Jeux de plateau

Critique de jeu : Dark Darker Darkest

presentation

Dark Darker Darkest (DDD, pour les intimes) est sorti à minuit (forcément, pour un jeu d’horreur) en octobre 2013, créé par David Ausloos (Panic Station) et George Romero, chez Queen Games (Amerigo, Lancaster). Avec un supplément de tripes.

DDD est un jeu coopératif pour 2 à 5 joueurs, d’une durée de 2 à 3h dès 10 ans (mouaif, je dirais plutôt 18 ans quand même vu le thème gore).

theme

Dans DDD les joueurs pénètrent dans un manoir pour piquer un somme récupérer un sérum contre Miley Cyrus une apocalypse zombies. Sauf que, surprise, le manoir est bourré de gens pas très gentils, notamment des assureurs inspecteurs des impôts zombies et autres viles créatures (mais pas Miley Cyrus. Ouf).

Le thème de DDD est excellemment bien rendu et intégré. On voit bien que l’auteur est d’abord parti du thème pour ensuite développer des mécaniques. Et c’est appréciable, on n’a clairement pas ici affaire à un jeu Glue (un jeu Glue?). DDD parvient véritablement à transporter, immerger les joueurs dans une apocalypse zombies pour les perdre dans un manoir terrifiant. Kudos David (Ausloos) !

materiel

Attention, DDD c’est du lourd ! Grosse boîte gros matos. La preuve dans l’Open-the-Box:

Le matériel de DDD est superbe, les illustrations sont vraiment gores et inquiétantes. La boîte, même si elle n’a pas de thermoformage, a des illustrations internes immersives, fait plutôt rare dans le milieu du jeu.

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Comme il s’agit d’un jeu Queen Games (un jeu Queen Games?), il faut s’attendre à des erreurs de trad ou du matos avec des fautes. Et c’est de nouveau le cas. Mais pour une fois, il n’y a que 2 erreurs, et non pas 417 comme dans Amerigo. La vf est sans faute, Queen a certainement enfin décidé d’investir dans une réelle traduction française réalisée par un réel francophone et pas par google trad. Est-ce que c’est parce qu’Asmodée distribue maintenant Queen dans l’Hexagone qu’ils ont décidé de rehausser le niveau? En tout cas, il y a du progrès. Mais deux erreurs subsistent, il s’agit de deux erreurs qui concernent deux personnages, des erreurs maladroites qui demandent aux joueurs d’aller sur le site télécharger la FAQ, en anglais, ici. D’ailleurs, si quelqu’un veut la traduire en vf, n’hésitez pas, nous la publierons.

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Et pourquoi pas un zombiecat, d’abord?

Après, je pinaille vous allez me dire, mais les figurines des monstres sont un peu cheap: pas très robustes ni très détaillées ni vraiment inquiétantes, on aurait pu faire mieux, surtout pour le prix du jeu (près de 80 CHF / 60 euros). Après, si on n’est pas une grosse flemme comme moi, on peut toujours s’amuser à les peindre.

mecanique

Oh là là,  DDD est bourré de mécaniques diverses et variées. Mais en gros : il s’agit d’un jeu à points d’action. Les joueurs / personnages disposent d’un certain nombre d’actions par tour, représentés par des cubes, qui leur permet de se déplacer, attaquer, fouiller, ouvrir des portes codées et enfin éteindre le feu. Élément intéressant, plus un joueur est blessé moins il dispose de points d’action.

Les combats ainsi que l’apparition des méchants et l’IA, tout est réglé au dé. Donc beaucoup de hasard, mais évidemment maîtrisé car plus les armes sont puissantes plus elles permettent aux joueurs de lancer de dés, donc d’avoir des chances de toucher. Logique.

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Je vous présente Jean-Hugues Mortimer, mon dentiste

En fait comme dit plus haut, là, juste en haut, vers la gauche, le jeu est bourré de mécaniques diverses : si les joueurs se font mordre, par les zombies je précise, ils risquent de se faire contaminer et devenir des zombies à leur tour. Pour cela il leur faudra trouver un vaccin. Logique.

Dans DDD il y a également des caméras, car oui, il y a un méchant qui surveille les personnages, caméras qui rajoutent une menace / tension car si elles voient les joueurs, ceux-ci doivent lancer les dés et éviter des bricoles.

