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Comment Games Workshop est devenu plus rentable que Google

Les jeux de plateau, tirés d’un mélange d’univers de science-fiction et de fantasy, ont vu leurs ventes augmenter pendant le confinement. Retour sur la saga Games Workshop.


Games Workshop

Si vous évoluez dans le monde du jeu de plateau, à un moment ou à un autre, vous avez forcément entendu parler de Games Workshop. Cette entreprise, britannique, est à la base de licences très connues dans le milieu, dont Warhammer.

Le fameux journal The Guardian a consacré un article intéressant sur le sujet hier samedi 31 juillet. Nous vous en proposons ici une traduction, ça peut vous intéresser.

Comment Games Workshop est devenu plus rentable que Google

The Guardian, samedi 31 juillet 2021, par Sarah Butler.

Tout a commencé dans un petit appartement de l’ouest londonien, avec trois amis qui vendaient des jeux de société et un fanzine par correspondance ; maintenant Games Workshop vaut plus que Marks & Spencer et Asos et est plus rentable que Google.

Cette semaine, la société basée à Nottingham, qui produit la marque de jeu de rôle fantastique Warhammer, a annoncé que tous ses employés obtiendraient une prime de 5 000 £ (un peu moins de 6’000 euros) avec la hausse des ventes et des bénéfices pendant la pandémie.

Dirigée par Kevin Rountree, un ancien comptable qui fuit la presse, la firme compte Ed Sheeran, l’acteur de Fast & Furious Vin Diesel et Superman parmi sa légion de fans – l’acteur britannique Henry Cavill, qui incarne le héros de bande dessinée à l’écran, a révélé son amour pour Warhammer dans un post Instagram pendant le confinement de l’année dernière, dans laquelle il a avoué une dépendance à la collection de figurines de Games Workshop, les décrivant comme du « crack de plastique ».

>>> À lire également : Comment peindre des figurines en toute simplicité. Petit guide pour bien débuter

Petit historique pour grande société

La société a été fondée il y a plus de quatre décennies lorsque des amis, John Peake, Ian Livingstone et Steve Jackson ont commencé à créer leurs propres jeux de société en bois et à créer un bulletin d’information sur les jeux. Ils ont trouvé leurs marques lorsque le créateur américain de Dungeons & Dragons leur a demandé de devenir le premier distributeur britannique du jeu de rôle.

Le premier magasin Games Workshop a ouvert ses portes [dans le quartier au sud-est de Londres] Hammersmith en 1978 et a commencé à produire des modèles de figurines pour wargames avant, en 1983, de lancer Warhammer, qui met en scène des batailles sanglantes entre orcs et elfes.

De ces « soldats » de jouet mis au goût du jour basés sur un mélange de science-fiction et du monde fantastique des elfes et des orcs, Warhammer est désormais une marque mondiale de livres, de jeux vidéo, un magazine, des animations et une émission télévisée prévue. L’entreprise possède aujourd’hui 523 magasins dans le monde, où les fans peuvent apprendre à créer et peindre des figurines, ou jouer au jeu.

Les collectionneurs construisent de grandes armées à jouer avec des figurines en plastique, qui peuvent coûter plus de 100 £ [120 euros] chacune. Une figurine peut être composée de centaines de pièces qui doivent être assemblées puis peintes avec des couleurs telles que « chair » et « os ».

Cela peut être utilisé pour jouer des affrontements sur un champ de bataille sur plateau à la maison ou lors d’événements, bien que certains fans ne jouent jamais et s’affrontent plutôt pour montrer leurs versions créatives de figurines.

Le riche récit derrière le jeu est une autre source de revenus avec des livres, un magazine et du contenu en ligne qui tiennent les fans informés. Le groupe travaille au développement d’Eisenhorn, une série télévisée de science-fiction et de fantasy en direct avec Frank Spotnitz, le producteur américain de The X Files.

>>> À lire également : Le secret du succès de Games Workshop ? Une petite stratégie qu’ils appellent la domination mondiale totale.

Des sousous dans la popoche

Les derniers comptes montrent que l’année dernière, la société a réalisé un chiffre d’affaires de 361 millions de livres sterling [423 millions d’euros] et une marge bénéficiaire d’exploitation de 43%, supérieure à la marge d’environ 25% du propriétaire de Google, Alphabet Group.

