Critiques de jeux,  Jeux de plateau

Khôra, jeu de pistes sublime

Khôra est le tout nouveau gros jeu pour Gamer chez Iello. Une embardée prodigieuse dans la Grèce Antique.


Khôra

Khôra, ça vous dit peut-être quelque chose, c’est ce gros jeu de plateau destiné à un public expert, averti, Gamer, sorti il y a quelques jours chez Iello.

Dans Khôra, on incarne une ville dans la Grèce Antique qu’on se délecter à développer : militaire, commerce, culture. Notre ville est aux prises, en proie à d’incessantes calamités, menaces et autres événements difficiles, douloureux et dangereux qui apparaissent à chaque début de manche, mais résolues en toute fin pour mieux s’y préparer. Une pioche d’événements, une planification pour l’affronter.

Le pitch officiel : « Dans la Grèce antique, les cités-États rivalisent de richesse et de puissance. À vous de mener votre cité à la gloire en exploitant ses atouts ! Politique, économie, arts militaires et culture : prenez les bonnes décisions et faites rayonner le nom de votre khôra sur l’ensemble du monde grec !« 

Grèce Antique, ville, développement, événements. Jusqu’ici, rien de bien original me direz-vous. Et pourtant. La mécanique de base de Khôra repose sur une mécanique maline de programmation. Secrète, activée au moyen de dés, elle permet de planifier deux, voire trois actions par tour, pour résoudre telle ou telle action : augmenter ses impôts, ses citoyens, sa force militaire, et progresser sur un nombre incalculable de pistes divers et multiples.

Pour jouer à Khôra, il faut avoir le cœur bien accroché, les nerfs solides et les synapses bien échauffés. Tout au long de la partie, il faut gérer ses dés, son pécule, ses cartes, et surtout, ses innombrables pistes. Percée par-ci, retard par-là, dans Khôra, il faut savoir doser et encaisser ses avancées pour gérer spécificités ou saupoudrages. Je me spécialise dans l’économie, ou j’essaie d’équilibrer mon développement ?

Si le jeu propose un matériel somptueux, riche, vaste, ample et pléthorique, avec des règles plutôt touffues mais somme toute limpides, la première manche tourne au ralenti. Puis, subrepticement, la partie s’accélère pour prendre un rythme de croisière, effréné.

Deux dés, deux actions, et c’est tout. À jouer dans l’ordre de ses actions retenues, l’une après l’autre, les uns après les autres à la table. Khôra surprend, par son format, ample, complexe, aux règles et mécaniques pourtant fluides et instinctives. Un jeu qui marie maximalisme et minimalisme. Des jeux pareils, on en redemande !


Khôra, les écueils

Si Khôra propose une expérience de jeu unique et passionnante, il n’est pourtant pas exempt de quelques écueils.

Pas de narration

Si une certaine recherche et cohérence historiques ont été apportées au jeu, chaque cité présente par exemple un riche historique, Khôra n’est, et de loin, pas une expérience immersive, narrative.

Le thème est présent, mais on finit par ne plus s’y intéresser. Au final, on manipule des cartes, des pistes, et tant pis pour la véracité historique, antique. Khôra est un pur jeu dit à l’allemande, aux mécaniques certes ripolinées, mais désincarnées. Des actions militaires ? Oui, mais pourquoi, et contre qui ? Des avancées culturelles ? Oui, mais en quoi ?

On essaie de nous vendre un jeu narratif, cohérent, historique, alors qu’on final, on ne fait qu’avancer des pions sur des pistes.

👉 À lire également : Les jeux de société de l’Antiquité.

Peu de tension, d’interaction

Soyons honnêtes, dans Khôra, on joue les yeux rivés, rivetés sur son développement, sur sa position sur les multiples pistes. Même l’action militaire, ordonnée selon les deux pistes militaires, n’impliquent pas les autres. On joue dans son coin de cité grecque, ce qui en fait un jeu polaire. Un IGUS au ras des pâquerettes.

