
Ishtar. Entrée, plat, fromage, désert
Ishtar, de quoi ça parle ?
Le pitch :
« La légende raconte qu’une nuit, le jardinier de la Reine tomba d’épuisement dans le désert. À bout de forces, il pleura de longues heures durant. Quels que fussent ses efforts, il lui était impossible de faire pousser la moindre fleur en ces terres arides ! L’une de ses larmes, pourtant, traversa le sable et atteignit l’autre monde. Elle fut délicatement recueillie par la déesse Ishtar, qui en fut émue. D’un souffle, Ishtar renvoya la goutte d’eau en direction de la surface, où elle jaillit alors en une inépuisable fontaine. Éternellement reconnaissant, le jardinier jura alors de tout mettre en œuvre pour créer les plus magnifiques des jardins… «
En gros, il est question de faire refleurir le désert, de demander l’aide de la déesse Ishtar pour obtenir de l’eau
OK, si le thème est super moderne, super touchant, avec à la crise environnementale actuelle, oubliez de vivre une aventure ou de chercher une certaine cohérence, on est ici dans un jeu au thème plutôt collé

Et comment on joue?
Son tour de jeu est simple et fluide
On pioche une tuile disponible sur le « distributeur à tuiles », qui présente à chaque fois une tuile face ouverte dispo à son tour. On peut également défausser une ressource pour « skipper » la tuile et prendre la prochaine, ou la prochaine, et ainsi de suite
Puis on place cette tuile sur le plateau, construit au début grâce à des grosses parties, en les assemblant au hasard, juste histoire d’avoir un renouvellement de parties (mais au fond, ça ne change pas tellement, hormis la config des différents éléments, fontaines + gemmes + pierres). C’est dans la pose des tuiles que réside tout le sel, tout le coeur et toute la difficulté du jeu : adjacent à une autre de ses tuiles, et/ou une fontaine, mais pas adjacent aux tuiles des autres. Sachant qu’on prend possession d’un groupe de tuiles / jardins en y posant l’un de ses assistants / meeples tout chouki
Là où on place les tuiles, si des gemmes s’y trouvait, on les récupère. Ces gemmes font office de ressource, d’argent à dépenser pour activer les pouvoirs spéciaux sur son plateau perso pour débloquer des compétences spéciales (PV en fin de partie, nouvelles tuiles, etc)
Enfin, si on le désire, on peut planter / poser un arbre sur la tuile posée en prenant l’une des cinq cartes « arbre » disponible en en payant le coût et aux couleurs correspondantes de gemmes
Voilà, c’est tout
Ishtar est un pur et « simple » jeu de placement de tuiles, toutefois plus complexe que Kingdomino ou Carcassonne, qui colle au même concept : réussir à placer des tuiles pour constituer un territoire plus ou moins lucratif

Et comment on gagne ?
Quand deux piles de tuiles sont épuisées sur le « distributeur » de tuiles, on procède au décompte final. Et là, c’est le drame:
- PV pour ses cartes « arbre » construite
- 1 PV pour chaque fleur visible dans chaque parterre de fleurs / territoire de tuiles
- 4 PV pour chaque fontaine violette « contrôlée », i.e. connectée à ses territoires
- 6 PV pour chaque fontaine rouge
- 8 PV pour chaque fontaine blanche
- PV pour ses pouvoirs débloqués sur son plateau perso
Voilà, c’est… « tout ». Et c’est indigeste
Le décompte s’éternise et demande de compter des points de tous les côtés. En fait c’est vu, dès que je vois un carnet de décompte servi dans le matériel de jeu, comme c’est le cas dans Ishtar, je prends peur et je me dis, à raison, que le décompte final va partir dans tous les sens et qu’il va durer
L’autre souci, c’est qu’on joue à l’aveugle, à la Wingspan, autant on n’a strictement aucune idée de ses propres PV, autant on se sait rien de ceux des autres. C’est un peu relou, on essaie de faire au mieux, sans avoir aucune certitude. Moyen
Interaction ?
Sur l’IGUS, l’échelle de mesure de l’interaction dans les jeux, Ishtar atteint un 2/5

