Analyses & psychologie du jeu,  Jeux de plateau

L’exaltante mécanique de l’Engine-Building, et les meilleurs jeux de société qui l’utilisent

La mécanique d’Engine-Building se retrouve dans plusieurs jeux de société récents. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Et quels sont les meilleurs jeux qui l’intègrent ?

Commençons par le début : c’est quoi, un jeu d’Engine-Building ?

C’est peut-être un terme que vous rencontrez souvent dans nos critiques, dans la description d’un jeu de société. Mais de quoi parle-t-on ? De quel type de jeu s’agit-il, et comment est-ce qu’on y joue ?

Dans les jeux qui utilisent la mécanique bien particulière d’engine-building, il y a généralement une boucle de rétroaction qui accélère les choses, le jeu. Vous obtenez des ressources et des capacités qui vous permettent d’obtenir alors plus et de meilleures ressources et capacités, qui vous en permettent d’obtenir plus, etc.

Certains jeux l’utilisent comme mécanisme principal tandis que dans d’autres, ce n’est qu’une mécanique diluée parmi d’autres

La mécanique d’engine-building repose sur le fait qu’on passe sa partie à construit soi-même ce moteur. On achète un élément, qui permet d’en acquérir un autre, et la machine s’emballe ! Les jeux d’engine-building sont des jeux qui font la part belle aux combinaisons. Il s’agit ici de parvenir à combiner les meilleurs éléments possibles pour gagner en optimisation et efficacité. Pour finalement réussir à gagner, plus, mieux et plus vite

Les jeux de société qui intègrent la mécanique d’Engine-Building sont parmi les plus passionnants. Non seulement ils vous octroient une grande part de liberté dans la façon de construire, de contrôler le jeu, votre jeu, mais ils proposent une courbe de progression souvent remarquable et appréciable qui vous donne envie d’y rejouer. Pour vous améliorer, maintenant que vous savez jouer, que vous savez mieux jouer. Et surtout, envie d’essayer d’autres stratégies, d’autres combinaisons, d’autres constructions de moteur

Dans un jeu avec de l’Engine-Building, vous commencez petit. Vous générez peu, d’énergie, de monnaie, de ressources, etc., puis vous utilisez cet élément pour acheter plus de pièces, de morceaux de votre «moteur» qui vous permettent alors de générer plus d’énergie / monnaie / ressources, ce qui vous permet de construire un plus gros moteur, etc., etc. J’achète, je place cette carte, cette tuile maintenant, ce qui me permet ensuite d’obtenir plus de ressources plus tard, et ainsi de suite !

Il faut toutefois préciser que si mal intégrée, peu contrôlée ou équilibrée, la mécanique d’Engine-Building peut se faire au détriment de l’expérience du jeu, du plaisir vécu. L’Engine-Building repose en effet sur sa capacité à construire un « moteur », à constituer des combos dévastateurs. Prenez un « mauvais » départ, de « mauvais » choix, et là, c’est le drame ! L’Engine-Building peut alors générer un phénomène de win-to-win tout moisi. Le win-to-win dans le jeu de société, c’est « plus je gagne, et plus je gagne ». Autrement dit, plus j’ai l’avantage, et plus j’ai l’avantage. Et les autres n’ont alors plus aucune chance de remonter dans les points, dans le jeu. Et la partie est alors pliée. Mais ce n’est pas la règle, certains jeux parviennent à éviter cet écueil


Les meilleurs jeux de société qui utilisent la mécanique d’Engine-Building

Quels sont, aujourd’hui, les jeux de société les plus marquants, les plus passionnants qui intègrent cette mécanique d’Engine-Building ? En voici quelques-uns parmi les meilleurs :

Maracaibo

Sorti tout récemment, avec une VF en préparation chez Super Meeple prévue dans quelques semaines, Maracaibo est un gros jeu de gestion de ressources et de missions à réaliser dans la mer des Caraïbes au 17e siècle : exploration, missions, commandes. Un jeu qui se joue également en mode campagne, Legacy-style

Maracaibo intègre la mécanique d’Engine-Building de manière plutôt douce, . Chaque joueuse et joueur dispose d’un plateau perso avec des jetons que l’on va pouvoir peu à peu retirer d’emplacements divers. Une fois un emplacement de son plateau perso « vidé », celui-ci va débloquer des avantages mais surtout, désormais faire gagner plus. Du pur Engine-Building, donc, même ce n’est de loin pas le cœur du jeu. Du gros, du bon jeu !

Vous pouvez découvrir la critique complète de Maracaibo ici

Et déjà précommander le jeu en VF prévu tout bientôt ici chez Philibert

It’s a Wonderful World

Sorti pour le salon d’Essen en octobre 2019, il vient tout juste d’être nommé pour l’As d’Or dans la catégorie Experts. Va-t-il gagner ce jeudi 20 février ? Pas impossible, il a toutes ses chances, et il le mériterait !

It’s a Wonderful World est un jeu de draft avec des phases qui va permettre de récupérer des cubes de certaines couleurs. It’s a Wonderful World est un pur jeu d’Engine-Building, car selon les cartes draftées, puis posées au fil de la partie, on va pouvoir récupérer de plus en plus de cubes, et gagner en puissance, en vélocité. Un must-have de 2020 !