Win to win

Le win to win, c’est quand quelqu’un prend de l’avance dans le jeu, et continue d’en prendre, pour distancer les autres qui ont toutes les peines du monde à combler le fossé qui se creuse, qui se creuse. Win to win, plus on gagne, et plus on gagne. Ce qui finit quelque peu par déséquilibrer le jeu. C’est le cas dans Khôra.

Selon ses lancers de dés, on peut se permettre ceci, cela, et en bénéficier plus tard pour effectuer d’autres actions lucratives, stratégiques.

Un jeu classique dans son originalité

Le marché du jeu de société compte déjà de nombreux jeux stratégiques semblables, qui proposent moult pistes et voies stratégiques possibles. Khôra est tout autant original que classique et déjà-vu : pistes, cartes, civilisations antiques.

Et pourtant

Et pourtant, malgré tous ces écueils, sans trop savoir comment, quand, Khôra parvient à enchanter, à passionner. On a envie de re-re-rejouer, pour essayer d’autres stratégies, d’autres cités, pour améliorer son score.

Khôra, verdict

Très, très bon !

Une expérience fulgurante et intense qui sublime le jeu pour Gamer.

Note : 4 sur 5.
  • Auteur : Head Quarter Simulation Game Club
  • Éditeur : Iello
  • Illustrateurs : David Chapoulet & Jocelyn Millet
  • Nombre de joueurs et joueuses : 2 à 4 (tourne bien à toutes les configurations)
  • Âge conseillé : Dès 14 ans (bonne estimation)
  • Durée : 60′ (bonne estimation)
  • Thème : Grèce antique
  • Mécaniques principales : Programmation, dés, stratégie

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10 Comments

  • Fred Z.

    Bonjour,

    Merci pour cette critique. Ce jeu me tente, mais je n’arrive pas à lire ou entendre quelque chose qui va faire la bascule. Je joue à deux avec ma femme, on est plutôt adepte de ce genre de jeux, mais j’ai l’impression que la conclusion est qu’il est pas mal pour un jeu bien, ou bien pour un jeu pas mal, résumé pour moi dans votre phrase « Khôra est tout autant original que classique et déjà-vu ». Il faut sans doute que je change mon point de vue pour essayer de trouver comment « Khôra parvient à enchanter, à passionner » 🙂 Merci en tout cas pour votre article, comme d’habitude c’est très plaisant et vraiment bien pensé.

  • Nikolarson

    Moi perso, avec des amis, on a deux solutions pour rendre le jeu moins déséquilibré. La première c’est de prendre dans les 5 cartes politique de base, une carte fin de partie, carte one shot et carte avec effet passif. Dans ce sens, on commence tous avec une carte de chaque. Et les deux autres cartes, on les pioche au hasard. Ou alors, on fait une phase de draft en piochant 5 cartes. Dans ce sens et selon peut être notre cité choisie, on peut choisir et rendre équitable la distribution des cartes. Il faut dire que Khora a un déséquilibre sur les cartes assez notables. Si un joueur a de bonnes cartes fin de partie, c’est dur…
    Après pour les cités, je pense qu’on ne peut pas jouer avec certaines cités en même temps. Certaines sont plus fortes que d’autres. Il faut choisir et équilibrer la partie en choisissant bien au début lesquelles rapporte plus que d’autres et plus rapidement de points. A voir aussi de ce côté là. En ce sens, il va y avoir une extension qui devrait proposer une interaction entre les joueurs, des cartes événements autre que de comparer la piste d’armée, de nouvelles cartes politiques et un nouveau système ou modules supplémentaires. Mais déjà, si vous faîtes ça avec les cartes politiques, c’est déjà pas mal. 👍

    • Lozy

      Salut Nikolarson , j’ai adoré ton com , je ferais le coup de la draft pour que ce soit plus equitable car en effet il y a un gros defaut d’equilibrage dans le jeu .

