Critiques de jeux,  Jeux de plateau

Nyctophobia. Promenons-nous dans les bois, tant que le tueur n’y est pas

Nyctophobia, de quoi ça parle ?

Les plus anciens d’entre nous se souviendront de Promenons-nous dans les bois, ce film français sorti en 2000, surfant sur la vague slasher qui déferlait des Etats-Unis, avec Clotilde Coureau dans le rôle principal…

4 joueuses, perdues dans les bois. 1 tueuse. 1 voiture.

Nyctophobia, c’est ça.

Comment ça marche ?

Au milieu de la table, un plateau avec des creux et des arbres qui séparent les creux et créent des chemins. 5 pions sur le plateau, représentant les proies et le chasseur, et une voiture, but des proies.

Les joueuses perdues (ou proies) portent des lunettes qui vont les aveugler, elles ne pourront pas voir le plateau, seulement le toucher.

A son tour, une joueuse peut sentir slash toucher les cases qui entourent son pion, puis doit se déplacer (si le chemin n’est pas obstrué par des arbres). Elle peut à nouveau sentir les cases qui l’entourent et doit se déplacer. Elle peut alors effectuer une action supplémentaire (se cacher, courir, …).

La chasseuse va elle chercher à attraper les proies. Elle voit le plateau, mais ses déplacements sont régis par des cartes, et elle doit se déplacer vers le « son » (provoqué par une action des proies), s’il y en a un sur le plateau.

Les combats se déroulent lorsque deux joueuses antagonistes sont sur des cases adjacentes. Chaque proie a deux points de blessure, et meurt s’il ne lui en reste plus.

Et comment on gagne ?

Les proies gagnent si l’une d’entre elles rejoint la voiture, et que toutes survivent encore un tour.

La chasseuse gagne si elle tue une proie.

Simple.

Interaction ?

Oui, mais modérée.

Les joueuses doivent rester attentives pour reconstruire mentalement le plateau de jeu en fonction des indications des autres joueuses, et des indications de la chasseuse (qui fait aussi office de maîtresse de jeu).

Mais la plupart du temps, on se passe à attendre son tour, dans le noir…

Alors oui, le but de la MJ est de retrouver et bastonner les proies, donc on pourrait s’attendre à une forte interaction, mais les proies, elles, ne font pas grand chose / rien entre elles. Elles peuvent et vont communiquer, mais le tout reste vague, comme tout le jeu, d’ailleurs

Un 3/5 sur l’IGUS, l’échelle de mesure de l’interaction dans les jeux.

A combien y jouer ?

Bonne question.

A 5, c’est longuet, les proies passent leur temps à attendre.

A 3 ou 4, il y aura plus d’action, mais aussi moins de chances de perdre, le nombre d’actions de la chasseuse étant réduit.

Alors, c’est bien ?

J’aurais aimé dire oui, car dans Nyctophobia, tout est original: un concept, jouer à l’aveugle contre une joueuse, des illustrations très « Sin City » de Frank Miller, un matériel insolite entre jouet, Quarto et jeu de plateau.

Mais non. Non, Nyctophobia, n’est pas un bon jeu.

L’idée est intéressante et inclusive, il faut le relever. C’est un jeu développé pour que l’oncle aveugle de la créatrice puisse jouer sans adaptation. Enfin un jeu pour inclure les personnes affectées d’une déficience visuelle. Et des jeux inclusifs, il y en a vraiment peu sur le marché du jeu de société.

Mais la mise en œuvre est ratée.

Le jeu est brouillon, vague et approximatif et les joueuses vont souvent toucher d’autres parties du plateau en tâtonnant, gâchant un peu la surprise et le déroulement du jeu.

On attend la fin, et on est content quand elle arrive (parce qu’on n’a aucune idée de quand ça va se finir, puisqu’on ne voit rien).

Et encore une chose

Les règles sont vraiment, vraiment peu affriolantes.

Denses, touffues, compactes, peu lisibles, inutilement tarabiscotées, un exemple de ce qu’il ne faut pas faire avec des règles de jeu.

Vous pouvez consulter les règles de Nyctophobia en anglais ici pour vous en rendre compte.

Et encore une dernière chose

Le jeu propose de mettre en scène / jeu soit un tueur en série, soit un magicien qui veut attraper les autres.

Le magicien pourra être utilisé avec un public plus jeune, plus sensible, qui n’a pas forcément envie de se faire courser par un fou furieux armé d’une hache aiguisée.

Score :

Anticipation : 4/5

Un jeu d’horreur dans les bois, avec les yeux fermés ? Ça a l’air trop bien. 

Pendant la partie : 1/5

Je touche, je me déplace, je ne sais pas où je suis, j’attends, je pense à autre chose, je suis perdue. C’est bientôt fini ?

Après la partie : 1/5

Aaaaaaaah. On fait autre chose ? 

Score global : 2/5

C’est dommage. C’est une bonne idée, un concept qui détonne. Mais c’est raté. Vraiment. Le matériel n’est pas pratique, les joueuses s’ennuient et/ou sont frustrées, il n’y a pas de stratégie, tout se fait au petit bonheur la chance.

C’est non. Et encore une fois, c’est dommage.

Vaste gâchis.

Et encore une toute dernière chose

Vous pouvez consulter les règles de Nyctophobia en anglais ici

Et vous pouvez trouver Nyctophobia chez Philibert ici

  • Date de sortie : 2018
  • Langue : Français
  • Auteure : Catherine Stippell
  • Illustrateur : Peter Wocken
  • Editeur : Pandasaurus Games
  • Nombre de joueurs : 3-5 (optimum: 3)
  • Age conseillé : dès 9 ans (plutôt 14, vu le thème anxiogène)
  • Durée : 30-45′. Beaucoup trop, en réalité
  • Thème : Horreur, poursuite
  • Mécaniques principales : Toucher, mémoire, semi-« coopératif »
Votre réaction sur l'article ?
+1
0
+1
0
+1
0
+1
0
+1
0
+1
0

5 Comments

  • Sitthya

    Gus&Co est devenu une référence pour moi.
    Clair, concis, rapide, sans langue de bois.
    Clairement dans l’ère du temps, où on cherche un avis presqu’instantané en quelques phrases. Et s’il s’avère que la curiosité est titillée, libre à nous de creuser ailleurs pour confirmer/infirmer cette impression.
    Une belle porte d’entrée pour donner une couleur rapide à un jeu. Peut être désolant de « juger » un jeu avec si peu de mots mais presque nécessaire dans ce marché de plus en plus noyé par les nouveautés.

  • Vinz

    Bonjour Gus.

    Je me retrouve complètement dans votre avis.
    J’ai joué une seule fois à Nyctophobia, et qu’est-ce que ce fut looooooong…
    L’impression d’être complètement isolé à attendre, à m’ennuyer, et à ne pas savoir quand le calvaire se terminera. Même impression pour les personnes ayant joué avec moi.

    En fait, on peut considérer cela comme assez immersif, mais pas de la façon souhaitée.
    Pour moi un jeu de société est fait pour partager une expérience (autre que les jeux solos), et ce fut tout l’inverse avec ce jeu.

    Au passage, j’en profite pour vous féliciter vous et votre équipe pour la qualité de votre travail.
    Des critiques de jeux bien détaillées et très bien écrites, sur des jeux pas forcément encore sortis en VF ou sans grosse critique ailleurs ou presque, c’est super. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai connu Histoires de peluches, par exemple, dont j’ai ensuite attendu la sortie en VF avec impatience.

À vous de jouer ! Participez à la discussion

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

En savoir plus sur Gus & Co

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading