir amener une ressource sur une tuile, il faut qu’un chemin existe entre ces tuiles (dessiné ou via des ponts, quelle que soit leur couleur), et que le joueur ait des ânes sur toutes les tuiles de ce chemin (à l’exception de la première et la dernière, qui sont gratuites).

Chaque action va rapporter des points de victoire et/ou de l’argent, qui permettra d’acheter des tuiles, des ouvriers ou des ânes. Les ressources sont communes, y compris les ressources avancées. Une ressource créée par un ou une joueuse pourra être utilisée par son ou sa voisine. Le gain se fait à la création pour les ressources basiques, et lors de l’utilisation pour les ressources avancées. Le joueur bleu peut utiliser une ressource lait créée par la joueuse jaune, elle sera alors payée à partir de la banque.

Une fois que l’église est totalement construite, le tour se termine et la partie est finie. On compte alors les points, en fonction des tuiles posées par chacun et chacune, et celui ou celle avec le plus grand total est déclaré gagnant.

Les joies de construire des villes (et des villages, comme dans Hamlet)

J’ai effectué une petite recherche sur la base de données de BGG. On kiffe le médiéval. Et on kiffe construire des trucs, des bidules, des villes et villages médiévaux. Mais qu’est-ce qui nous fait tant kiffer dans ce thème ?

Construire, c’est fun

Construire des choses, que cela soit un village médiéval comme dans Hamlet, ou une maison, en vrai, par exemple est un excellent moyen de s’exprimer et de faire preuve de créativité. Cela peut également être une expérience extrêmement satisfaisante de créer quelque chose avec ses propres mains. Construir peut également nous donner un sentiment d’accomplissement.

Nous pouvons non seulement voir le produit de notre dur labeur, mais nous avons également appris quelque chose de nouveau dans le processus. Construire des trucs, des bidules peut nous apprendre une variété de compétences, de la résolution de problèmes à la menuiserie aux travaux de construction de base (si on construit un vrai truc. Et pas « juste » pousser du cube ou poser des tuiles, comme c’est le cas ici avec Hamlet).

On peut également apprendre des leçons précieuses sur la patience, le souci du détail et le travail manuel. Mais surtout, à partir de rien, on voit un truc se développer, grandir, prendre forme. Remplacer « truc » par ce que vous voulez. Village médiéval, par exemple. C’est peut-être ce qui explique l’engouement des enfants pour les LEGO.

Engageant et stimulant

Les jeux de société de construction de ville et de village nous obligent à réfléchir de manière stratégique. Ils nous mettent au défi de construire une ville à partir de rien, ou de pas grand-chose et de gérer les ressources à disposition. Un thème, une activité qui demande beaucoup de réflexion et peut être très gratifiant quand on se débrouille pas trop mal.

Créatif et éducatif

Les jeux de société de construction de ville sont également parfaits pour stimuler la créativité et l’apprentissage. En construisant sa ville, on peut explorer différentes stratégies et trouver des solutions uniques aux défis rencontrés.

En outre, on apprendra beaucoup de choses au cours de ce processus. Les jeux de société de construction de ville nous enseignent les bases de l’économie, de la géographie et bien plus encore. De quoi élargir notre base de connaissances et nous donner une nouvelle perspective sur le fonctionnement réel des villes.

L’évasion parfaite

Enfin, les jeux de société de construction de villes nous offrent une échappatoire parfaite au quotidien. L’espace d’un instant, d’une partie, on oublier nos responsabilités pendant quelques heures et nous concentrer sur la construction d’une ville ou de ce satané village dans Halmet à partir de rien. Enfin si, du matériel de jeu. C’est un excellent moyen de se détendre et de s’amuser. Quoique, dans le cas de Hamlet, c’est discutable. J’en parlerai plus bas.

Un thème intemporel et riche

Et pourquoi des villages médiévaux, précisément ? Les villages médiévaux sont un thème intemporel qui reflète l’imagination et l’aspiration des gens à une époque et à une culture bien définies.

Les possibilités offertes par les jeux de société pour explorer ce thème sont nombreuses. Que ce soit à travers des jeux de plateau, comme ici avec Hamlet, des jeux de cartes ou des jeux de rôle, les joueureuses peuvent découvrir les différents aspects des villes et villages médiévaux ainsi que leurs sociétés.

Les éléments qui font la richesse des jeux de société médiévaux sont nombreux. Les joueurs et joueuses peuvent se familiariser avec la culture et les coutumes médiévales, tout en découvrant comment les différents groupes sociaux interagissaient entre eux.

Hamlet, le matériel

Hamlet est un jeu qui vient avec une grosse boîte, dans laquelle on va trouver beaucoup de matériel (y compris un système de compartiments en carton à monter soi-même pour le rangement). Le tout est plutôt de bonne facture, les dessins sont agréables, les meeples, ressources et autres pions sont en bois, les tuiles et jetons en carton, et les pièces en vrai métal. Le tout dégage une impression de maîtrise de son sujet par l’éditeur, les joueurs et joueuses orientées collection seront contents.

Le livret de règles ne cache pas de mauvaise surprise, il est lisible et aéré, les explications sont claires et les dessins qui les accompagnent bien choisis. Encore une fois, on sent que l’éditeur est en terrain connu.

Mais

En revanche, le matériel de Hamlet cache quelques écueils.

