Jeux de plateau

Malgré des chiffres élevés, Hasbro licencie en masse

En 2022, Hasbro a connu un ralentissement de son chiffre d’affaires. Malgré des chiffres élevés, la société supprime 1 000 postes.


Hasbro

Hasbro est une entreprise américaine qui produit des jouets et des jeux de société. Elle est connue pour ses marques populaires telles que Monopoly, Transformers et My Little Pony. Hasbro produit une variété de produits, notamment des jeux de société, des peluches, des figurines, des articles de papeterie et des produits électroniques.

Fondée en 1923, elle est devenue l’une des plus grandes entreprises de jouets et de jeux du monde. En 2020, elle a été classée au classement des plus grandes fortunes, le Fortune 500. Hasbro est engagée dans des activités mondiales et est présente dans plus de 50 pays. Hasbro s’est adapté à l’industrie des jeux de société en augmentant sa présence sur les plateformes numériques et en développant leur propre plateforme en ligne pour faciliter la recherche et l’achat de leurs produits.

Dans le milieu du jeu de société moderne, Hasbro est surtout connu pour deux de leurs produits phares, Donjons et Dragons et Magic l’Assemblée, tous deux gérés par Wizards of the Coast qu’ils ont racheté en septembre 1999.

Hier, Hasbro a publié ses résultats financiers du quatrième trimestre et de l’année 2022. Hasbro annonce des changements organisationnels et fournit des informations sur ses chiffres pour l’année écoulée.

Les chiffres

Hasbro, leader mondial du divertissement, a donc annoncé hier des changements au niveau de la direction et de l’organisation, notamment la suppression de 15 % de ses effectifs mondiaux. Le plus grand fabricant de jouets et de jeux dans le monde tente d’optimiser des investissements dans les systèmes et la chaîne d’approvisionnement qui permettront d’atteindre la rentabilité et de réinvestir dans les marques principales d’ici la fin de 2025. De quoi, selon lui, réaliser des économies annuelles de 250 à 300 millions de dollars.

Voici, en résumé, les éléments-clés de ces annonces :

  • Le chiffre d’affaires pour 2022 est d’environ 5,86 milliards de dollars, en baisse de 9 % par rapport à l’année précédente.
  • Pour le quatrième trimestre 2022, le chiffre d’affaires de 1,68 milliard de dollars est en baisse de 17 % en glissement annuel.
  • Malgré la forte croissance de Wizards of the Coast et Digital Gaming, Hasbro Pulse et les licences, Hasbro Consumer Products a sous-performé au quatrième trimestre.
  • Revenus de Wizards of the Coast et des jeux numériques de 339 millions de dollars, en hausse de 22 % ; revenus des produits de consommation de 1,0 milliard de dollars, en baisse de 26 % ; et revenus du divertissement de 335 millions de dollars, en baisse de 12 %.
  • Le chiffre d’affaires de Wizards of the Coast et des jeux numériques est de 1,33 milliard de dollars, en hausse de 3 % sur un an ; le chiffre d’affaires des produits de consommation est de 3,57 milliards de dollars, en baisse de 10 % ; et le chiffre d’affaires du divertissement est d’environ 959 millions de dollars, en baisse de 17 % sur un an, et de 12 % si l’on ne compte pas les 65 millions de dollars de l’activité musicale vendue en 2021.
  • En 2023, Hasbro aura supprimé environ 1 000 postes à temps plein et avec des modifications de leur structure de direction et d’organisation.

Pour aller à l’essentiel, que faut-il retenir de toutes ces annonces ? Cette année, les revenus de Hasbro sont en baisse par rapport à l’année dernière. Ils vont supprimer 1 000 postes et changer leur structure.

Il faut dire que Hasbro emboîte le pas de la tech, qui connaît elle aussi une vague impressionnante de licenciements (70 000 postes perdus l’année passée !). Google, Amazon, Spotify, Meta, Microsoft tout le monde s’y met, aussi.

Des licenciements ? Pourquoi ?

