Critique de jeu : Alchemists. Devenez Heisenberg
Ce jeu nous a été offert par l’éditeur directement à Essen pour critique sur notre site.
Alchemists est sorti pour Essen en octobre 2014, publié chez les Tchèques de CGE (Dungeon Petz) et créé par Matúš Kotry, son tout premier jeu. Pour 2 à 4 joueurs, dès 13 ans. Vraiment dès 13 ans, vu la complexité du jeu.
Comme son titre l’indique, dans Alchemists les joueurs incarnent des… alchimistes qui préparent et vendent des potions. Le thème est extrêmement original, à part Malédiction! d’Andreas Pelikan en 2008 je ne me souviens pas d’autres jeux qui proposent tel thème.
Comme très souvent avec les jeux CGE, le matériel, la mécanique et les illustrations offrent aux joueurs une immersion forte. Et franchement, c’est vraiment fun de mélanger des champignons et du venin de scorpion pour en faire une potion de rapidité.
Alchemists présente trois mécaniques différentes :
1. Placement d’ouvriers, puisqu’on place des cubes sur diverses actions, récolter des ingrédients, vendre des potions, publier une théorie, etc.
2. Du bluff, car on peut faire croire aux autres qu’on a déjà percé les mystères des ingrédients.
3. Et bien évidemment déduction, car on essaie de retrouver la nature des 8 ingrédients.
Alchemists ne va pas sans rappeler l’antédiluvien Mastermind. Sérieux.
Pour marquer des points, le but ultime des joueurs sera de retrouver la nature exacte des 8 ingrédients, tout en bluffant les autres joueurs pour leur faire croire qu’ils y sont déjà parvenu, sachant qu’il en existe également 8 natures différentes, donc 64 possibilités (mais je peux me tromper).
Le matériel est juste incroyable! Quantité de jetons, de cartes, superbes illustrations de David Cochard, comme dans les deux autres Dungeon (bientôt un 3e?).
Mais ce qui marque, et qui transcende le jeu, c’est l’incrustation d’une appli smartphone / tablette pour créer les potions. Il suffit de placer son appareil devant deux cartes, et l’appli vous donne alors automatiquement la potion réalisée: 4 couleurs possibles, rouge, bleu, jaune et gris, et trois valeurs possibles, positif, négatif et rien.
En fait, tout dépend des ingrédients, sachant que selon leur combinaison on produira telle ou telle potion. D’où la partie « déduction ».
Chaque joueur possède également un gros écran derrière lequel il va cacher ses éléments déduits ainsi que ses préparation de potions via appli.
Et c’est là que réside le gros fail du jeu. En effet, les jetons qui permettent de marquer ses déductions sont terriblement mal coupés, du coup ils ne peuvent pas s’insérer dans les trous correspondants, et soit on force et on casse le tout soit on les place comme on peut en prenant le risque que les jetons tombent, faussant ainsi toute la partie car on ne souvient plus forcément d’où ils sont tombés.
Bref, expliqué comme ça ce n’est pas très clair, mais disons que le matériel n’est vraiment pas pratique du coup. Sans parler encore des cartes à scanner qui tombent car le porte-carte est mal élaboré. Gros fail, dommage. Et ça peut grandement nuire au jeu.
L’interaction est plutôt forte. Comme il s’agit d’un jeu de placement on peut bien évidemment bloquer les emplacements, et le bluff augmente l’interaction puisqu’on est toujours en train de se demander si les autres sont parvenus à lever le voile sur les ingrédients. On peut alors jouer un contre-bluff en « débunkant » ces théories fumeuses.
La course aux points de réputation tout au long de la partie renforce également l’interaction, mais il faut quand même savoir qu’on passe le plus clair de sa partie le nez dans son chaudron à mélanger ses ingrédients.
Party gamers et Familles / Casual : clairement pas, les règles, près de 20 pages, même si drôles au possible, comme d’hab avec CGE, fourmillent d’une multitude de mini-points à ne pas oublier. Rien qu’en voyant le matériel on imagine bien à quel type de public le jeu est destiné.
Hobby et Core : oui, clairement, avec un avantage pour les Core Gamers, les joueurs exigeants, car le jeu dure quand même 2h et il y a beaucoup, beaucoup de paramètres à prendre en compte: gérer l’argent pour acheter des cartes spéciales, optimiser les combos d’ingrédients pour arriver le plus rapidement possible à une déduction, bluff ou pari.
Alchimists a connu un énorme succès sur le salon d’Essen 2014 au point d’être sold-out après 3 jours (en même temps, vous allez me dire que ce n’est pas difficile d’être sold-out, il suffit d’amener 17 jeux et pouf).
Succès amplement mérité pour ce jeu hors-norme, entre déduction/Mastermind, bluff et placement d’ouvriers.
Et après une année 2013 plutôt morose pour CGE avec un Tash-Kalar plutôt moyen et peu inspiré, ils nous reviennent en force avec ce jeu courageux et plein de saveur au thème original et immersif pour un superbe matériel, même si au final très mal fabriqué et mal conçu. En même temps, certainement pas la faute de CGE. Une deuxième édition améliorée? De nouveaux punch-boards de remplacement?