Le plateau peut rapidement devenir difficilement lisible au cœur du village, par exemple lorsqu’une tuile est recouverte de 4 ânes, deux ponts, trois ressources et deux meeples. Par ailleurs, la forme irrégulière des tuiles, qui est un ressort ludique intéressant, participe aussi au chaos, au point qu’il peut devenir compliqué de savoir s’il y a un chemin ou non entre deux tuiles éloignées, si les tuiles entre sont très chargées.

De plus, cette forme irrégulière peut créer une distorsion de la concurrence. Les tuiles sont censées être tirées d’un sac, pour une part de hasard. Mais un joueur ou une joueuse qui connaît le jeu pourra savoir quel type de tuile il ou elle va piocher… Et la taille des tuiles fait qu’il n’est pas possible de mélanger efficacement dans le sac.

Nous avions une version deluxe du jeu, celle destinée aux backers Kickstarter. Elle embarquait donc, comme c’est l’usage, des spécificités que l’on ne retrouvera pas dans une boîte du commerce. Parmi ces spécificités, deux se détachent :

  • Une église montable, pour remplacer les tuiles plates de la version classique. Un gadget, pas très facile à monter, qui ne tient pas correctement debout et limite la lisibilité du plateau (qui peut déjà être très chargé) lorsqu’elle est posée. À éviter !
  • Des jetons qui permettent de remplacer les tuiles dans le sac qui sert de pioche. Là, c’est plutôt une très bonne idée, qui aurait sans doute méritée d’être disponible dans la version de base.

Dernier point, et non des moindres : Il manquait un meeple et une ressource farine de couleur jaune dans la boîte. Nous avons tout de même pu jouer et tester le jeu, mais c’est quand même dommage.

Hamlet, verdict

Hamlet est un jeu de placement d’ouvriers classique, mais avec des ressources partagées, qu’elles soient basiques ou avancées. Une ressource créée lors d’un tour de jeu ne sera sans doute plus là au tour suivant, il est un peu difficile de faire beaucoup de plan à long terme, chacun et chacune pouvant utiliser n’importe quelle ressource présente sur le plateau de jeu.

Ce mécanisme va pousser les joueuses et joueurs à acheter des travailleurs supplémentaires, afin de pouvoir effecteur plusieurs actions dans un tour. Ceci permettra de profiter du système d’enrichissement pas accumulation : Plus on a d’ouvriers, plus on va s’enrichir. Mais la gestion des actions peut être complexe, afin de créer l’enchaînement le plus efficace.

Le mécanisme des ânes, qui vont être nécessaires afin de déplacer les ressources du lieu de production au lieu de consommation, va permettre d’équilibrer le jeu, en forçant les participantes et participants à ne pas trop étaler la ville. Mais comme indiqué précédemment, cette concentration va aussi pénaliser la lecture du plateau de jeu. Ce mécanisme peut aussi créer de la confusion chez certains, la règle des premier et dernier changements de tuile gratuits n’étant pas forcément très intuitive.

Tout comme les ânes, la gestion des ponts et des chemins apporte un angle intéressant, mais peut aussi créer de la complexité et ajoute des contraintes supplémentaires qui nuisent à la fluidité du jeu.

Les ressources communes apportent un peu d’interaction dans le jeu, interaction qui serait inexistante ou presque sans cela (il y a un peu d’interaction dans le choix des tuiles, mais c’est plus une course à la ressource qu’une réelle interaction). Le mécanisme de création des ressources basiques (avec paiement direct) et de paiement des ressources avancées (à l’utilisation, mais en provenance de la banque) permet aussi de gagner des points et de l’argent sans jouer, et évite que personne ne créée de ressources par peur de ne pas gagner. C’est une bonne idée, qui est bien gérée.

L’absence d’attrition permet de créer des ouvriers sans risque, puisqu’il n’est pas nécessaire de les « nourrir », ou de gérer ses propres ressources, ce qui évite de complexifier encore plus le jeu.

Le jeu se termine sur une grosse salade de points, avec un décompte rapide mais un peu rébarbatif. Le jeu va favoriser les connaisseurs, qui sauront maximiser leurs combos, par rapport aux néophytes. Il faut pouvoir réfléchir globalement, en sachant ce qui peut arriver pour prendre les bonnes décisions et poser les bonnes tuiles. On aura donc un déséquilibre entre ceux qui ont déjà joué et les autres.

Pour finir, je poserais un énorme bémol sur le temps annoncé, qui est de 25 minutes par personne. Il faudra plutôt compter 50 minutes, voire plus. Nous ne sommes pas des joueurs et des joueuses lentes (et surtout pas moi), mais nous ne sommes jamais descendus en dessous de ce temps.

Un jeu de placement d’ouvriers avec gestion de ressources en commun, qui est pénalisé par un plateau peu lisible, et un temps annoncé irréaliste. Hamlet, y jouer ou ne pas y jouer ?

Sympathique

Note : 3 sur 5.

  • Création : David Chircop
  • Illustrations : Yusuf Artun
  • Édition : Mighty Boards
  • Nombre de joueurs et joueuses : 1-4 (tourne mieux à 3)
  • Âge conseillé : dès 10 ans (bonne estimation)
  • Durée : 25 50 minutes par personne
  • Thème : Village médiéval
  • Mécaniques principales : Placement d’ouvriers, gestion de ressources, tuiles, connexion. Pour en savoir plus sur les différentes mécaniques de jeux, c’est ici.

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Article écrit par Clément. Adepte des jeux rapides, son pire ennemi est le paralyseur. Spécialiste des jeux de plis, des casse-têtes et des ours. Il a deux chats, trop de plantes et une mémoire défaillante. Devise : « Faut que ça poppe ! »

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