Concevoir, fabriquer et vendre la grande majorité de ses produits en interne signifie que le groupe n’a pas besoin de remettre une partie des bénéfices à des tiers tels que des propriétaires d’usine ou des détaillants.

Cours de l’action Games Workshop. Crédit : Refinitiv

Ces dernières semaines, la nouvelle du succès de l’entreprise a incité certains anciens travailleurs à s’inquiéter des bas salaires de l’armée de créatifs qui conçoivent les jeux et créent de nouvelles figurines. Ces plaintes semblent toutes avoir disparu il y a plusieurs années, et l’entreprise verse désormais régulièrement des primes sur les bénéfices et propose un programme d’épargne en actions au personnel ordinaire.

Livingstone, qui vient d’écrire un livre sur ses premières années, dit que le succès de Warhammer est son « métaverse » – un monde dans lequel les fans peuvent s’immerger complètement.

Le magazine White Dwarf de Games Workshop, qui a commencé à écrire sur les jeux de rôle que les fondateurs aimaient, s’est avéré être un coup de génie, aidant à créer la demande d’une base de fans fidèle.

« Les soldats de plomb traditionnellement simplistes sont devenus un loisir. Vous pouvez toujours acheter quelque chose, qu’il s’agisse d’une figurine, d’un pot de peinture ou d’un livre de règles », dit-il.

Livingstone, qui a vendu sa participation dans Games Workshop en 1991 et est maintenant président du développeur britannique de jeux vidéo Sumo Group, affirme que le groupe a également bénéficié d’une montée en puissance de la culture geek, en partie due au succès des entrepreneurs technologiques derrière les likes de Google et Facebook. Internet a également permis aux fans potentiels de jeux complexes de se trouver plus facilement et d’apprendre à jouer.

Le secteur mondial des jeux de plateau dont Warhammer fait partie vaudra 12 milliards de dollars [10 milliards d’euros] d’ici 2023, contre 7,2 milliards de dollars en 2017, selon la société de données de consommation Statista, avec de nouveaux entrants capables de lever des fonds auprès de passionnés via des plateformes telles que Kickstarter.

Au moins 10 000 fans de jeux devraient se rendre au centre de conférence NEC de Birmingham ce week-end pour la première UK Games Expo en deux ans et plus de 200 exposants présenteront leurs jeux.

Kate Evans, de Games Expo, déclare : « Nous voyons de plus en plus de familles arriver chaque année. Les gens recherchent un moment de qualité avec plus pour votre argent et plus social, avec des gens qui se parlent. »

Ces dernières années, l’intérêt pour les jeux de plateau a été alimenté non seulement par un intérêt accru pour les activités à domicile pendant la pandémie, mais aussi par la série Netflix Stranger Things, où les personnages sont fans de Donjons & Dragons, et par des émissions YouTube telles que Tabletop, dirigée par Wil Wheaton.

« On nous disait que nous étions des geeks, des nerds ou des anoraks à mépriser [NdT : le terme d’anorak est un terme britannique en argot qui fait référence à une personne qui a un intérêt très fort, peut-être obsessionnel, pour des sujets de niche. Cet intérêt peut être méconnu ou mal compris du grand public. Le terme est parfois utilisé comme synonyme de « geek » ou de « nerd »]. Maintenant, c’est devenu plutôt cool », dit Livingstone. « Il y a une énorme résurgence des jeux de société. Les gens aiment s’amuser en société et communiquer avec les gens tout en se poignardant dans le dos.


Petit rajout : comme le stipule l’article, Games Workshop a donc distribué 7 000 $, soit un peut moins de 6 000 euros de primes à chacune et chacun de ses 2 600 employés après un boom des ventes suite à la pandémie. C’est plus que Microsoft et Facebook !

Games Workshop a en effet enregistré une augmentation de 70% de ses bénéfices après que la demande pour ses figurines ait monté en flèche pendant la pandémie.

Pour faire face à la forte demande pendant la pandémie et les multiples confinements, Games Workshops a dû mettre en place des équipes de nuit et des équipes de week-end supplémentaires dans ses deux entrepôts britanniques.

Les cadres supérieurs de l’entreprise se partageronnt également un bonus de 1,1 million de livres sterling, soit 1,3 millions d’euros, contre 300 000 livres sterling, soit 350 000 euros l’année dernière.

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