Critiques de jeux,  Jeux de plateau

Jamaica, le jeu de pirates le plus suisse de Jamaïque

Avec Jamaica, préparez-vous à l’abordage, moussaillons !


Jamaica catoès

Est-ce que vous vous êtes déjà posé la question de savoir pourquoi on est si fasciné par les pirates ? Entre les films, les séries, les jeux, les… partis politiques, même, qu’est-ce que nous attire tant dans cette figure, pourtant dangereuse, criminelle et malfaisante ? Dans Jamaica, le jeu de plateau qui vient tout juste de (re)sortir chez Space Cowboys, plongez dans la fameuse piraterie dans les Caraïbes du XVIIIe siècle.

Ce Jamaica, sorti en novembre 2021, est en réalité la réédition d’un « vieux » jeu, suisse, sorti en 2007 aux éditions GameWorks. Gameworks, à l’instar de Helvetia Games (Unita), encore une autre une maison d’édition suisse, qui a cessé ses activité. Snif. Le paysage ludique helvétique se réduit comme peau de chagrin.

Retour en 2007. Jamaica a été, et est toujours créé par le trio d’auteurs Sébastien Pauchon, Malcolm Braff et Bruno Cathala. À l’époque, Jamaica faisait suite à Animalia. Un petit jeu de cartes tout cute sorti par l’éditeur et avec les mêmes auteurs, pour faire la promotion d’une assurance vétérinaire d’une société d’assurance suisse.

Dans la foulée, pour célébrer les 10 ans de la compagnie d’assurance, celle-ci a à nouveau mandaté la même Dream Team pour leur sortir un autre jeu, un plus gros jeu. Familial, pour l’occasion. GameWorks s’est donc lancé dans la création d’un jeu de pirates. Aucun lien avec l’assurance. Vraiment ? À un détail près. Tous les personnages, pirates, présents dans le jeu, historiques, sont en réalité les visages croqués des dirigeants de la compagnie d’assurance.

Au début de son lancement en 2007, Jamaica était réservé à la clientèle, suisse, de cette compagnie d’assurance. Et le jeu a connu un tel retentissement, un tel succès que finalement, le jeu a été distribué dans les boutiques pour le plus grand bonheur du grand public. À l’époque sans Twitter ni Facebook Meta, avec des smartphones balbutiants, je me souviens encore très bien de cette « fièvre Jamaica » qui s’est emparée du net, Alors client de cette assurance, j’allais chercher des exemplaires du jeu que j’acheminais à tous mes potes. Traitez-moi de mule ludique.

Et pour les presque 15 ans du jeu, c’est Space Cowboys de l’écurie Asmodee qui a repris, racheté les droits du jeu. En ce mois de novembre 2021, ils rééditent le jeu, toutefois avec quelques menus changements.

Jamaica botage

Jamaica est l’un des meilleurs jeux de plateau suisses.

Jamaica est l’un des meilleurs jeux de pirates.

Jamaica est l’un des meilleurs jeux de course.

Jamaica est l’un des meilleurs jeux familiaux.

Tout est dit.

Space Cowboys a eu le nez creux en voulant ressortir ce jeu vieux de plus de dix ans. « Simple » jeu de course de bateaux fun et familial autour de l’île de la Jamaïque, il est surtout beaucoup plus subtil et stratégique qu’il n’en a l’air.

Une nouvelle édition, donc, qui ne change pas grand-chose. Ou à peine.

Ce qui ne change pas

Les règles de base, le thème, les illustrations, rien ne bouge. On continue à se faire la course autour de la Jamaïque avec une mécanique extrêmement raffinée d’utilisation des dés. Un dé pour le matin, un autre pour le soir, puis on choisit une carte pour recevoir les effets, les avantages des dés affichés.

Avec toujours la même interaction, forte, de pouvoir attaquer les autres pour leur chouraver soute ou trésor. On incarne des pirates, que diable ! Ou leur refiler une carte trésor, maudite. Prends ça dans ta cale !

Jamaica 2021, c’est comme Jamaica 2007. Un jeu léger, tactique, passionnant, passionné. Quels dés placer quand, quelle carte choisir alors pour quel effet.

Ce qui change

Dans ce Jamaica 2021, trois choses changent. Une bonne et deux moins bonnes.

Un bon changement

Le gros changement, positif, du jeu, c’est l’ajout d’un lancement pour réagir aux pénuries. En effet, dans le jeu, quand on atterrit sur une case on doit la plupart du temps défausser telle ou telle ressource, nourriture ou or. Dans le jeu d’origine, quand on n’avait pas la quantité requise, on revenait en arrière. C’est quand même le drame pour un jeu de course !

Dans cette version 2021, le dé de combat est multi-classé. On l’utilise toujours pour résoudre la baston, rien ne change, mais ce dé affiche également un petit symbole pour indiquer l’effet de la pénurie. Ainsi, quand on n’est pas capable de payer, on lance le dé et on regarde ce qui se passe. Parfois on a de la chance et on ne bouge pas, parfois on doit tout de même reculer sur l’une ou l’autre case, plus ou moins distante.

Ce micro-changement rajoute un petit côté pari qui débloque le jeu : je ne suis pas capable de payer, mais j’essaie quand même. Avec 1 chance sur 6 de ne pas bouger, c’est peu, mais cela permet de fluidifier le jeu et surtout, de rendre le titre encore plus familial. Les adultes calculeront, les enfants s’amuseront (ou le contraire).

Un changement de règle à peine perceptible, et pourtant qui change radicalement le jeu pour le rendre beaucoup plus simple, beaucoup plus fluide, beaucoup plus intéressant, beaucoup plus équilibré, beaucoup plus mieux bien. Si c’est possible, parce que le titre d’origine était déjà vraiment, vraiment bien. On se demande comment à l’époque on a pu jouer sans.

