Jeux de plateau

Dungeon of Mandom. Non, ce n’est pas le titre d’un film SM

Izobretnik, notre correspondant spécial au pays du soleil-levant, nous revient avec un jeu qui sent très, très bon, Dungeon of Mandom:

Oink Games, et son initiateur Jun Sasaki, est sans doute l’un des meilleurs éditeurs de jeux de société, aux côtés de G-Rounding et la Kanai Factory. J’ajourerais bien Drosselmeyer et Sugorokuya, les magasins éditeurs mais le premier, dont les jeux ont des composants et des illustrations magnifiques, propose souvent des jeux qui n’ont pas suffisamment été testés (confère ma chronique d’Adam et Eve sur Proxy Jeux) et le second, des jeux qui dépassent rarement les frontières (sauf pour Streams, édité par Moonster Games).

Oink Games, c’est en quelques années, une collection de petites boîtes au design sublime et des jeux originaux, intelligents et mécaniquement épurés. Je pourrais parler de Yabu no Naka (lui aussi édité par Moonster Games en France, sous le nom de Hattari), de Hikyou na Koumori ou encore de Kobayakawa (tous deux présentés sur Proxi Jeux) mais puisqu’il s’agit de rester dans l’actualité, je vais d’abord vous présenter Dungeon of Mandom, le tout nouveau jeu sorti pour le Tokyo Game Market.

Une petite boîte au format habituel pour l'éditeur. Mais méfiez-vous de la taille, le jeu est excellent.
Une petite boîte au format habituel pour l’éditeur. Mais méfiez-vous de la taille, le jeu est excellent.

Cette fois-ci, pas de couleurs vives ni d’ambiance bleutée. Signe de la collaboration entre I Was Game (Vorpals, considéré comme le jeu de l’année au Japon, devant Love Letter) et Oink Games, on découvre un univers plus sombre et un tantinet sanglant. Le jeu se joue en 30 minutes, pour 2 à 4 joueurs à partir de 10 ans. Le matériel, simple et composé d’à peine quelques cartes et de 9 petites tuiles, renferme une profondeur incroyable.

Vous partez avec d’autres aventuriers dans le but de vaincre les monstres que renferme un donjon malfamé. Pour vous aider dans cette aventure périlleuse, vous avez à votre disposition des armes magiques et des éléments d’armure. Jusqu’ici, vous vous dites que tout va bien… mais ce que vous ne savez pas encore, c’est que l’équipement qui doit vous aider à remporter une victoire qui n’est pas jouée d’avance, est à partager avec les autres. Oui, dans vos contrées, l’équipement est difficile à trouver et vous devez en faire bon usage en n’omettant pas de vous méfier de vos compères, souvent plus couards qu’un écolier devant un dragon.

Dans la boîte, on trouve 13 cartes représentant les monstres du bestiaire du jeu9 tuiles (dont une vous représente en tenue d’Adam, ou d’Eve, c’est selon) et 4 aides de jeu qui servent aussi de marqueurs de défaite ou de victoire. Les monstres sont de 9 types, tous très classiques, mais mêlant plusieurs univers. En gros, vous êtes dans la mouise mais vous ne le savez pas encore. Pour vaincre les monstres, il n’y a pas de mystère, il vous faudra de l’équipement. Mais encore faut-il que les éléments d’armure et les armes en votre possession soient les bonnes pour terrasser les monstres que vous rencontrerez.

La compagnie de pleutres

Au début de la partie, on met sur le côté tous les éléments qui composent l’équipement des aventuriers. Il y en a 8, auxquelles s’adjoint la tuile qui représente votre santé de départ. En voici un petit récapitulatif rapide:

  1. Vous : cette tuile vous représente, sans équipement. Vous avez 3 points de vie. Pour vous donner une idée plus précise de ce que vous pouvez encaisser comme dommages, sachez que les dégâts lors des attaques de monstres varient de 1 point de vie à 9… Genre si vous rencontrez le dragon tout nu, tout nu, vous mourrez trois fois. Oui, c’est concept !
  2. La coupe magique : elle vous permet de ne pas recevoir de dommages quand vous êtes attaqués par des créatures non-vivantes : les squelettes, les vampires et les liches.
  3. La torche : les créatures dont la force varie de 1 à 3 ne pourront pas vous frapper : les goblins, les squelettes et les orques.
  4. L’épée Vorpal : le mot légendaire créé par Lewis Carroll pour Dungeon and Dragons, et qui était déjà utilisé dans le jeu introuvable (enfin, il m’a fallu vraiment bien cherché, teaser!) et ultra réputé de l’éditeur I Was Game, vous aidera à vaincre les monstres les plus forts. Mais, petit downside, il vous faudra choisir sur quel monstre vous l’utiliserez avant même de rentrer dans le donjon et de savoir, donc, si le monstre est bel et bien présent ou non.
  5. La lance Dragon : elle vous permettra, comme son nom l’indique, de vaincre le dragon, le monstre le plus puissant du jeu, avec ses 9 points de dommages.
  6. L’armure : elle vous donnera 5 points de vie supplémentaires, vous amenant donc à 8 points de vie.
  7. Le bouclier : autre élément d’armure, il vous donnera 3 points de vie supplémentaires.

Vous pourrez donc au maximum partir dans le donjon avec un maximum de 11 points de vie… ça suffit rarement, si vous y entrez à mains nues !

Tous les équipements disponibles avant d'entrer dans le donjon. Les autres vous en laisseront-ils assez pour être victorieux ?
Tous les équipements disponibles avant d’entrer dans le donjon. Les autres vous en laisseront-ils assez pour être victorieux ?

