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Black Out: Hong Kong. Un jeu qui tombe pile poil dans l’actu

Black Out: Hong Kong. De quoi ça parle ?

Nous sommes en 2020, et Hong Kong connaît une coupure d’électricité massive. Plus aucune lumière, plus rien de fonctionne. Et là, c’est le drame. Votre but: trouver des ressources pour aider les gens, mettre votre équipe à pied d’oeuvre pour sauver la ville

Un thème à la Pandémie, mais en version compétitive, qui tombe pile poil dans une actu chaud bouillante, avec un Hong Kong secoué par des manif de rues impressionnantes depuis des semaines visant à faire changer d’avis le gouvernement de la province

Celui voulait introduire une nouvelle loi allant dans le sens de la Chine continentale en se donnant la possibilité d’extrader tout hong-kongais pour le juger en Chine. Vu la situation pas très rigolote et relativement peu libertaire du pays, cette loi a été très peu appréciée par HK. D’où manif massives (des millions de gens dans la rue). D’où abandon de cette loi. D’où manif qui continuent à s’emparer de la ville pour demander la démission de la dirigeante de Hong Kong en place. Oui, car après la rétrocession de HK aux Chinois par les Britanniques, le gouvernement chinois a promis une certaine indépendance à la ville pour cinquante ans, deux pays, deux systèmes

Cette loi d’extradition vient les contredire et commencer le sinno-liberticide rampant

Bref

Si une coupure de courant n’intervient pas dans l’actu, il n’en reste qu’il est étrange de jouer dans les rues de la ville à devoir sauver les gens et éviter les… manif

Quand l’auteur, Alexandre Pfister, a créé le jeu, il était à des années-lumières de penser que son jeu allait sortir pile poil au « bon » moment

Cela dit

Le jeu est très peu narratif. Ne vous attendez pas à une immersion dans le quotidien de la ville, on est dans un pur jeu « à l’allemande » dans lequel les mécaniques de jeu sont ripolinées et omniprésentes. La narration passe au second troisième quatrième arrière-plan

Et comment on joue?

Il y a tellement de phases par manche, huit, tellement de mécaniques différentes et bigarrées que ça prendrait trop long à tout décrire

Disons « juste » que:

  • On commence en tirant trois dés qui indiquent les ressources dispo pour la manche
  • Il s’agit d’un deck-building: on commence avec un deck de cartes perso d’équipe faible, et peu à peu on peut acheter de nouvelles cartes pour l’améliorer
  • On obtient des ressources pour accomplir des objectifs. Ce qui permet de prendre les cartes d’équipe en main, justement, pour progresser dans le deck-building
  • Il y a une gestion et une incidence géostratégique sur le plateau, avec la possibilité de placer des cubes autour de quartiers pour pouvoir ensuite les sécuriser
  • On peut débloquer des tonnes d’objectifs annexes sur son plateau, qui fonctionnent toujours de la même manière: ressources => récompenses
  • Deux ressources sont périssables en fin de manche, impossible de les « stocker », eau & nourriture sont défaussées mais permettent d’obtenir des éléments en échange

Black Out: Hong Kong est un jeu complexe, riche, aux règles certes claires et didactiques, mais bourré de picto de tous les côtés, ce qui ne le rend pas fluide, on passe sa (première) partie le nez dans les règles pour comprendre la signification de tout ce bazar

Comptez bien 2-3 manches de votre toute première partie pour saisir les tenants, aboutissants et mécaniques du jeu, car au final, tout devient logique, imbriqué, mais il faut compter sur un certain temps d’apprentissage des différentes phases pour commencer à faire les liens

Bref, Black Out: Hong Kong, un jeu Core

Et comment on gagne ?

Dès que le deck de cartes de cartes « objectifs  » est épuisé la partie prend fin et on procède à un tout dernier décompte qui fait encore grapiller quelques points par-ci par-là

Mais c’est surtout tout au long de la partie qu’on en obtient, de tous les côtés

Pas de salade de points de victoire, plutôt un buffet. PV grâce aux objectifs « principaux », PV grâce à aux objectifs annexes validés lors de la prise de cartes en fin de manche, PV en réussissant à sécuriser / entourer un quartier de cubes

Interaction ?

Sur l’IGUS, l’échelle de mesure de l’interaction dans les jeux, Black Out: Hong Kong atteint un 2/5

Pourquoi?