Pourquoi?
Parce que dans Ishtar, la seule interaction directe et « au contact » consiste à poser une tuile sur un emplacement possiblement convoité par quelqu’un d’autre, ou de se dépêcher de rafler les gemmes et les fontaines (blanches, puis rouges, puis violettes, dans l’ordre de valeur)
On peut également payer une ou plusieurs ressources pour aller taper dans une tuile visible autre que celle que l’on devrait prendre gratuitement, empêchant ainsi les autres de la prendre « normalement », mais ce n’est pas rédhibitoire
Une interaction plutôt glaciale, donc, qui pourra refroidir (décevoir?)
À combien y jouer ?
Le plateau s’adapte en taille en fonction du nombre de joueurs et joueuses à la table. Et comme son tour est plutôt fluide, pioche, pose, construction ou pas, on n’attend pas trop son tour, le jeu ne s’enlise pas (dans le désert, c’est le cas de le dire…)
Mais
Comme l’interaction est polaire (étrange, puisqu’on est dans le désert), jouer à Ishtar à deux, à trois ou à quatre n’apporte pas de valeur ajoutée
À partir de quel âge y jouer ?
Le jeu est prévu dès 12 ans, et c’est le minimum, car entre les différents pouvoirs qui peuvent se débloquer pendant la partie en payant des ressources, ainsi qu’entre les règles de pose de tuiles et d’acquisition des jardins / territoires, il paraît difficile d’y jouer plus jeune
Alors, Ishtar, c’est bien ?
Le monde se divise en deux catégories: les fans inconditionnels de Bruno Cathala, qui ne jurent que par cet auteur et qui lui voue un véritable culte (c’est normal, après tout, il porte le même nom que le dieu de Lovecraft. Enfin, à peu près. Même en anglais on prononce Ka-thu-lu. Ce n’est pas un hasard), et les autres
Les premiers crieront au génie et trouveront Ishtar génialissimes, conquis à l’auteur / la cause. Les autres seront un peu plus… froids et dubitatifs
Ishtar offre beaucoup de points positifs : un thème écolo, un plateau, un jeu qui… pousse, littéralement, un gameplay fluide, une fois les règles de pose assimilées, des parties plutôt courtes (45′) et tendues, et pour une fois, pas de cartes aux pouvoirs multiples et indigestes que Bruno Cathala place très / trop souvent dans ses jeux et qui obligent les joueurs et joueuses à jouer le nez fourré dans les règles. Ici, tout file, tout fonce
Mais
En-dehors de toutes ses qualités, apparentes, Ishtar ne reste pas en bouche. Il laisse pantois, froid. On passe sa partie à placer des tuiles en adjacence, et on se dit : tout ça pour ça. Au final, le jeu sonne creux et ne nous a pas ébloui. Pas d’effet Wahou. Un beau jeu, un jeu sympa, mais de loin pas un grand jeu. On ne criera pas au génie
🔴 Ishtar Score final : 3/5
Ce qui nous a plu 👍
✅ Un superbe matériel
✅ Un plateau, un jeu qui grandit (les arbres), qui verdit et fleurit (les tuiles) qui… pousse
✅ Même si le thème est abscons, le fait de voir, de faire reverdir le désert fait du bien au moral (surtout en pleine crise environnementale avec le désert qui avance pour de vrai)
✅ Quelques petits choix subtils et savoureux: quelle carte « arbre » prendre, quel pouvoir débloquer
✅ Peu de hasard, on peut planifier son prochain coup puisqu’on voit les tuiles dispo
Ce qui nous a moins plu 👎
❌ Un décompte final à l’aveugle, pénible et indigeste
❌ Un jeu qui sonne creux, et au final très répétitif. Je pose une tuile « végétation » adjacente à une fontaine ou à une autre tuile déjà posée. Pas trépidant
❌ Pas le meilleur jeu de Bruno Cathala, co-auteur avec Evan Singh (un… pseudo ???), mais pas le pire non plus
❌ On y rejouera 2, 3 fois, pas plus. Une fois toutes les règles et contraintes de poses assimilées, le jeu ne présente aucune opportunité de progression
❌ Il faut déjà 45′ pour bien comprendre les règles de pose des tuiles, pas super évidentes ni fluides (ici oui, mais ici non, comme ça oui, mais ici non pas comme ça). Au final, beaucoup de contraintes qui freinent et empiètent sur le jeu
Et encore une chose
Vous pouvez consulter les règles d’Ishtar ici
Et vous pouvez trouver Ishtar chez Philibert ici
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- Date de sortie : 4 octobre 2019
- Langue : Française
- Produit en : Chine
- Ecoscore : D. Beaucoup de carton (tuiles), de bois (arbres, meeples), mais également du plastique (les gemmes-ressources, les fontaines)

Si vous voulez en savoir plus sur l’EcoScore dans les jeux de société, c’est ici
- Auteurs : Bruno Cathala et Evan Singh
- Illustrateur : Biboun
- Éditeur : IELLO
- Nombre de joueurs et joueuses : 2 à 4 (mais comptez plutôt 2 à 3)
- Age conseillé : Dès 12 ans
- Durée : 45′ environ,
- Thème : Désert
- Mécaniques principale : Tuiles, objectifs


3 Comments
jean-pierre niaulon
Dommage,
je ne suis pas un inconditionnel du Ca-Tha-La Ftagh’n!, mais certains de ses jeux, surtout ceux inspirés par les jeux traditionnels (Par exemple Five Tribes) sont souvent excellents à mon goût.
J’attendais beaucoup de cette déclinaison annoncée du Go, eh bien j’en resterai à la Traversée du désert de Knizia.
Merci pour l’article
Cédric Immelé
On vit dans un monde bizarre. Se forger une opinion à partir d’un article subjectif. Allez vous renseigner par vous même en essayant le jeu, il ne faut pas dire « dommage » sous prétexte que Gus & Co ne le trouve pas à son goût. Pour le coup, c’est vraiment dommage…
Gus
Vous avez entièrement raison, merci pour votre intervention pertinente Cédric
Vu le nombre incessant et ahurissant de sorties, peut-on encore tout tester soi-même pour se faire son propres avis? À moins d’habiter près d’une structure d’accueil genre Bar à Jeux ou assoc, ou à moins d’être multimillionnaire, il ne faut pas se leurrer, on ne peut plus tout tester soi-même, il faut bien passer par des chroniques (et pas que les nôtres hein 😀) pour se faire un semblant d’idée
Et c’est peut-être ça, le pire, au fond. On va passer beaucoup de temps à consulter les différentes plateformes pour croiser les infos pour tenter de parvenir à un semblant de conclusion
Tout acheter pour tout essayer paraît compliqué. Et je dis ça le jour avant de partir à Essen 😳 et ses 1’400 sorties (environ)
À très vite sur Gus&Co Cédric 👋🏼