Les explications des grandes boîtes de tech, et Hasbro aujourd’hui, pour leurs récents licenciements sont toutes étrangement similaires. Après la pandémie, la plupart des grandes entreprises de la tech du monde, à l’exception notable d’Apple, qui n’a annoncé aucun licenciement, pour l’instant, ont pensé que plus personne ne sortirait ou ne dépenserait d’argent hors ligne, et que leurs activités en ligne resteraient aussi importantes qu’elles l’étaient.

Ils ont en vrai gagné de l’argent – aucune de ces entreprises n’est en difficulté. Ni même Hasbro qui annonce des diminutions de chiffre d’affaires pour 2020, certes, mais qui reste toujours dans les chiffres noirs foncés. En fait, on dirait que quelqu’un a examiné un budget et a supprimé un certain nombre de postes qui se trouvaient être des… emplois. En général, ce n’est pas non plus une question de performance, comme toute personne ayant été licenciée peut vous le dire. Pourquoi une entreprise supprimerait-elle des emplois qui ne semblent pas nécessaires ?

Les investisseurs évaluent les entreprises différemment. En ce moment, les investisseurs sont prudents parce que les entreprises ne connaissent pas une croissance rapide – comme lorsque les revenus augmentent de 20 ou 30 % chaque année. Est-ce empiriquement vrai ? Ce n’est pas certain. Avec moins de salaires, les coûts de l’entreprise sont moins élevés au fil du temps.

Les entreprises technologiques se copient les unes les autres. Réfléchir est un travail difficile. Avec cette vague, massive, de licenciement, chez Hasbro et ailleurs, il faut croire que c’est la raison pour laquelle la plupart des managers ne le font pas.

Or en vrai, les licenciements ne réduisent pas les coûts. Il n’y a aucune preuve que les licenciements améliorent la rentabilité. En fait, ils réduisent la rentabilité. La plupart des entreprises n’ont pas un problème de coûts. Elles ont un problème de revenus. Les licenciements n’augmentent pas les revenus.

Les licenciements pendant la pandémie de Covid de 2020 n’ont eu aucun effet sur le cours des actions. Les entreprises qui ont fermé des usines et licencié des travailleurs ont obtenu de meilleurs résultats que celles qui ont simplement licencié des travailleurs.

La réalité est toute autre, et bien plus triste. Les licenciements tuent – en augmentant le risque de suicide et en accroissant le stress, tant pour les personnes licenciées que pour celles qui restent. Les licenciements peuvent également rendre les gens moins productifs.

Mais alors si les licenciements ne fonctionnent pas, pourquoi le faire ? Il faut se rendre à l’évidence, les boîtes, les gens font des bêtises, tout le temps.

Hasbro dans la tempête

Avec la pandémie en 2020-2021, le jeu de société a connu une explosion, un intérêt, des chiffres historiques. En 2020, Hasbro a annoncé une augmentation de 8 % de son chiffre d’affaires au cours des neuf premiers mois de 2020, atteignant 5,1 milliards de dollars. Cette augmentation significative du chiffre d’affaires indique que les joueurs de jeux de société se tournent vers les produits Hasbro pour se divertir à la maison. Bloqués, confinés, les gens se sont rués sur des activités plus… analogiques.

Il y a plusieurs facteurs qui ont contribué à cette augmentation du chiffre d’affaires. Les efforts marketing et publicitaires accrus et le développement de nouveaux produits ont aidé Hasbro à atteindre un plus grand public. Les jeux numériques ont également été un moteur important, car ils ont permis aux consommateurs d’accéder à leurs produits préférés sans avoir à quitter leur maison.

Oui mais ça, c’était pendant la pandémie. En 2022, aux US et en Europe, elle est devenue moins sévère. Les gens ont recommencé à sortir, à faire (aussi) autre chose que du jeu de société en intérieur. C’est, peut-être, ce qui explique en partie ce recul des revenus. Nous vous en parlions justement hier, les chiffres d’affaires tonitruants de 2020-2021 sont en recul, chez Hasbro, chez Kickstarter également.

