
Catan : Le jeu de société qui transcende les frontières
Pour rendre hommage à Klaus Teuber, décédé il y a une semaine, retour sur Les Colons de Catan, le jeu de société incontournable ! 🎲✨💔🌟
Les Colons de Catan, le jeu qui a révolutionné le jeu de société
Est-ce que vous vous souvenez, vous, de votre toute première partie des Colons de Catan ? Est-ce que c’était en famille, entre potes, entre collègues de boulot, dans un Bar à Jeux ? Ou vous n’y avez peut-être jamais joué ?
J’avais une vingtaine d’années quand j’ai découvert Les Colons de Catan pour la toute première fois en 1997, au Bar à Jeux de Bienne, en Suisse. Je m’en souviens encore très bien. La salle de jeux était gérée par Delirium Ludens, la boutique de jeux locale, et se trouvait dans les souterrains d’une église. La salle était ouverte les mardis et les vendredis soirs. J’hantais les locaux les deux soirs par semaine. Je ne me souviens pas avoir joué à un autre jeu pendant des mois (des années ?). Nous enchaînions les parties. Sans arrêt. Le jeu Les Colons de Catan est devenu une véritable… obsession.
Vous avez peut-être appris cette semaine que Klaus Teuber, l’auteur allemand qui a créé Les Colons de Catan (aujourd’hui simplement appelé Catan), est décédé le 1er avril à l’âge de 70 ans. Teuber a créé Les Colons de Catan au début des années 1990, en s’inspirant des idées de colonies islandaises, en bricolant dans son sous-sol alors qu’il travaillait à plein temps dans un laboratoire dentaire. Chaque week-end, il présentait de nouvelles itérations à sa femme et à ses enfants pour qu’ils les testent, a-t-il déclaré au New Yorker. Son moment Eurêka, dit-il, a été l’utilisation de tuiles hexagonales au lieu de tuiles carrées.
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Avec son jeu Les Colons de Catane, traduit dans 40 langues et vendu à plus de 40 millions d’exemplaires selon l’éditeur, Klaus Teuber, cet ancien prothésiste dentaire allemand, est devenu un auteur de jeu incontournable qui a laissé une trace indélébile dans le paysage, dans l’industrie du jeu de société.
Que vous appréciez, ou non, Les Colons de Catan, que vous y jouiez encore, souvent, ou jamais, il faut admettre une chose : à sa sortie en 1995, le jeu a modifié le paysage ludique, en profondeur !
Les jeux de société peuvent être perçus comme une métaphore pour nos vies, un enchevêtrement de règles, de hasard et de stratégie. Parmi les innombrables jeux, Catan s’est distingué, devenant un incontournable depuis sa création en 1995. Qu’est-ce qui fait de ce jeu un succès indéniable (et pourquoi devriez-vous l’essayer si ce n’est pas déjà fait ?) ?
En hommage à Klaus Teuber qui nous a quittés samedi il y a une semaine 1er avril d’une courte mais inexorable maladie, intéressons-nous ici aujourd’hui à ce qui fait, ce qui a fait que Catan est devenu un tel phénomène, ludique et culturel. Voici quelques raisons qui expliquent l’engouement autour de Catan.
Un jeu accessible et convivial
L’une des forces de Catan réside dans sa facilité d’apprentissage. Les règles sont simples et bien expliquées, permettant aux novice·e·s de rapidement comprendre le fonctionnement du jeu. De plus, la durée d’une partie est généralement d’une à deux heures, ce qui en fait un jeu idéal pour des soirées entre ami·e·s ou en famille. Catan offre une expérience agréable sans être oppressante, évitant les longueurs interminables qui mènent à l’abandon.
Bien que les règles de Catan ne soient pas compliquées, la combinaison de plusieurs éléments de jeu qui étaient encore largement nouveaux à l’époque – la collecte de ressources, la construction de colonies, le commerce, les conditions de score multiples via les cartes « Route la plus longue » et « Armée la plus nombreuse » – constituait une avancée significative par rapport au format souvent unique « lancez le dé et déplacez-vous, faites ce que la case vous indique » de la plupart des jeux de plateau de l’époque.
Catan a conservé certains éléments familiers des jeux d’alors : deux dés, un jeu de cartes, l’interaction entre les joueurs et joueuses, une touche de la lutte pour la domination régionale de Risk dans son combat colonialiste pour l’île fictive titulaire, et même des petites maisons en bois. Il n’est donc pas surprenant qu’on l’ait surnommé le « tueur de Monopoly » à l’époque. Même s’il n’a pas grand-chose en commun avec le classique du commerce immobilier. Ces éléments, familiers, quoique… légers dans Catan, ont permis au plus grand nombre (dont moi, en 1997 quand je l’ai découvert) d’assimiler plus facilement son gameplay, par ailleurs révolutionnaire à l’époque.
Un mélange de stratégie et de hasard
Catan offre un savant mélange de stratégie et de hasard, rendant chaque partie unique et imprévisible. La gestion des ressources et l’expansion de votre territoire sont au cœur de la stratégie, tandis que le lancer de dés ajoute une touche de hasard qui maintient l’excitation tout au long de la partie. Cette combinaison permet aux joueuses et aux joueurs expérimentés comme aux débutants de s’amuser et de relever des défis.
