Critique de jeu : 20e siècle
Titre
Rarement un titre aura plus été évocateur et moins sexy.
Le titre d’un jeu fait office de carte de visite, d’appel à l’aventure, découverte géographique, mythologique ou historique. Avec 20e siècle, on fait dans le concret, pas dans le rêve. Même l’illustration sur la boîte ne fait pas trop rêver : camions, gratte-ciels, trains et cheminées. Ça ne donne pas trop envie d’y jouer.
Et pourtant, aujourd’hui au 21e, le 20e siècle fait office d’histoire. Et le thème est bien trouvé, puisqu’il va falloir gérer son pays, le développer, tout en limitant la pollution.
Bien mais pas top
Le jeu se démarque par sa fluidité, sa tension, son thème presque original, mais absolument pas par ses quatre mécaniques principales :
- enchères habituelles
- enchères par expulsion (Amun-Re, Constantinopolis, Cyclades, Peloponnes, Goldene Stadt)
- pose de tuiles adjacentes et connexions de réseau
- stop ou encore
On se trouve avec 20e siècle devant une bonne compilation de mécaniques galvaudées, éculées, et, au 21e siècle, plus originales ni captivantes. Au 20e, peut-être, on aurait trouvé le tout extraordinaire, mais plus tellement aujourd’hui.
Comment ça marche?
Le jeu est constitué de 3 phases distinctes.
En (très) gros, on enchérit pour acheter des tuiles au moyen de cartes d’argent. Quand on quitte les enchères, on a alors la possibilité d’acheter une tuile technologie qui rapportera quelque bonus. Puis on enchérit par expulsion pour s’éviter des catastrophes au moyen de cartes technologie, une autre monnaie, et enfin on consolide son pays, i.e. qu’on place les tuiles achetées dans son aire de jeu.
Rajoutez à cela la pollution représentée par des cubes en plastique gris foncé, logique, qu’on obtient à chaque fois qu’on achète des tuiles, ainsi qu’une échelle de pollution plus ou moins positive qui rapportera plus ou moins de points par tuile en fin de partie.
Le jeu tourne très bien, il est tendu, au final assez fluide, on joue en même temps contre les autres dans les enchères et en même temps contre le jeu, puisqu’à force de trop en vouloir et de mal gérer son pays, on risque bien d’être débordé par la pollution, d’où cette mécanique de « stop ou encore »: je prends encore des tuiles, ou je m’arrête ?
Soulignons également le fait qu’il y a zéro hasard dans le jeu, tout le monde commence avec la même tuile, avec les mêmes cartes, et que toutes les tuiles sont visibles.
Thème
Évidemment, les tuiles rapportent des points de victoire (la santé, symbolisée par le bâton d’Hermès pour Hippocrate) pendant la partie, mais également cartes d’argent, technologie & moyen de se débarrasser de sa pollution grâce à des centres de récupération. Le thème est relativement bien exploité, il est vrai qu’au 20e siècle on pensait plus à se développer qu’à le faire de manière intelligente et durable. Mais bon, faut quand même qu’on nous explique pourquoi passer par des enchères pour développer son pays…
Conclusion
En guise de conclusion, nous dirons que le jeu tourne bien, les règles sont claires et assez simples, on est toujours en train de se battre contre cette foutue pollution qui risque bien de nous coûter la victoire en inondant notre territoire. Le jeu est bien.
Bien mais pas top, car ces deux phases d’enchères, normale + par expulsion, se retrouvent décidément beaucoup trop dans la production ludique de ces cinq dernières années, on est en droit d’attendre un peu plus de renouvellement et d’originalité pour un peu plus de surprise et de plaisir.
Si le premier jeu de Vladimir Suchy était franchement moyen et très chaotique, League of Six, son deuxième jeu, Shipyard, sorti l’année passée, était juste excellentissime. 20e siècle déçoit quelque peu, même s’il n’est fondamentalement pas un mauvais jeu.
Conseils stratégiques
- Pour s’assurer la victoire, pensez à obtenir assez d’argent pour pouvoir vous acheter le plus de tuiles possibles à chaque tour, sachant qu’on ne peut en acheter que 5 fois, et que le prix de base augmente peu à peu. En fin de partie, chaque tuile vous rapportera entre 2 et 4 points, selon votre niveau général de pollution. Pour un bon départ, tablez sur des tuiles territoires avec 2-3 symboles argent ainsi qu’une tuile technologie vous rapportant un bonus d’argent aux tuiles adjacentes. Cela devrait vous permettre d’avoir un très bon cash-flow pour les autres tours qui distancera vos adversaires aux enchères. D’ailleurs, si tout le monde les quitte et que vous vous retrouvez seul, vous pouvez continuer à acheter les tuiles restantes pour leur prix de base, ce qui pourra s’avérer intéressant, même si cela vous donnera plus de pollution. Hop, une usine de recyclage, et c’est reparti.
- Les cartes technologie ne servent principalement que dans la phase d’enchères par expulsion pour s’éviter les catastrophes. Au final, elles ne sont pas si vitales que cela, donc inutile de vous battre pour vous en ramener beaucoup sur votre territoire.
- Train : il existe une tuile technologie extrêmement intéressante, le train. Elle vous diminue la pollution générale d’un niveau, logique puisque vous développez une mobilité non-polluante, et de plus et non des moindres, chaque tour vous pourrez déplacer une population sur une autre ville pour l’activer, du moment que votre réseau ferroviaire vous le permet. Le train est vraiment utile puisqu’il vous permet d’être flexible, d’activer une usine de recyclage ou une production, selon vos besoins.
- Ne vous laissez pas distancer. Les points de victoire sont décomptés pendant la partie en fonction du nombre de symboles acquis sur ses tuiles, et cela à chaque tour, 6 ici en l’occurrence. Pensez à en obtenir assez rapidement, sinon vous aurez beaucoup de peine à rattraper les autres en fin de partie au moment du décompte final.
2 Comments
Julien
Damned, moi qui me réjouissais! Dommage que le thème ne soit pas mieux servi par des mécaniques innovantes!
Gus
Oui Julien, un peu déçu. Gérer son territoire, le développer, tout en le faisant de manière durable sans pollution, aurait pu être plus riche. On est vraiment dans le stratégique, mais les mécaniques déçoivent quelque peu. Beaucoup trop d’emphase sur les enchères.