Parce que dans Black Out: Hong Kong, on est dans une pure course aux points de victoire puisqu’ils sont visibles tout au long de la partie. Au risque d’être frustrant quand un et une joueuse prend une avance effrontée et effrénée. Mais comme on a toujours quelque chose à faire, une carte à acheter par-ci, un objectif à remplir par-là, on finit toujours par grappiller quelques points

Et Black Out: Hong Kong n’est pas vraiment un jeu de combos. Alors certes, on va améliorer son deck d’équipe, avec des cartes de plus en plus balaises, mais comme on ne connaît pas le tirage des dés, il est impossible de s’asseoir bien tranquillou à l’ombre de combos dévastateurs

Tout ceci devrait donc plutôt conférer un 1/5 sur l’IGUS. Alors pourquoi un 2/5?

Parce qu’il y a une petite mécanique d’opportunisme avec les cubes placés sur le plateau qui vont peu à peu entourer / sécuriser les quartiers. Dès que le pourtour est effectué, on gagne des points. Et comme on peut très bien également participer au pourtour pour également scorer, mieux vaut bien surveiller le jeu des autres pour venir se taper l’incruste

Au final, une interaction plutôt froide, donc, ni coop, ni baston, on passe sa partie à gérer ressources, objectifs et cartes dans son coin à essayer de scorer plus mieux bien

À combien y jouer ?

Le jeu est prévu pour 2 à 4

Autant à 2 le jeu tourne plus vite, autant la course et la tensions sont bien évidemment moins marquée

Après, comme le jeu propose une interaction de 2/5, max, il ne faut pas s’attendre à non plus à mener une lutte âpre et directe contre ses 1, 2, 3 partenaires de jeu. On passe le clair de son temps à gérer sa main, ses cartes, ses ressources et objectifs dans son coin, même s’il est impératif de bien suivre quand un quartier est en passe d’être entouré pour pouvoir essayer de s’y immiscer en plaçant un cube pour pouvoir participer à au décompte de ce quartier. Opportuniste…

Bref, le jeu tourne très bien dans toutes les config, mais à 4 il faut s’attendre à ce que le jeu prenne beaucoup plus de temps et que les huit phases patinent dans la semoule

À partir de quel âge y jouer ?

14 ans, vraiment pas moins, tellement toutes les mécaniques imbriquées sont complexes et exigeantes

Alors, Black Out: Hong Kong, c’est bien ?

Bof bof

Selon moi, ce n’est de loin pas le meilleur jeu de l’auteur

La toute première partie, manche, laissent pantois et dubitatif. On se demande bien comment faire l’apprentissage de tout ce déluge de picto et des innombrables possibilités offertes par le jeu à chaque phase

Un travail de création hallucinant

Mais

Au final, on finit noyé par:

  • La lenteur du jeu
  • Le clivage entre stratégie et tactique, au point d’être coincé, frustré, mais pas dans le « bon » sens
  • L’aspect répétitif du jeu, surtout dû à sa durée. Sur 45-60′, OK. Sur 2-3h, on commence par s’en lasser

Score :

Anticipation : 5/5

Ooooooh, le nouveau jeu d’Alexandre Pfister, l’auteur des excellents titres que sont Isle of Skye et surtout Great Western Trail? Le jeu doit forcément tout déchirer

Pendant la partie : 2/5

Lent, poussif, pénible. Énormément de mécaniques imbriquées, des phases qui ratissent large, des parties extrêmement lentes et beaucoup trop longues

Après la partie : 1/5

On rejoue? Oh que non, il y a bien trop d’autres jeux à découvrir, à apprécier

Score final : 3/5

On aurait voulu adorer, on finit déçu. D’un point de vue du gamedesign, le jeu est époustouflant de richesse, de complexité, de profondeur. Il ravira les joueurs et joueuses avides d’expériences ludiques complexes. Mais le tout est tellement poussif qu’il paraît difficile de tenir la longueur. Et surtout, le côté tactique dû aux lancers de dés empiète sur l’aspect stratégique et gestion

Au final, on est tributaire des lancers de dés, des ressources à disposition et des cartes dispo dans sa main pour les obtenir, donc on finit par faire ce qu’on peut avec ce qu’on a. Mais sur 2-3h, cela en devient pénible

Un Black Out: Hong Kong sur 45′, je signe tout de suite

Bref, nous n’avons pas beaucoup apprécié. Un jeu froid et brouillon qui saisit aux neurones, pas aux tripes

Ce qui nous a plu 👍

✅ Une richesse de mécaniques époustouflantes. Un travail de gamedesign de ouf

✅ Oui, on peut produire un jeu en Allemagne avec du matériel renouvelable, pas besoin de toujours taper dans du plastique chinois (un LudiScore A, donc)

✅ Le nouveau jeu d’Alexandre Pfister, yeeeeeah

✅ Un thème original

✅ Un mode campagne, avec cinq chapitres à réaliser. Il s’agit en réalité de variantes et de mise en place différentes, avec des objectifs spécifiques à réaliser pour remporter le chapitre