      Ma question ou du moins ma demande est : peux tu me dire quelles sont les villes qui selon toi sont trop forte et à ne pas associé avec les autres pour rendre le jeu plus equitable .

      Merci d’avance !

    • Gus

      Oui je confirme Guillaume. Que je me suis planté 😅. Il s’agit plutôt de 60’, vous avez bien fait de poser la question. C’est corrigé, grâce à vous 🙏🏼

  • Fabrice

    Hello, idem, merci G&C pour cet article ! Moi aussi sur le papier le jeu me tentait beaucoup mais après avoir vu une vidéo sur les règles et un début de partie, j’ai complètement été refroidi à cause du lancé de dés. En gros, si j’ai bien compris, il faut faire des valeurs hautes pour faire plus d’actions. Si ce n’est pas le cas alors… tant pis, pas de compensation pour les mauvais jets de dés ! Et les enchainer c’est la galère assurée ainsi qu’une bonne frustration si l’adversaire nous sort des 6 ! Je ne comprends pas du tout de l’intérêt de cette mécanique dans un jeu de gestion… j’espère juste avoir mal compris cette phase de jeu car sinon le jeu à l’air vraiment sympa.

    • Gus

      De rien Fabrice.

      Alors non, si je peux me permettre, non, les dés ne vont pas déterminer le nombre d’actions disponibles, mais le genre d’actions. Plus la valeur du dé est élevé et plus on a le choix, mais c’est tout. Tout dépend ensuite de sa planif.

      Le seul hic, c’est qu’on peut avoir prévu un prochain tour de ouf, qui s’effondre avec un « mauvais » lancer de dé.

      Les dés rajoutent ici une once d’inconnu.

  • Aleiks

    J’ai lu quelques retours disant que l’axe de développement militaire était trop prépondérant. Ça me dérange un peu que dans un jeu, une orientation définie soit impérative pour scorer (ou à éviter absolument).

    Ca me rappelle Descendance qui sans l’extension du Port, il était plus que déconseillé de perdre son temps dans les voyages…

    Là à l’inverse, il semblerait que tout doit être concentré sur le militaire.

    • Gus

      C’est malheureusement faux. Malheureusement. Pour ma poire. J’ai souvent joué militaire, et je me suis fait laminer par d’autre voies. Toutes les voies sont bien équilibrées, il faut juste juste voir ce que les autres font. Et tout dépend de la cité gérée. Sparte donne un avantage en militaire, mais pas les autres. Bref, donc non.

  • lemanchotfou

    Retours après 6 parties : j’ai rencontré un problème à la compréhension des règles : débloquer le 3ème dé confère une troisième action possible (on doit le déduire lors de la lecture des règles, je trouve que ce n’est pas dit explicitement et j’avais compris que le troisième dé permettait de remplacer un résultat pas avantageux de l’un des autres dé). Ensuite, ce que je trouve dommage, c’est que chaque partie se transforme en course pour monter le plus vite possible chacun de ses curseurs, en économie, culture et militaire, aidé par certaines cartes. On a un peu l’impression de faire toujours la même chose pour espérer gagner. Et je me permets de ne pas être tout à fait d’accord, le militaire écrase tout en terme de point : jouer Sparte et ne faire que des conquêtes, pour l’avoir testé, on dépasse les 100 points sans se fatiguer à réfléchir. Alors qu’en face ça joue plus culture et économie en optimisant chaque action du mieux possible pour le même résultat à peu près. Même les événements, pour beaucoup d’entre eux, donnent un petit avantage pour celui qui a un niveau militaire élevé. Et dernier point, j’ai trouvé que les améliorations de chaque cité n’étaient pas équitables dans le sens où certaines ont des effets infinis qui ne « coûtent » pas cher à débloquer et d’autres ont des effets ponctuels qui ne sont pas « dingues ».

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