Et Hasbro n’est pas le seul éditeur a connaître un ralentissement de ses revenus. D’autres éditeurs de jeux de société font le même constat.

Quoi qu’il en soit, malgré des chiffres élevés, l’annonce de la suppression de 1 000 postes est une sacrée mauvaise nouvelle. Par ailleurs, en pleine « tempête OGL » que Hasbro doit affronter ces dernières semaines, avec ces annonces, même si ce n’est pas la meilleure nouvelle pour Hasbro, cela peut être perçu comme une étape nécessaire pour s’assurer que leur entreprise devienne plus forte et plus rentable pour l’année prochaine. En fin de compte, l’avenir s’annonce prometteur pour Hasbro. Pas pour ses 1 000 employées et employés licenciés.


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Article écrit par Gus. Travaille dans le monde des jeux depuis plus de 30 ans. C’est un auteur prolifique, un rédacteur-en-chef talentueux et un enseignant brillant à l’École supérieure de bande dessinée et d’illustration. Mais surtout, il est extrêmement modeste. Ça se voit dans sa bio.


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6 Comments

  • BENOIT MIRADA

    Par contre le CA augmente naturellement avec l’inflation, car les prix de vente augmente, si il baisse c’est que ça va mal…
    Il faudrait analyser les bénéfices.

  • Enrico Muniste

    C’est quand même bien foutu le libéralisme totalement débridé. Quand ça marche, tout le monde s’en met plein les fouilles tout de suite, à ultra court terme.
    Enfin, tout le monde sauf la majorité de ceux/celles qui ont bossé pour ça….

    Et puis dès qu’il y a quelques mois de moins bien, voire une année en dessous, hop, on se dépêche de sortir les charrettes pour se délester des mêmes qui avaient bien bossé juste avant, pour tenter de maintenir la gloutonnerie de quelques un(e)s à un niveau « décent ».

    C’est moi qui suis trop vieux ou bien il y a eu dans l’Histoire un (grand) moment ou le capitalisme était un peu plus respectable ? Un peu plus soucieux de la pérennité du machin. Un peu plus réfléchi et prévoyant. Même à tenter l’improbable et audacieuse stratégie de mettre un peu de côté les années où ça va, pour mieux digérer les années où ça va moins bien. Une gestion juste un tout petit peu humaine, quoi. Un capitalisme à la papa (ou peut-être à la papi maintenant…). Un temps où l’avidité sans limite n’était pas l’unique et absolue priorité des chefs d’entreprise. Un temps où ces mêmes chefs d’entreprise savaient même ce que faisait leur boite et savaient ce qu’ils vendaient. Si si.
    Ah, on me dit dans l’oreillette que ça s’appelait des patrons. Des vrais. Mais ça c’était avant.

    • Le Pionfesseur

      Le capitalisme a toujours eu en son sein la dynamique qui l’amène à l’horreur de plus en plus grande qu’il est aujourd’hui.

      Certes on peut considérer qu’il était « plus humain » à un moment (mais c’était une opportunité due à un contexte historique très précis), mais il partait d’un principe qui détruirait les génération futures.
      La concurrence et la propriété privée des moyens de production induit forcément la baisse tendancielle du taux de profit et donc, au sein du capitalisme, le grignotage des conditions sociales (qui aurait dû arriver bien plus rapidement sans la société de consommation des 30 glorieuses qui a permis une grande production de marchandises).

      On peut aussi noter que le « plus humain » d’avant reposait pas mal sur du « moins humain » ailleurs, dans les colonies et post-colonies.
      Encore que, je ne sais pas si c’est pas pire maintenant là aussi …

      • Alex Tremgo'ch

        Tiens, une mauvaise nouvelle n’arrivant jamais seule, dans la même philosophie je viens de voir ce qu’il arrive à l’ex-éditeur PEARL GAMES (et futur ex-studio Asmodée). Allez jeter un oeil sur leur page, probablement encore la décision déchirante d’une multinationale qui peine à joindre les deux bouts…

        Respect pour le travail accompli et bon courage à Seb Duj’ et à ses collègues.

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