On place le deck de monstres au milieu de la table. Chaque joueur reçoit une aide de jeu qui représente tous les monstres présents dans le deck. Cette aide de jeu sert aussi de marqueur de victoire ou de défaite : le côté noir et blanc est celui de départ, le côté rouge indique les défaites. Si vous parvenez à vaincre deux fois lors de vos incursions dans le donjon, vous remportez la partie et êtes désormais un héros légendaire dont les livres parleront avec fierté et emphase, et aussi avec un peu de lyrisme… Si vous échouez deux fois, par contre, vous êtes éliminé de la partie et serez traité avec infamie dans toutes les bibliothèques de l’univers et ce, jusqu’à la fin des temps (l’époque des films de Peter Jackson, en gros).

L'aide de jeu avec les monstres, dont la puissance des dommages varie de 1 à 9.
L’aide de jeu avec les monstres, dont la puissance des dommages varie de 1 à 9.

 You go first! No, you go first!

Vos contrées sont en danger. La population compte sur une compagnie d’aventuriers dont les exploits sont encore inconnus. Vous faites partie de cette compagnie et vous n’espérez qu’une chose… ne pas avoir à prouver votre courage ni vos compétences en matière de combat de monstres. Parce que, soyons clairs, vous n’êtes pas tout à fait prêt à vous engager dans une lutte aussi féroce. Comme souvent dans les contes et aventures, le héros peu courageux devra se surpasser et faire montre d’un talent exemplaire. Et en général, celui qui triomphe à la fin de l’histoire est un jeune poltron qui ne soupçonne pas lui-même ses talents de combattant.

Bref, vous allez essayer d’éviter d’entrer dans le donjon, mais en même temps, vous ne voudriez pas vous retrouver sans armes ni armure si les monstres venaient à s’échapper. Et puis, seul celui qui entrera dans le donjon pourra espérer devenir un grand héros. Dilemme difficile que le jeu va vous pousser à résoudre bon an mal an. Vous voici donc dans une configuration à 4 joueurs. Les tuiles d’équipements sont placées sur le côté. Le deck de monstres est au milieu de la table.

Au premier tour, vous n’avez d’autre choix que de prendre une carte de la pile et de la placer sur une nouvelle pile, celle qui représente le donjon et ses monstres. A 4 joueurs, vous aurez donc à affronter au minimum 4 monstres. Mais, ne souriez pas encore, ça n’arrivera jamais.

A partir du deuxième tour, vous serez confrontés à 3 choix possibles : le premier consiste à ajouter un monstre à ceux déjà présents dans le donjon. A aucun moment, vous ne pouvez regarder les cartes que vous ajoutez. Jamais ! Le deuxième choix possible est celui que je qualifierai de peu courageux. Vous allez pouvoir prendre une tuile équipement et la placer devant vous, ainsi que la carte monstre que vous avez prise sur la pile de départ. Cet équipement ne sera désormais plus disponible pour l’aventurier qui devra entrer dans le donjon. Le joueur qui décide de jouer ainsi pourra, par contre, regarder la carte monstre qu’il a retirée et même en parler aux autres joueurs, s’il le souhaite. Bien sûr, comme vous êtes tous en compétition, il pourra vous informer justement ou vous… mentir. La dernière action disponible, c’est tout simplement « passer ». Lorsque vous passez, vous quittez l’aventure pour le reste de la manche. Vous ne pourrez donc plus ajouter de monstres au donjon ni retirer les équipements encore disponibles.

Une fois que trois joueurs ont passé, le dernier aventurier devant le donjon n’aura d’autre choix que d’y entrer et d’essayer de triompher avec les équipements restants. Les monstres sont vaincus par série, c’est à dire que si vous avez encore en votre possession la « torche », vous pourrez nier les dégâts et vaincre tous les monstres qui y sont sensibles, peu importe leur nombre. Par exemple, la torche permet de venir à bout de près de la moitié des monstres du bestiaire… autant vous dire que vos amis aventuriers la laisseront rarement sur la table ! Les vilains !

Une fois qu’un joueur parvient à revenir deux fois victorieux de cette épreuve, il est déclaré vainqueur ! Si un aventurier échoue deux fois, il est éliminé pour le reste de la partie.

Les goblins, les squelettes et les orcs.
Les goblins, les squelettes et les orcs.
Les vampires, les golems et la liche.
Les vampires, les golems et la liche.
Le Démon et le Dragon ! Là, ça déconne plus.
Le Démon et le Dragon ! Là, ça déconne plus.
 plus

Humm, comment dire ? Ce jeu est une bombe !!!! Non seulement, vous allez découvrir lesquels de vos amis sont les plus courageux et les plus poltrons mais en plus, vous allez y prendre un plaisir fou. Les mécanismes du jeu sont d’une simplicité encore une fois étonnante mais quelle profondeur. Le bluff, la gestion du « bon moment » (j’ai essayé de traduire timing, euh, il faut pas), la tension autour de la table, c’est clairement le jeu qui m’a laissé la meilleure impression lors du Tokyo Game Market. Vous l’aurez peut-être déjà remarqué, je suis un grand admirateur des jeux de la compagnie de Jun Sasaki. D’abord, parce qu’ils sont toujours de toute beauté, et ensuite, parce que j’ai toujours l’impression de découvrir un jeu dont l’expérience ne m’en évoque aucune autre.

Nous l’avons testé à 4 pendant le TGM et, après avoir écouté les explications, nous avons juste oublié d’intégrer le démonstrateur au jeu… Imaginez donc, 4 Francophones jouant à un jeu japonais en japonais devant une foule médusée. C’était un grand moment d’acculturation pour nous. 🙂

C’est fin, vicieux, et amusant. Pas de frustration lors des défaites. J’espère vraiment que celui-là trouvera preneur de par chez nous parce que c’est, selon moi, un jeu qui mérite d’être joué par tous.

Manu, si tu me lis…

Izobretenik

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