On vous avait prévenus que Joey Starr était super fort contre les zombies
On vous avait dit que Joey Starr était super fort contre les zombies

Mais je n’ai pas encore fini, il y a aussi les codes pour ouvrir les portes verrouillées, qui obligeront les joueurs à récupérer des objets avec les symboles correspondants pour parvenir à déverrouiller la serrure. Bon je vais m’arrêter là.

En fait, on passe ses 4-5 premiers tours le nez dans les règles, car si tout est au final plutôt fluide et clair, il y a quand même énormément de situations qui demandent vérification : propagation du feu, signification des dés, créatures, etc. DDD est quand même un gros jeu, avec beaucoup d’éléments à maîtriser, mais tout s’imbrique parfaitement.

Les règles hyper brèves

interaction

DDD est un jeu coopératif. Donc on coopère. Donc on interagit beaucoup. Pas un jeu Frigo (un jeu Frigo?).

public

Casual Gamers : j’en doute vraiment, car le jeu est touffu, long et complexe, il y a énormément de points de règles à maîtriser. A moins qu’il y ait un maître de jeu qui gère tout et qui laisse les joueurs se débrouiller avec le minimum, mais dans ce cas-là, à quoi bon jouer à DDD. Pour un excellent jeu coopératif familial, mieux vaut choisir l’Ile Interdite par exemple.

Party Gamers : mais oui bien sûr, on change le thème, plutôt que des zombies on les remplace en fait par des danseurs et on doit réaliser la meilleure choré dans la maison disco sur une chanson d’ABBA. Non je déconne. DDD n’est PAS un party-game.

Hobby Gamers : clairement. Les HB ont l’habitude des jeux à points d’action et aux règles touffues, ça ne devrait pas trop poser de problèmes. Mais DDD est du lourd quand même.

conclusion

Core Gamers : d’après moi, le public-cible. DDD est vraiment ce qu’on appelle un pur jeu ameritrash, bourré de figurines et de règles de tous les côtés pour placer un thème fort. Tout ce que les Core-Gamers apprécient en fait, surtout avec des parties de 2-3h de long. DDD risque toutefois de souffrir d’un souci avec ce public: les Core n’apprécient pas tellement les dés car le hasard empêche toute stratégie. Et dans DDD on les lance très très souvent, ce qui rend le jeu extrêmement tactique et peu stratégique, il faut continuellement s’adapter aux situations qui évoluent rapidement.DDD est un  bon jeu. Ce qui le rend bon, ce sont les diverses mécaniques, presque réalistes, qui parviennent littéralement à placer les joueurs dans cet univers gore et angoissant. La gestion des munitions, ou l’avancée de la contamination quand on a été mordu.

Et autre point positif, au contraire de Zombicide par exemple, on ne peut jamais être éliminé de la partie. Si son personnage meurt, il devient zombie, chouette, et on rentre dans le manoir avec un nouveau personnage, mais sans tout son matériel, pas chouette. Bref, dans DDD on a véritablement l’impression de rentrer dans un film d’horreur ou de participer à une Zombies Invasion sur plateau.

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Les toilettes, c’est au fond à droite, mais faites gaffe de pas glisser sur les tripes

Mais DDD est le 883ème jeu de zombies (la déferlante zombies dans le milieu du jeu) à paraître, et que ça commence un peu à faire beaucoup là, il serait enfin temps de varier les thèmes. Moi je demande vraiment à voir un jeu coopératif Barbapapas pour changer. N’empêche, DDD parvient quand même à apporter un peu de sang neuf au genre en introduisant des mécaniques passionnantes : munitions, infection, tension croissante avec fin en apothéose.

L'abus de chocolat est vraiment mauvais pour la peau, ça file une sacrée acné, la preuve
L’abus de chocolat est vraiment mauvais pour la peau, ça file une sacrée acné, la preuve

Quelques éléments viennent toutefois ternir le jeu :