Ce qui nous a moins plu 👎

❌ Un thème peu exploité, pas du tout narratif

❌ Des mécaniques, des phases tarabiscotées

❌ On peut tout faire, et rien faire en même temps. Certaines phases tombent à plat et on se retrouve parfois coincé, bloqué. On pourrait faire mille trucs, mille objectifs, prendre mille jetons, fermer mille quartiers, mais au final, par manche, on ne finit pas ne réaliser que 2 maigres actions

❌ Des parties longues, lentes, poussives. Un rythme peu soutenu, peu dynamique, peu appétissant. On finit par s’embêter sec

❌ Un mode campagne au final cosmétique qu’on aura peu de chance d’essayer, tellement le jeu est froid et répétitif

❌ Passer la partie le nez dans les règles à devoir décoder les 600’000 picto pour comprendre les éléments, les cartes

❌ Un déséquilibre flagrant (et énervant) entre tactique (les dés, les cartes en main dispo) et stratégie (viser les objectifs)

Et encore une chose

Vous pouvez consulter les règles de jeu en anglais ici

Vous pouvez trouver Black Out: Hong Kong en français chez Philibert ici

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  • Date de sortie : Printemps 2019
  • Langue : Française
  • Produit en : Allemagne
  • LudiScore : un pur A. Produit en Allemagne, et tout le matériel est renouvelable. Si vous ne savez pas ce qu’est le LudiScore, jetez un œil ici
  • Auteur : Alexandre Pfister
  • Illustrateur : Chris Quilliams
  • Éditeur : Eggerstpiele pour la VO, Plan B pour la VF
  • Nombre de joueurs et joueuses : 2 à 4 (tourne bien à toutes les config)
  • Age conseillé : Dès 14 ans (jamais moins)
  • Durée : 2-3h, difficilement moins
  • Thème : Gestion urbaine d’une coupure d’électricité massive (mais le thème est très peu narratif)
  • Mécaniques principale : Deck-building, objectifs
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7 Comments

  • Olivier

    Bonjour,
    Merci pour cet article, concernant l’échelle Igus j’aurais mis 2 pour ma part (car il y a l’achat des cartes et le placement de ces pions sur la carte qui peux occasionner des blocages).
    Cdt

  • Fafa

    Merci pour le test. Le point qui m’inquiète vraiment plus c’est le niveau de hasard dans ce genre de jeu, est-il vraiment si important?
    Pour la complexité et les icônes ça ne doit pas être pire qu’un Lacerda ^^

    • Gus

      Malheureusement, oui, beaucoup trop de hasard pour ce type de jeu. Beaucoup trop tactique et opportuniste pour un jeu d’une taille ampleur. Le clivage est criant et… épuisant

      On peut certes traficoter les tirages en payant une ressource (des… camions 🚛), mais c’est plus cosmétique que véritablement efficient

      Bref, pas top top

      Ça arrive, ce n’est pas grave non plus, avec la masse de jeux de société qui sort chaque année, croire / espérer / attendre que tous sont bons est un doux rêve molletonné

      • Fafa

        Oui c’est sûr, j’ai de quoi m’occuper, mais j’avais beaucoup aimé GWT et Isle of Skye, donc forcément j’ai pas mal d’attentes sur les nouveaux jeux de cet auteur.
        Je l’essayerai donc si j’en ai l’occasion, mais je ne penses pas forcément l’acheter, je suis allergique au hasard mal dosé dans ce genre de jeu. C’est dommage car les gros euro c’est le genre que je préfère.

  • Olivier

    Bonjour,
    Pour ma part j’ai beaucoup apprécié mes sessions sur ce jeu. Mais j’ai joué uniquement en version solo et, effectivement, passé une première partie  » à vide « , juste un essai le nez dans les règles et l’apprentissage des – nombreux ! – pictogrammes, on finit par réaliser la richesse des nombreuses mécaniques qui s’imbriquent parfaitement. Certes, et là je suis d’accord, on oublie complètement le thème pour se concentrer sur la gestion de son équipe.
    J’en suis pour le moment au troisième  » scénario  » ( en fait une mise en place et des objectifs différents ) de la campagne ( seule façon de jouer en solo ) et l’envie de poursuivre est bien là. Pour l’instant le hasard ne m’a pas dérangé plus que celà ( et puis celui ci est inhérent à tous les événements aléatoires de notre vie, non?) et je testerai bien une partie à 3. Je pense, effectivement, qu’à 4 joueurs cette partie doit être beaucoup trop longue et finir par tourner dans le vide!
    Bien ludiquement,
    Olivier

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