Vous pouvez découvrir la critique complète de It’s a Wonderful World ici

Vous pouvez trouver le jeu ici chez Philibert

Splendor

Quand Splendor est sorti il y a six ans (déjà ???) en 2014, il a cartonné ! Un jeu rapide, tendu, extrêmement fluide. Vous achetez des cartes, qui vous permettent d’obtenir des réduc pour de prochaines cartes à acheter. Etc. Un thème cucul, 1 sur 5 sur l’ITHEM, mais un pur jeu d’Engine-Building extrêmement épuré et efficace !

Vous pouvez découvrir la critique complète ici

Vous pouvez trouver Splendor chez Philibert ici

Century : La Route des Épices

Quand Century : La Route des Épices est sorti en 2017, beaucoup ont trouvé qu’ils reprenaient (un peu trop ?) Splendor. Dans Century : La Route des Épices, il y a quatre cubes de ressources dispo : jaune, rose, vert et marron, dans cet ordre, du moins précieux, lucratifs, au plus précieux et lucratifs

Vous pouvez poser des cartes pour gagner des cubes spécifiques. ou pour échanger des types spécifiques de cubes contre d’autres types spécifiques de cubes, ou pour « améliorer » la valeur des cubes. Vous pouvez également acquérir plus de cartes pour votre deck, généralement en dépensant des cubes. Un autre bon titre d’Engine-Building, fluide, nerveux

Vous pouvez découvrir la critique ici

Et vous pouvez trouver Century : La Route des Épices chez Philibert ici

Race for the Galaxy

C’est certainement l’un des meilleurs jeux de cartes d’Engine-Building sur le « marché ». Entre guillemets. Sorti en 2007 puis en VF l’année d’après chez feu (???)-Ystari, Race for the Galaxy n’existe plus en VF aujourd’hui, mais ses spin-offs, oui : Roll for the Galaxy et New Frontiers, deux jeux qui n’arrivent toutefois pas à la cheville du jeu originel. À quand une réédition du jeu ?

Race for the Galaxy vous propose de construire une civilisation galactique. Chaque carte dispose de caractéristiques. Certains représentent des mondes, tandis que d’autres sont utilisés pour créer des développements techniques. Et les cartes posées vous permettent d’en poser d’autres, d’en poser plus. C’est San Juan, la version cartes de Puerto Rico, mais rethématisé Space Opera, et avec une mécanique d’Engine-Building plus marquée

Dominion

Sorti juste une année après Race for the Galaxy en 2008, Dominion a été le tout premier jeu de société qui a introduit la mécanique de deck-building. Aujourd’hui un poil has-been, largement dépassé par de très nombreux et peut-être meilleurs titres, Dominion fait partie des 25 jeux incontournables de la culture du jeu de société moderne !

Le Deck-building est sans aucun doute la mécanique d’Engine-Building la plus connue, la plus répandue aujourd’hui sur le marché. On commence la partie avec des cartes toutes… moisies, et on passe sa partie à en acquérir d’autres, de meilleures, pour améliorer son deck de départ. Du pur Engine-Building, avec un twist : le jeu repose sur une certaine part non-négligeable de hasard. En effet, selon le tirage des cartes, celui-ci qui va générer un certain « moteur », ou… pas

Relevons que malgré son… grand âge, Dominion existe toujours et continue à sortir des extensions par-ci par-là : la dernière, Renaissance, remonte à 2018, et la prochaine, Ménagerie, est prévue pour cette année

Vous pouvez trouver Dominion en VF chez Philibert ici. Et si vous fouillez un peu dans leur catalogue, vous pourrez également y débusquer certaines extensions

Est-ce que la mécanique d’Engine-Building vous fait kiffer ? Et selon vous, quels sont les jeux qui intègrent le mieux cette mécanique ?

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28 Comments

  • Garibaldi31

    Sur le plan du deckbuilding, pour moi la référence aujourd’hui est Aeon’s End, justement parce qu’il casse la part de hasard au moment où la défausse est transformée en pioche, puisqu’il n’y alors aucun mélange du paquet, et cela demande donc de bien réfléchir à l’ordre des cartes que l’on défausse, ce qui le rend très stratégique. Cette part de hasard est quand même conservée pour le deck de frappe de la némésis, permettant d’avoir toujours des parties toujours différentes et surprenantes.
    Enfin dans le genre d’Engine Building, Scythe reste aussi pour moi une référence, même si ce n’est pas autant le cœur du Jeu que ceux cités ici.

  • Ange

    En 2012 sortait Seasons, version multi-joueur et je pense ‘engine Building’ dérivé de l’univers Magic par ses cartes (qui une fois posées permettent d’améliorer son jeu) et des dès pour bases de la récup de matières premières.
    Je viens d’en faire encore une partie à l’instant et c’est vraiment toujours aussi bon/équiibré – même si je viens de perdre 😢

  • NcolaT

    Bonjour,
    Gus, je crains que ta définition de l’engine-building soit trop vague et qu’elle autorise ainsi bien trop de jeux et de systèmes.