1. il n’y a pas d’éléments narratifs. A part se balader dans le manoir, tuer des zombies et récupérer du matériel pour ouvrir des codes, je simplifie à l’extrême-là, au final je ne suis pas certain qu’on sorte le jeu 2’000 fois. Oui, certes, les verrous changent à chaque partie, les tuiles peuvent être placées de différentes manières, les dés ne sortent pas toujours pareil, mais quand on aura joué 2-3 fois, et réussi la mission, à part augmenter le niveau de difficulté on fera toujours pareil. C’est en fait le plus grand reproche qu’on peut faire aux jeux coopératifs, Yggdrasil, les Chevaliers de la Table Ronde, Ghost Stories, Pandémie et bien d’autres, leur aspect répétitif. D’ailleurs, ce n’est pas une surprise si tant de jeux coopératifs proposent des extensions, justement pour renouveler le jeu. Seuls certains s’en sortent bien : Zombicide avec les différents scénarios, même si au final on fait toujours la même chose, et surtout, clairement Robinson. Est-ce que ça vaut la peine de payer un jeu 80 CHF /60 euros pour n’y jouer que 4-5 fois pour finalement trouver le jeu répétitif?

2. il faut quand même bien 4-5 tours pour vraiment parvenir à en maîtriser tous les aspects. D’autant que toutes les phases de jeu nécessitent un apprentissage / compréhension. Même la fin de partie vient tout chambouler. Donc comptez plutôt une partie « à l’aveugle », le nez dans les règles, une partie d’apprentissage. Qui peut quand même passablement ruiner le plaisir du jeu.

3. des figurines qui font un peu « pâles figures » (mais c’est normal, ce sont des zombies. Ok je sors) dans un tel déluge de somptueuses illustrations. On n’a clairement pas affaire aux mêmes superbes pièces que dans Les Demeures de l’Épouvante ou Zombicide.

4. on passe sa partie à lancer des dés, pratiquement sans arrêt: pour activer les caméras, pour placer les zombies, pour déplacer le feu, pour fouiller, pour combattre. Le hasard est par conséquent omniprésent, et c’est quand même dommage car du coup le chaos règne constamment, on ne contrôle pas grand chose. Ca peut plaire à certains joueurs, pas à tous.

5. le risque flagrant d’avoir un King Speaker à la table, mais c’est un risque inhérent aux jeux coopératifs (à lire: comment gérer un King Speaker sans y laisser de dents)

like

Le thème, excellemment bien rendu et intégré. On a vraiment l’impression d’être plongé dans le manoir. Presque du jeu de rôle. Aussi immersif que Robinson, c’est dire!

Les superbes illustrations.

Aucune élimination.

Les caméras, qui rajoutent de la tension, et le système de verrous codés.

Le système de points d’expérience, déjà vu dans Zombicide, qui permet d’acheter diverses compétences spécifiques aux personnages.

Les différentes créatures qui viennent épicer le jeu, sachant qu’elles ont toutes, à part les zombies, différentes capacités / moyens pour les tuer.

Une tension allant en grandissant: moins de mun, plus de blessés, plus de monstres partout. Et un final en apothéose avec un big boss / Némésis à dégommer. Jouissif.

Les différentes mécaniques qui s’imbriquent parfaitement pour servir le thème.

Un bon coopératif.

Un très bon Ameritrash.

paslike

Quelques erreurs de production. Quelle surprise avec Queen Games?!? Je ne m’y attendais mais vraiment pas du tout.

Des figurines un peu… cheap.

Beaucoup de hasard, même s’il paraît maîtrisé grâce aux armes et compétences qui permettent de lancer plus de dés. Et on passe sa partie à lancer des dés pour tout (et n’importe quoi).

Qu’il manque un résumé des règles disponible pour les joueurs, surtout vu leur complexité. Mais un joueur en a fait un lui-même, en français qui plus est (cf EXTRA plus bas)

Un jeu touffu qui demande à passer sa partie le nez dans les règles pour tout appréhender / comprendre / vérifier. Et encore, il faut ensuite faire un tour dans la FAQ pour être vraiment sûr.

Des parties à 5 joueurs très longues. Optimum 2-4, même si à 2 on coopère moins bien sûr.

Un arc narratif plutôt léger et répétitif. En fin de compte, du PMT (portes-monstres-trésors) enrichi

  • extra
    La FAQ du jeu, avec correctif des erreurs.
  • L’aide de jeu pour les joueurs, un résumé de règles hyper clair, réalisé par Lactic, à télécharger ici.
  • Petit conseil stratégique : ne JAMAIS vous séparer, restez gruppiert. Parce que plus il y a de groupes, plus souvent les zombies attaquent, donc c’est chaud. Je vous conseillerais 2 groupes max, surtout à 5 joueurs, sinon vous allez morfler. Et quand un personnage est éloigné du groupe, par un dé de peur par exemple, faites tout pour le rejoindre pour éviter d’avoir trop d’équipes disséminées. Sérieusement.
  • On peut clairement s’attendre à de futures extensions : nouveaux personnages, nouvelles créatures, nouvelles tuiles, nouveau contexte / décor même.

