Critiques de jeux,  Jeux de plateau

LE JEU DU JOUR : FLOTILLA

Flotilla, de quoi ça parle ?

Flotilla est un jeu de construction de ville dans une histoire alternative. Ce qu’on appelle une uchronie, un genre que l’on retrouve aussi dans Scythe par exemple

Les joueurs et joueuses prennent le contrôle d’une faction, essayant de construire leur civilisation dans deux zones de jeu : la mer et le ciel. Pour cela, il faut récolter des ressources, gagner la faveur de divers groupes, réunir la bonne équipe de talents et compter sur un poil de chance

Le pitch :

« En 1954, avec une explosion plus de cent mille fois plus puissante que les estimations les plus folles, le test nucléaire de Castle Bravo a effacé l’atoll de Bikini et brisé la Terre jusqu’à son manteau.

Au fur et à mesure que le niveau de l’eau a augmenté, les restes de l’humanité ont fui leurs maisons et ont pris la mer. Les dirigeants mondiaux se sont réunis pour construire une énorme flottille, le dernier bastion de la civilisation de l’humanité.

Aujourd’hui, dix ans après la catastrophe, la Flottille abrite le dernier d’entre nous. »

Un thème original, du post-apo maritime, servi avec un bon équilibre entre mécaniques et immersion (c’est le cas de le dire) dans le thème

Un 3 sur 5 sur l’ITHEM

Et comment on joue ?

Flotilla est un gros jeu, un jeu complexe, un jeu qui ravira les joueurs et joueuses avides d’expérience ludiques riches et profondes. Pas facile de résumer les règles de jeux en quelques lignes. Mais en gros :

Flotilla se déroule en deux phases : Sinkside, qui représente la ville sur l’océan, et Skyside, qui abrite le village flottant nouvellement construit. Les deux emplacements ont des mécanismes de jeu similaires, avec toutefois quelques différences notables. Chaque personnage ou carte qui a été précédemment obtenue se retourne plus tard sur son autre face. Ce qui révèle ainsi de nouvelles capacités, actions, généralement améliorées

Vous commencez le jeu avec 6 cartes d’équipage. Deux membres d’équipage uniques et quatre autres tirés des quatre différentes guildes. Ces cartes représentent le cœur du jeu. Vous pouvez en acquérir de supplémentaires au cours du jeu en gagnant de l’influence auprès des différentes guildes ou en… sauvant des survivants. Chaque carte, chaque guilde, chaque membre d’équipage possède un pouvoir unique qui va avoir un effet sur le jeu

Vous commencez le jeu avec 6 cartes d’équipage. Deux membres d’équipage uniques et quatre autres tirés des quatre différentes guildes. Ces cartes représentent le cœur du jeu. Vous pouvez en acquérir de supplémentaires au cours du jeu en gagnant de l’influence auprès des différentes guildes ou en… sauvant des survivants. Chaque carte, chaque guilde, chaque membre d’équipage possède un pouvoir unique qui va avoir un effet sur le jeu

À votre tour, vous jouez une carte d’équipage de votre main, en résolvant d’abord la valeur de voile ou la valeur de revenu en bas à droite de la carte d’équipage. Puis vous résolvez la capacité principale de la carte. Assez simple, non ? Non. La complexité et la richesse du jeu provient des différentes capacités de ces cartes, ainsi que d’une grande décision que vous devez prendre de manière constante et cruelle dans le jeu : quand (et si) passer de « Sinkside » à « Skyside ».