Deux moins bons changements

Deux moins bons changements par rapport à la version d’origine, mais purement cosmétiques. À commencer par la boîte. Celle-ci était rectangulaire en 2007. Celle de 2021 est carrée. Et alors ? Dans le jeu d’origine, la boîte ressemblait à un coffre à trésor. Forme, illustration, le tout était cohérent. Là, la boîte des Space Cowboys fait un peu « pâle figure ». Même si les illustrations de Mathieu Leyssenne sont toujours du grand art.

Et enfin, les règles. Celles du jeu d’origine étaient composées en carte à trésor. Le format était alors du A4 A3 A2 A1 A0 qu’on dépliait, comme une carte, pour lire les règles. Encore une fois, le tout était cohérent, immersif, pensé. Là, on a le droit à des règles, certes très bien écrites et avec un système malin de ventilation, d’onglets jamais utilisé précédemment sur le marché du jeu de société. Mais ce qu’on gagne en lisibilité, on le perd en immersion pirate.

Mais encore une fois, ces deux modifications de 2021 sont cosmétiques, Elles feront dire à toutes les personnes, qui, comme moi, possèdent encore le jeu d’origine, « c’était mieux avant. »

Des extensions

En 2008 sortait une mini extension avec quelques nouvelles cartes Trésor. Rien de méchant. Je suppose que Space Cowboys va les ressortir à l’occasion ?

En 2017, pour les dix ans du jeu, une plus grosse extension est sortie, The Crew, qui rajoutait des personnages et une couche plus stratégique. Est-ce que les Parisiens ont également prévu de la rééditer ?


Jamaica, verdict

Grandiose !

Fluide, familial, fun, l’un des meilleurs jeux de pirates, l’un des meilleurs jeux de course. Un excellent cadeau pour Noël 2021.

Note : 5 sur 5.
  • Auteurs : Bruno Cathala, Sébastien Pauchon, Malcom Braff
  • Illustrateur : Mathieu Leyssenne
  • Éditeur : Space Cowboys
  • Nombre de joueurs et joueuses : 2 à 6 (à éviter à 2, avec un bateau fantôme qui sert de joueur neutre. Indigeste. À 5-6 le jeu ralentit, mais devient encore plus fun. Mais ralenti. Mais fun. Mais ralenti. Mais)
  • Âge conseillé : Dès 8 ans (bonne estimation)
  • Durée : 45-60′ (bonne estimation)
  • Thème : Pirates
  • Mécaniques principales : Course, dés, ressources

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9 Comments

  • Toto titi

    Bonjour, je ne suis pas de votre avis sur les changements. Editer les règles du jeux sous forme de carte était sans doute thématique mais c’est vraiment une corvée si l’on veut retrouver un point de règle ; on ne sait jamais ou chercher. les nouvelles rêgles me semble bien plus pratiques.

  • Eric

    Je trouve dommage de modifier la règle qui faisait reculer le bateau quand on ne pouvait pas payer. Il était souvent intéressant de ne pas pouvoir s’acquitter du prix de la cas d’arrivée, car souvent, la case où l’on devait reculer était une cas contenant un trésor !

  • choubi

    Alors perso je ne suis vraiment pas d’accord pour le changement de règles sur les pénuries, de mon côté c’est un très gros point négatif.
    On perd en contrôle du jeu (avant on savait exactement où on allait reculer au moment de jouer sa carte, maintenant tu ne sais pas où tu vas reculer et ni même si tu vas reculer), on ajoute donc de l’aléatoire (à un jeu qui en a déjà beaucoup de base), on rend la pénurie moins punitive (on ne paye plus le coût de la case où on a reculé et on recule moins qu’avant quoi qu’il en soit)…
    Et surtout comme tu pouvais exactement calculer au moment de jouer ta carte où ta pénurie aller t’emmener, c’était justement souvent utilisé volontairement pour reculer sur une case souhaitée (comme celles comportant un trésor pas encore récupéré).

  • Adrien

    Bonjour,
    Je rejoint les avis sur l’effet des pénuries, et je suis étonné de l’empilage de superlatifs utilisé dans l’article pour décrire ce changement d’effet. C’est un truc amusant à faire que de gérer bizarrement ses cales pour ensuite être forcé de reculer sur une case arrangeante! C’est bien dans l’ambiance, ça me fait penser aux ruses qui jalonne l’excellente bd Barbe Rouge de Charlier/Hubinon. De même pour le coffre et la carte, aucune justification sinon industrielle je pense, car boîte maintenant c’est carré sinon rien, et cette histoire de règle  » pas pratique » c’est vraiment de la mauvaise foi, c’est bien un jeu où l’on n’a pas besoin de revenir à la règle tellement elles sont simples et concises. J’ai l’impression que c’était l’occasion de placer une nouveauté (le livret à onglet) plus qu’autre chose, à entendre les responsables en parler.
    Quitte à ré-éditer, rapatrier la prod’ aurait été un truc un peu sensé, mais bon, SC, donc Asmo, donc paie ta major.
    Excellent jeu au demeurant, vraiment tout public, et un de ces jeux où le nombre de joueur ne rallonge pas (trop) la partie. A noter qu’en Suisse il se trouve très facilement d’occas’ chez Caritas, Emmaüs, etc, j’imagine qu’une compagnie d’assurance maladie bien connue (il y a son logo au dos de la boîte) l’avait promu/offert/refourgué pour pas cher et a du largement contribuer à le répandre dans le pays.

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