    Ainsi je pense qu’il ne faudrait pas confondre engine-building, deckbuilding, système de gestion de ressources et système a combo.

    Splendor et Dominion ne sont selon moi pas des engine-builders. Selon moi Splendor est un capitaliseur de ressources, alors que le second est du deckbuilding.

    Si je peux donner un ou deux exemples que je considère comme des engine-builders, je donnerai « Gizmo’s » et éventuellement « Res Arcana » (mais ce dernier est peut être un système a combo).

    Je vais tenter de vous donner ma définition d’un engine-builder (ca vaudra ce que ca vaudra) : c’est un système dont l’objectif est de fournir à chaque tour pour une même entrée de départ, un résultat final de plus en plus puissant/performant/optimisé en rajoutant progressivement au système des éléments mécaniques visibles et permanents et en combinant/optimisant au mieux ces éléments entre eux.

    Au plaisir

    • Garibaldi31

      Je crois que l’article oublie aussi la catégorie des Bag Building, parce que ce serait logique si on inclue ceux de type deck building. Et dans ce style, on a les charlatans et Orléans qui me semblent tout indiqués.

  • L'Acariâtre

    C’est une mécanique très mécanique (!) mais qui donne un sentiment d’accomplissement assez inégalable quand tout ronronne bien et que chaque tour est plus puissant que le précédent ! Et quand on contemple avec satisfaction son tableau de fin de partie.

    Pour palier à l’effet « win-to-win », beaucoup de jeux à moteur me semblent introduire un « pivot » de milieu de partie où le joueur doit délaisser la construction du moteur de ressources pour se réorienter vers la production de points de victoire. Toute la stratégie étant de prendre ce virage ni trop tôt (moteur trop faible) ni trop tard (manque de temps pour transformer le moteur en victoire). Par exemple l’achat de Domaines dans Dominion ou de passage aux cartes de 2 et 3e niveau dans Splendor.

    Enfin, ce type de jeux me semble aussi très lié aux jeux a richesse « horizontale » : avec une diversité d’éléments de meme type (les pièces du moteur) à collectionner et agencer de manière optimale. Le plus souvent représentée par des cartes.

  • François Haffner

    Article très intéressant. Merci beaucoup.

    BoardGameGeek distingue « Tableau Building » d’une part et « Deck, Pack and Pool Building » d’autre part. Le « Tableau Building » (que j’ai tenté de traduire par « Amélioration de tableau » sur mon site) se distingue en ce sens que le matériel propre au joueur, disposé généralement devant lui (nouvelles cartes, nouvelles portions de cartes comme dans Innovation, curseurs, etc.), est visible. Dans la mécanique de « Deck, Pack and Pool Building », les nouveaux éléments rejoignent une pioche ou un sac et ne sont pas visibles. Cette distinction me semble intéressante et implique que le Deck-Building n’est pas un cas particulier de Engine-Building mais un mécanisme proche et cependant distinct.

    • Alfa

      Je ne suis pas d’accord avec ta conclusion (d’un point de vue strictement logique ET d’un point de vue taxinomique)

      A moins de trouver un contrexemple, j’ai la conviction que tous les jeux de bag-, pool- ou deckbuilding sont dans une certaine mesure des engine building , puisqu’ils amènent une montée en puissance.

      A mon avis Engine building (jeux à moteur) est une « catégorie » de jeux qui peut être atteinte de diverses manières à l’aide de « mécaniques » très différentes (Splendor, Scythe, Dominion, Orléans, Clank, DiceForge, RFTG/ San Juan, TerraMystica, TFM…)

  • Eric

    Je suis fan d’engine/tableau buildings. Mes deux préférés étant Terraforming Mars et Lorenzo.

    Cet article m’a fait acheter Maracaibo, que je n’avais pas dans mon viseur. Et quelle claque ludique! Whaaaa! Merci!

  • Gauche-à-Droite

    Je suggère l’injustement confidentiel 51st State – Master Set.
    Une alternative fun à l’austère RFTG.
    Abandonné par son passeur francophone hélas, faute d’audience suffisante… Bon, il faut dire que ses règles font partie des mieux bâclées de l’histoire récente (c’est du Portal) – mais on en a vu d’autres!
    Pourtant la mécanique vaut son pesant de cacahuètes avec son principe de gestion versatile (j’adore ce mot) comprimé dans une course au PV tendue comme une catapulte montée sur un pick-up.
    Le thème punky-post-apo fait aussi du bien dans cette catégorie où règnent habituellement les comptes d’apothicaires ventripotents! D’autant que ce thème trouve toujours un écho quasi-narratif dans les diverses actions entreprises par les joueurs.

  • Roberto Agnagnah

    Tout à fait d’accord à propos de 51st STATE, qui fut une excellente surprise pour ma fille et moi, alors que ces jeux d’optimisation ne sont pas, d’ordinaire, notre tasse de thé… Ce jeu est beau, tendu, il procure un agréable sentiment de progression vers plus de puissance, et il est même pourvu d’une interaction directe par le biais de « razzias » chez les autres joueurs, parfois bien pénalisantes…!

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