Tout le monde commence le jeu avec son plateau de joueur et ses cartes d’équipage recto-verso. Certains équipages auront des capacités différentes selon que vous êtes à / sur / dans Sinkside ou Skyside. Pendant que vous êtes dans Sinkside, il est plus facile de rassembler des ressources et d’explorer. Votre principale source d’économie est la vente de ressources sur le marché. Si vous vous rendez au contraire à Skyside, vous ne vous baladez plus pour des ressources, vous devez les acquérir sur le marché. Cependant, la monnaie y est beaucoup plus facile à acquérir, et c’est là également que vous y construisez la flottille, la Flotilla du titre, générant ainsi et ici des points de victoire

Pour résumer, à votre tour, vous ne jouez qu’une seule et unique carte. C’est tout ! Des règles qui paraissent simples mais qui se révèlent riches et complexes. Flotilla offre une énorme profondeur stratégique. Où aller, quoi faire, et surtout, quand passer de l’une à l’autre zone ? De cruelles, savoureuses et douloureuses questions sans réponses faciles et qui changeront à chaque partie. Attendez-vous à ce que votre toute première partie tourne au ralenti, car il existe de nombreuses règles à suivre et respecter

Et comment on gagne ?

Le jeu se termine lorsque tous les points de victoire (on en prépare 100 par personne au début du jeu) ont été raflés au cours de la partie

Les points de victoire dans Flottilla sont attribués de diverses manières, telles que la réalisation des étapes sélectionnées lors de l’ installation au hasard du jeu, ou le gain d’ influence dans une guilde, en vendant le plus de ressources précieuses, etc.

Pas une véritable salade de points de victoire, et tout est visible puisqu’on suit l’avancée des points des autres

Interaction ?

Sur l’IGUS, l’échelle de mesure de l’interaction dans les jeux, Flottilla atteint un 2/5

Pourquoi ?

Parce que dans Flotilla, on n’est pas dans un jeu d’affrontement direct, mais il y a quand même un système de majorité et de course aux points et aux cartes qui fait qu’on doit toujours garder un œil sur les stratégies adverses

Il n’y a toutefois pas beaucoup d’interaction directe dans le jeu. La principale manière dont vous affectez les autres consiste à acheter et vendre des ressources, ainsi qu’à rentre en compét pour différentes cartes d’équipage sur le plateau de guilde. Mais c’est un peu tout. Les règles vous empêchent d’empiéter sur les territoires de vos adversaires

À combien y jouer ?

Flottilla est prévu pour 3 à 5

Le jeu tourne très, très bien à 3-4. À 5, il a tendance à ralentir un poil, à peine. Le fait qu’on ne joue qu’une seule et unique carte à son tour, à 5 on ne doit pas s’attendre à trop de ralentissement ou de temps d’arrêt entre les tours

À partir de quel âge y jouer ?

Le jeu est prévu dès 14 ans. C’est une bonne estimation, puisque Flotilla se veut plutôt riche et exigeant. Plus jeune, Flotilla risque de noyer sous un déluge de mécaniques diverses, variées et imbriquées

Alors, Flotilla, c’est bien ?

Flotilla est parfait pour les joueuses et joueurs qui aiment les jeux de civilisation avec une gestion stratégique des ressources, associée à de l’engine-building

Ce qui fonctionne dans Flotilla, c’est l’attention thématique aux détails et l’équilibre de divers et complexes mécanismes d’engine-building. Dans de nombreux jeux de civilisation, pour gagner, il est nécessaire de consacrer tout son temps et énergie à une facette, une piste, une trajectoire de jeu spécifique, ou, maintenir des niveaux de compétence équilibrés afin que son jeu, son développement, sa stratégie, son « moteur » tiennent sur à peu près tout, partout. Dans Flotilla, on peut s’amuser à butiner, batifoler, picorer comme bon nous semble par-ci, par-là

Autrement dit, on ne sent pas de stratégie gagnante. On est plutôt ici dans un jeu au mode, au monde ouvert. On se balade, on joue, on gagne (ou pas). Ce qui confère au jeu une impression positive, entre construction, contrôle et exploration

Flotilla est un jeu riche et puissant qui offre de multitudes chemins stratégiques victorieux. On peut jouer et tenter de gagner de mille (ou environ) manières différentes

D’un point de vue thématique, Flotilla est incroyablement immersif et cohérent. Les mécaniques de jeu tentent d’asseoir un univers de jeu original et uchronique, et c’est plutôt bien rendu ! Si vous appréciez Terraforming Mars, Through the Ages ou Scythe, vous allez kiffer Flotilla !