Et à combien de joueurs y jouer? Franchement, le jeu est aussi bon à 2 qu’à 4, les parties ne sont pas tellement plus longues ni lentes. Evidemment, à 2 il y aura moins d’interaction mais ça ne veut pas dire que le jeu sera moins bon, on sera alors plus dans la confrontation et le duel direct.
Bref, Alchemists est un excellent jeu extrêmement riche qui fait clairement partie, pour moi, du TOP 10 des meilleurs jeux d’Essen. Et peut-être aussi de 2014? Espérons juste que l’éditeur parviendra à corriger la vilaine erreur de fabrication.
Le thème, original, immersif.
Les 3 mécaniques superbement imbriquées.
L’appli, pratique. Alors oui on peut jouer sans, il existe un moyen plus… analogique, mais moins pratique / fun. Et les joueurs peuvent avoir chacun leur appli, il suffit pour cela d’inscrire le même code pour participer à la même partie. Alors oui, on peut râler et dire que c’est triste que les jeux de société se mettent à la mode smartphones, ou dire que l’appli est juste un gadget, mais en fin de compte son utilisation est très subtile et rapide, un réel plus.
Les illustrations de David Cochard, toujours autant chatoyantes.
La richesse et la complexité du jeu.
Aussi bon à 2 qu’à 4 joueurs.
La durée de vie du jeu. Vous allez très certainement vous demander ce qui se passe quand on a réussi à déduire tous les ingrédients. On ne peut alors plus jouer? Et bien non, c’est là que l’appli rentre « en jeu » puisqu’elle changera les config à chaque partie (d’où la nécessité d’inscrire le même code sur tous les appareils pour participer à la même partie, cf plus haut, sinon c’est le bordel). Les cartes artefacts dispo changent également la donne à chaque partie, renouvelant bien les combos.
Voir toutes les cartes artefacts à l’avance pour pouvoir anticiper.
Des parties de 120′ qui paraissent au final très courtes vu l’intérêt et le plaisir du jeu.
La bluff, ou le pari, sachant que plus tôt on pose une théorie / déduction, plus on rapportera de points, mais plus on prend de risques.
Deux difficultés de jeu, apprenti et maître. Le mode apprenti est déjà bien assez riche et complet comme ça en fait.
Clairement l’un des meilleurs jeux de 2014.
Je crois que vous l’aurez compris, le matériel, clairement très mal conçu, qui pourrait ruiner des parties si : les cartes tombent au moment du scan + les jetons de déduction tombent de la pyramide. Vraiment pas top. Dommage, pour un jeu au matériel tellement incroyable.
Des règles très très complexes et touffues, notamment celles concernant le contre-bluff. Il faudra 2-3 parties pour être vraiment capable de les maîtriser.
CGE a reconnu le souci de fabrication et propose aux premiers acheteurs des boîtes à Essen de remplir un formulaire pour recevoir de nouveaux jetons mieux coupés, il vous faudra juste le numéro de série de votre exemplaire.
Merci à DoM pour le lien!
12 Comments
Deckard
Merci pour ce test, ça permet d’avoir une première approche de ce jeu qui à l’air génial. On en parle beaucoup mais peu de tests sont disponible. Il est surtout très important d’avoir fait ressortir que, outre ses qualités ludiques apparemment indéniables, le matériel n’est pas à la hauteur.
Alchemists est un jeu que j’attends mais je vais patienter encore un peu en attendant une seconde édition car rien n’est plus désagréable qu’un jeu génial qui est gaché par son materiel.
Merci à vous et bonne continuation à ce super site.
Mayoniaise
Entendu parler de ce jeu, mais sans vidéo, difficile de se faire une idée.Là, je comprends nettement le concept, merci ! A suivre donc !
Potion Rouge (@potionrouge)
Merci pour cette excellente critique de jeu, j’ai très hâte d’essayer! Personnellement j’aime bien le point sur le « i » d’Alchemist.
Gus
Merci Steeve. Mais encore une fois, fais très attention au matériel plus que moyen.
DoM
A noter que, selon le site de CGE, seules les premières boites sont affectées par ce souci matériel, et qu’il y a un formulaire à remplir sur leur site pour obtenir des jetons à la bonne taille.
Gus
Excellent DoM, merci pour l’info !!! J’édite aussitôt la critique. Merci.
DoM
Avec plaisir 😉
TheGoodTheBadAndTheMeeple
Excellente critique !
Impossible de le tester… Mais vraiment tentant 🙂
Nos amis marseillais l’ayant essayé un soir ont été conquis.
Je te rejoins sur le VRAI pari de CGE sur le jeu hors norme. Une réussite.
Mayoniaise
C’est une sorte de mastermind thématisé finalement ?
Gus
Avec deux cent mille autres mécaniques.
T2S
Petite info au passage, il existe aussi un jeu intitulé Alchemist de Carlo A. Rossi (2007) sur ce même thème… comme son nom l’indique.
Ci-dessous un site avec photos
http://boardgamegeek.com/boardgame/27385/alchemist
Fred H
Bon ben moi je me suis pris la VF de chez Iello, et aucun souci au niveau du matos. Ca claque!