Le texte officiel de présentation : « Une atmosphère enfumée flotte sur les ruines de ce qui fut autrefois une ville. Les morceaux de verre brisé qui jonchent le sol tracent un sentier sinueux au milieu du quartier dévasté. Vous croisez d’autres survivants qui s’enfuient en hurlant devant des horreurs sans nom. Pas le temps de reprendre votre souffle. Une piste d’empreintes rouge sombre sur le trottoir, un ruisseau de sang dans le caniveau : autant de preuves du massacre perpétré dans les environs et de la terreur qui s’y est installée.

Finalement, vous découvrez cette maison que vous cherchiez désespérément, dernier refuge sûr dans un paysage de décrépitude et de mort. Vous identifiez la façade grâce à la photo aux couleurs passées que vous serrez entre vos doigts. Le laboratoire du docteur Mortimer est censé se trouver dans le bâtiment : derrière ces murs se cache l’antidote permettant de lutter contre l’épidémie qui transforme les humains en zombies. Cette maison représente votre dernier espoir d’échapper à ce cauchemar apocalyptique… mais vous devez vous hâter si vous ne voulez pas qu’il s’envole en fumée dans les flammes qui entourent l’édifice. Oserez-vous plonger dans les ténèbres pour en rapporter la lumière qui sauvera le monde ?

Dark, Darker, Darkest est un jeu coopératif de survie et d’horreur. Une équipe de 2 à 5 survivants doit explorer la demeure étroitement gardée du docteur Mortimer afin de découvrir son laboratoire, de le déverrouiller et de mettre la main sur l’antidote. C’est la seule façon de mettre un terme à cette apocalyptique invasion de zombies. Pour déjouer le système de sécurité, l’équipe doit dénicher de l’équipement dans la maison afin de déverrouiller les portes. Les codes des portes permettront finalement aux joueurs d’ouvrir le labo… où ils découvriront qu’aux hordes de zombies, aux créatures enragées et aux incendies qu’ils ont dû affronter jusqu’ici s’ajoute une créature abominable, la Némésis, dont ils devront venir à bout au cours d’un final spectaculaire.

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6 Comments

  • Didi

    J’ai trouvé ce jeu assez moyen perso, malgré de bonnes idées, c’est hyper punitif et répétitif…
    Et le fait de ne pas pouvoir ce séparer sous peine de se faire sur-défoncer dans les 15 secondes, limite pas mal le jeu.

    C’est moins funky que le jouissif (mais basique) Zombicide et moins immersif que les Demeures de l’épouvante …

  • Bacoun

    une petite erreur il me semble dans l’article, quand un perso a son niveau d’énergie à 0 il meurt et la partie est finie pour lui. S’il est zombifié par contre, on le remplace par un zombie et le perso réapparait au point de départ (règle un peu étrange et peu réaliste d’ailleurs).

    Merci pour c’est excellent article!

    • Gus

      Bonjour Bacoun, merci pour votre commentaire:

      Il est écrit dans la conclusion : « autre point positif, au contraire de Zombicide par exemple, on ne peut jamais être éliminé de la partie. Si son personnage meurt, il devient zombie, chouette, et on rentre dans le manoir avec un nouveau personnage, mais sans tout son matériel, pas chouette ».

      Règle un peu étrange en effet… Mais vaut mieux ça qu’une élimination.

  • Drine

    Bonjour,

    J’ai vu que l’auteur a publier sur BGG des règles officielles révisées, qui amènent clarifications et corrections par rapport aux règles de la boîte, mais aussi pas mal de modifications de règles.
    Par contre, impossible de trouver la trad officielle en français… Une idée où je pourrais la trouvée?

    Merci d’avance

    • Gus

      Nope, désolé. L’auteur nous en a également parlé, admettant même que l’éditeur avait fait un travail de sagouin sur les règles, les transformant entièrement. Dingue!

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