Mais

Il faut quand même relever que Flotilla souffre d’un petit écueil qui pourra décontenance, détoner, décevoir. Le jeu propose un certain chaos appuyé, en s’appuyant sur des jets de dés aléatoires et des tirages de tuiles. Obtenir quelques maigres piécettes pendant que votre voisine vient de pécho un skiff gratuit risque bien de faire cringer dans les chaumières

Mélanger un tel degré élevé d’aléatoire avec un cadre de jeu aussi balèze et prolongé pourrait saper les ardeurs de certains publics avides de stratégies profondes. Flotilla tente le dur labeur d’équilibriste de tout gros jeu de société moderne : évoluer sur un filin tendu entre aléatoire, surprise, événement et rejouabililté, et calcul et contrôle. Le jeu réussit dans sa tentative. Mais pas certain que tous les types de public soient preneurs

🔴 Flotilla, score final :

Note : 4.5 sur 5.

Et encore une chose

Vous pouvez consulter les règles de Flotilla en anglais ici

Vous pouvez trouver Flotilla en anglais chez Philibert ici (qui est ouvert depuis le déconfinement)

La VF est attendue pour dans 1d6 mois chez Intrafin

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  • Auteurs : Michael Mihealsick & J.B. Howell
  • Illustrateur : Bartek Fedyczak
  • Éditeur : Wizkids
  • Nombre de joueurs et joueuses : 3 à 5
  • Âge conseillé : Dès 14 ans (pas moins !)
  • Durée : 90 à 150 minutes (pas moins !)
  • Thème : Uchronie, post-apo maritime
  • Mécaniques principales : Cartes, exploration, engine-building

Fin avril 2020, Wizkids a annoncé une « suite » à Flotilla, une version uniquement à 2, et avec également un mode solo, intitulée Seastead

Seastead se déroule dans le même univers (prenez votre souffle) uchronique post-apocalyptique maritime que Flotilla

Publié par WizKids, le jeu devrait être commercialisé en anglais en octobre 2020 pour une trentaine d’euros. Mais avec Essen qui vient tout juste d’être annulé, annoncer un jeu pour octobre devient presque… étrange

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3 Comments

  • PPPPP

    ça ne choque personne que la mécanique principale du jeu (cartes et gestion de main) soit un copier-coller de Concordia ? Inspiration ? Plagiat ?

    • Gus

      Bonjour,

      Merci pour votre réaction, tout à fait justifiée et pertinente, vous avez raison de le relever

      Mais au vu de la (sur)production ludique actuelle, je crois qu’on a dépassé le moments où les jeux étaient 100% originaux et inventaient tout

      D’ailleurs, la création elle-même implique de s’inspirer (de copier ?) d’autres œuvres

      Tout est question de savoir comment exploiter une mécanique connue de manière différente

      Je prendrais l’exemple bien connu de l’auteur Haut-Savoyard bien connu Bruno Cathala. TOUS ses jeux sont des copies de jeux existants : Mancala / Awalé, Domino, Morpions, Solitaire, Échecs, etc. Et pourtant. L’auteur parvient à chaque fois à apporter un petit twist à la mécanique bien connue

      Ici aussi, Flotilla reprend Concordia, vous avez raison. Qui lui-même a déjà repris Puerto Rico. Qui a certainement lui-même repris d’autres jeux avant. Créer = copier ? Remixer !

      Flotilla ressemble à Concordia, vous avez raison, et pas du tout en réalité. Pas de connexions territoriales, deux zones de jeux distinctes, etc. Même le principe des personnages recto-verso est une reprise des cartes Magic qui s’upgradent

      Aujourd’hui, un jeu original est un jeu qui arrive non pas à proposer des mécaniques innovantes, car avec plus de 3’000 jeux qui sortent chaque année, je pense qu’il faut faire le deuil de l’innovation. Non. Un jeu original, aujourd’hui, est un jeu qui parvient à proposer un mélange cohérent, robuste et différent. Flotilla y parvient, en mélangeant plusieurs mécaniques connues pour finalement nous proposer un jeu neuf, frais, différent

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