Catan représentait quelque chose de nouveau pour les joueuses et joueurs de l’époque, qui étaient habitués à… l’ennui du Monopoly basé sur la chance, à l’élimination compétitive du Risk ou au thème inexistant du Scrabble lorsque Catan est sorti pour la première fois en 1995 en VO.
Contrairement à certains jeux de société où les joueuses et joueurs évoluent de manière solitaire, Catan encourage les interactions sociales. Les échanges de ressources entre les participant·e·s sont cruciaux pour progresser dans le jeu, ce qui favorise la communication, la négociation et même un peu de diplomatie. Cette dimension sociale rend le jeu encore plus dynamique et captivant.
Un univers immersif et inoffensif
L’univers de Catan est riche et immersif. Les joueuses et joueurs doivent bâtir des colonies, construire des routes et développer leur civilisation sur une île aux paysages variés, tels que des forêts, des champs et des pâturages. Les graphismes colorés et les pièces de jeu bien conçues contribuent à créer une expérience ludique et agréable pour les yeux. Son thème paisible, exempt de caricatures et de monstres, le rend accessible à tous.
Le jeu de Teuber évite la concurrence directe entre les joueurs et les joueuses, les encourageant plutôt à échanger ouvertement leurs ressources limitées afin de progresser. Son plateau hexagonal présente une disposition variable des tuiles qui peut être réarrangée pour permettre de nouvelles stratégies à chaque fois que le jeu est joué.
On lance deux dés à six faces à chaque tour, mais le hasard ne joue qu’un rôle relativement mineur dans l’issue du jeu. Les joueuses et les joueurs peuvent s’efforcer de faire pencher la balance en leur faveur en construisant de nouvelles colonies autour d’emplacements rentables et en commerçant avec leurs voisins et voisines.
Le jeu propose un thème, mais il est plus terre à terre et plus banal que les aventures fantastiques ou les guerres sanglantes qui pullulaient sur le marché à l’époque.
Et, surtout, personne n’est expulsé de la partie avant la fin : la victoire est déterminée par les points, pas par la… survie (j’ai pu de sous…). Catan, c’est plus de gestion et moins de baston. Une certaine innovation pour les années 80-90.
Une rejouabilité infinie
Grâce à son plateau modulable composé de tuiles hexagonales, Catan offre une rejouabilité quasi infinie. Relire le tout début de l’article. Ce fut mon cas. Chaque partie est différente, car la disposition des tuiles et la répartition des ressources varient à chaque fois.
En outre, de (très, très, très) nombreuses extensions (50, en vrai) sont disponibles pour enrichir et diversifier l’expérience de jeu, ajoutant de nouveaux éléments, de nouveaux défis et des variantes passionnantes.
Conclusion
Les Colons de Catan est un jeu de société qui mérite amplement sa réputation et sa popularité. Alliant stratégie, hasard, interactions sociales et univers immersif, il saura plaire à un large public, quel que soit l’âge ou l’expérience en matière de jeux de société. Catan a su conquérir le cœur de millions de joueuses et de joueurs à travers le monde grâce à sa capacité à transcender les goûts et les âges. Ni trop intellectuel, ni trop enfantin, il est apprécié sans être adulé.
Le véritable atout de Catan réside dans son excellent timing et son heureux hasard. Il est apparu alors que les jeux de stratégie sur ordinateur éveillaient l’appétit des fans pour les grilles d’hexagones et la gestion des ressources, et avant que les jeux vidéo ne dominent le marché du divertissement multijoueur.
Catan a ouvert la voie à ce que nous appelons aujourd’hui les jeux de société modernes. Même les jeux qui ne s’inspirent pas directement de son gameplay révolutionnaire lui doivent une fière chandelle pour avoir initié les joueurs du monde entier à un type de jeu de société très différent et pour avoir ouvert la voie à des expériences mécaniquement riches qui ont trouvé leur public.
Même les jeux qui ne s’inspirent pas directement du gameplay révolutionnaire de Catan lui doivent une fière chandelle pour avoir initié les joueurs du monde entier à un style de jeu de société très différent.
Près de trente ans après avoir réécrit ce que les jeux de société populaires pouvaient être, Catan continue de trouver de nouveaux fans, ce qui témoigne du chef-d’œuvre de Teuber et de son créateur. Teuber a laissé un héritage vraiment durable ; le jeu de société est plus pauvre à cause de sa mort tragique, mais incommensurablement plus riche pour ce qu’il a laissé derrière lui.
Teuber avait déjà connu le succès dans son pays natal, en remportant trois fois le prestigieux prix Spiel des Jahres pour Barbarossa, Adel Verpflichtet et Drunter und Drüber (Adel Verpflichtet a également été le premier lauréat du célèbre Prix allemand du jeu, cinq ans avant Catan).
En fin de compte, n’est-ce pas là un objectif admirable et inestimable ? Créer quelque chose qui procure du plaisir, sans prétention de changer le monde, mais en permettant simplement de profiter de… ses doux pâturages. Si vous n’avez pas encore essayé Catan, il est grand temps de vous laisser séduire par ses charmes et de découvrir ce qui fait de ce jeu de société un véritable phénomène.
Et encore une chose
Un chouette documentaire s’est intéressé à Klaus Teuber et à son jeu il y a quelques années. À voir et à revoir ici :
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Article écrit par Gus. Rédacteur-en-chef de Gus&Co. Enseigne à l’École supérieure de bande dessinée et d’illustration, travaille dans le monde du jeu depuis 1989 comme auteur et journaliste.

