Critique de jeu : Koryo
Koryo a été créé par un (sud) Coréen via la branche asiatique de Moonster Games. Pour connaître la situation des jeux de société en Asie, notre fringant envoyé spécial Fendoel s’est penché sur la question ici.Koryo est un jeu de cartes pour 2 à 4 joueurs dès 14 ans créé par Gary Kim et édité par Moonster Games (Gosu, Streams), sorti en septembre 2013, d’une durée de 10 à 20 minutes.
Koryo est un jeu de cartes de majorité, on y reviendra plus bas dans la mécanique. Pas facile, donc, d’y appliquer un thème intégré, exploité et cohérent. Mais bon, là, le thème tient en une phrase, c’est un peu court jeune homme.
Avec les superbes illustrations, cette accroche évasive de contexte narratif me laisse furieusement sur ma faim. J’aurais voulu un peu plus de rêve, que manipuler mes cartes me donnent presque l’impression de participer à une épopée steampunk.
Koryo se présente dans une petite boîte, avec quelques jetons en carton et une soixantaine de cartes. Et c’est tout. C’est peu, et c’est parfait, c’est compact, ça tient dans une poche et ça peut se jouer partout (évitez le cheval quand même).
Comme déjà dit plus haut, les illustrations sont superbes, très bd steampunk, très riches.
Point positif que j’aime soulever dans mes critiques, c’est ma fibre écolo de prof de géo, le jeu a certes été créé par un coréen, mais il a été fabriqué en Belgique. Bravo donc à l’éditeur Manu de Moonster Games d’avoir favorisé les emplois européens et d’avoir cherché à réduire les impacts écologiques dû aux transports. Un petit jeu produit en Europe (tel l’excellent Mascarade) dans un océan de jeux fabriqués en Chine (dont le Petit Prince, une incohérence totale face au thème et à l’œuvre…). Bientôt un label écologique pour les jeux de société?
Attention toutefois, et ceci n’a rien à voir du tout avec la qualité du matériel, on passe sa partie à mélanger les cartes, pensez donc à les sleever (pochettes en plastique) pour leur conférer une plus grande durée de vie.Comme dit plus haut, Koryo est un jeu de majorité. Il y a 9 personnages différents ayant tous plus ou moins un pouvoir spécifique, et pour pouvoir en bénéficier il faut donc, bien évidemment, atteindre la majorité. Rien de très neuf ni de palpitant. Sauf que. Les saisons sont là pour épicer le jeu.
Saison? Il y en a 8. On retourne une carte à chaque début de manche. Il est alors indiqué un nombre de cartes à distribuer et une limite à avoir posé devant soi. Si on commence la partie avec beaucoup de cartes en main, et peu devant soi, avec les saisons qui défilent la tendance s’inverse gentiment. Malin. Tendu. On sera de plus en plus obligé à opérer des choix tactiques, judicieux, douloureux. Sachant que deux personnages permettent de « tricher » quelque peu avec les indications de saisons.
Après les 8 saisons on procède à un décompte final. Chaque majorité obtenue confère le nombre de points du personnage, de 1 à 9. A cela on rajoute les points de victoire acquis au fil de la partie, les jetons, reçus par majorité ou volés aux autres, et on soustrait enfin les évènements joués contre les autres.
L’interaction est forte dans Koryo, et non pas seulement pour les luttes de majorité. En effet, on peut également faire quelques « crasses » aux autres, leur voler leurs jetons ou les envoyer des évènements dans les gencives: destruction de cartes ou échange forcé.
Honnêtement, ma toute première partie de Koryo ne m’a pas laissé une impression foudroyante. Je me suis dit : « encore un jeu de majorité », bof. » Mais comme vous le savez certainement si vous êtes un fidèle lecteur de Gus&Co, je ne me fie JAMAIS à ma première impression (pareil avec les gens, en fait). Après 3-4 parties, mon avis, expérience et sentiments sur le jeu ont fondamentalement changé.
Chaque matin j’ai un petit rituel mental. En me réveillant, je me dis à chaque fois qu’aujourd’hui j’ai envie d’être surpris, de vivre quelque chose d’extraordinaire, de différent. Avec Koryo, c’est chose faite. Faire l’impasse sur Koryo pour sa mécanique principale serait passer à côté d’une petite perle ludique dans un écrin de banalité. Et puis si la mécanique de majorité est essentielle, celle des saisons relève considérablement le jeu. Mais pas que.
On réalise peu à peu que le jeu est bien plus profond, et riche, qu’il en a l’air. Les décisions deviendront difficiles à mesure que le jeu avance, et aucune stratégie est gagnante, il faudra s’adapter aux jeux des autres, quitte à lâcher des majorité peu intéressantes au profit d’autres. Les parties sont par conséquent extrêmement différentes, on ne sentira pas de lassitude apparaître.
Si Koryo a une mécanique ludique banale, ses côtés retors, tendus, variables me donnent envie d’y rejouer, et de le faire découvrir autour de moi. D’autant que les parties sont tellement courtes qu’elles s’enchaînent furieusement, difficile de lâcher ses cartes.
Quelques réactions sur Twitter:
Des parties extrêmement différentes
Un petit format pratique
Un jeu produit en Belgique
Des parties courtes, tendues, addictives
La mécanique des saisons
Un jeu malin
Y jouer à 2, pour un contrôle total et une confrontation violenteLa mécanique de majorité. J’en ai soupé. Mais bon, pas facile d’innover en 2013 avec bientôt 20 ans de jeux de société modernes dans les dents
Des parties à 3-4 plus chaotiques (moins de contrôle), mais pas plus longues qu’à 2
Un thème aussi captivant qu’inexistant, dommage
Attention au king-making, quand un joueur offre la victoire à un autre au détriment d’un troisième
Devoir finir cette critique au lieu de jouer à Koryo
Pensez à sleever vos cartes. Le format 65x100mm, ici sur Philibert est pas mal, bien adapté, mais les pochettes auront quand même un peu de jeu, elles ne seront pas exactement au format des cartes, donc pas nécessairement super agréable pour mélanger. Mais entre ça et les abîmer, il faut choisir… Par contre les cartes sleevées rentrent toujours dans la boîte.
- Nous sommes en train de réfléchir à de nouveaux personnages, on y travaille! C’est prévu pour bientôt.
- Et bientôt sur Gus&Co, deux boîtes à gagner en concours, dédicacées par l’auteur lui-même. La friiiiiime.
3 Comments
Bifron
Merci pour cette critique. En ce qui me concerne, je joue principalement à 4. J’en suis à ma 15 ème partie mais contrairement à toi, plus je joue à ce jeu et moins je l’apprécie. Au début on se plaît à élaborer des stratégies pour finalement finir par se lasser d’un jeu où le king-making règne en maître. Même une écrasante majorité patiemment construite au fils du jeu peut être écrasé en un tour, si les 3 autres joueurs le décident. Il y a suffisamment d’autres petit jeu pratique et ludique sur le marché et Koryo est beaucoup trop chaotique (et je ne parle pas que de chance) pour m’intéresser.
alexxcl
Merci pour cet article ! Le graphisme ressemble vaguement à Yu Gi Oh, et le jeu lui-même me rappelle d’autres jeux flash auxquels je joue sur http://www.prizee.com/ . En bref, il me plait bien ce nouveau petit jeu !
Stéphane
avec mes enfants de 8 ans et 9 ans 1/2 on y joue…et ils apprécient! bon, faut dire aussi qu’on joue aussi à 7 wonders avec eux et que des fois ils gagnent… en gros on est une famille de joueurs.